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Conférence sur l’Afghanistan à Genève : le chef de l’ONU appelle à un cessez-le-feu et à une paix inclusive

Mohammad Haneef Atmar (à gauche), le ministre afghan des Affaires étrangères, avec Deborah Lyons, Représentante spéciale du Secrétaire général de l'ONU pour l'Afghanistan, à l'ONU à Genève.
Photo ONU/Violaine Martiin
Mohammad Haneef Atmar (à gauche), le ministre afghan des Affaires étrangères, avec Deborah Lyons, Représentante spéciale du Secrétaire général de l'ONU pour l'Afghanistan, à l'ONU à Genève.

Conférence sur l’Afghanistan à Genève : le chef de l’ONU appelle à un cessez-le-feu et à une paix inclusive

Aide humanitaire

Le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a appelé mardi à un « cessez-le-feu immédiat » en Afghanistan afin de créer un environnement propice aux négociations de paix de Doha avec les talibans.

Ce cessez-le-feu permettra de « sauver des vies et d’empêcher la propagation de la Covid-19 » a déclaré António Guterres, lors d’une conférence sur l’Afghanistan à Genève. Il s’est dit « profondément préoccupé par la persistance de niveaux de violence élevés, en particulier les attaques odieuses perpétrées récemment contre des civils, y compris des étudiants ».

Selon le chef de l’ONU, « le peuple afghan souffre depuis bien trop longtemps ».

La Conférence sur l’Afghanistan, placée sous le thème « paix, prospérité et autonomie », se tient lundi et mardi par vidéoconférence depuis Genève. Cette rencontre internationale est organisée conjointement par la Finlande, l’Afghanistan et les Nations Unies. Elle intervient à un moment déterminant dans le processus de paix entre le gouvernement afghan et les talibans, qui a débuté à Doha la mi-septembre.

Selon le chef de l’ONU, ce rendez-vous de Genève « permettra de créer un environnement propice aux négociations de paix sur l’Afghanistan à Doha - une occasion majeure de réaliser les aspirations de longue date du peuple afghan ». « Un processus inclusif, dans lequel les femmes, les jeunes et les victimes du conflit sont représentés de manière significative, offre le meilleur espoir d’une paix durable », a affirmé M. Guterres.

La conférence sur l'Afghanistan a lieu cette année à l'ONU à Genève.
Photo ONU/Violaine Martiin
La conférence sur l'Afghanistan a lieu cette année à l'ONU à Genève.

Kaboul face « au conflit, la pauvreté, l’application inégale de l’État de droit et la Covid-19 »

« Les progrès vers la paix contribueront au développement de toute la région, et constituent une étape essentielle vers le retour en toute sécurité, en bon ordre et dans la dignité de millions d’Afghans déplacés », a ajouté le chef de l’ONU.

De son côté, sa Représentante spéciale, Deborah Lyons, s’est dit « encouragée » par la détermination dont font preuve les équipes de négociation (à Doha) pour rester à la table et engager des pourparlers.

Selon l’ONU, ces négociations devront, à terme, porter sur « des questions sensibles et complexes ». Il s’agit notamment « de la configuration politique du pays, le rôle de l’Islam dans la société et dans le secteur de la justice ainsi que les droits des femmes et ceux des minorités religieuses et ethniques ».

En attendant, les Nations Unies estiment que le peuple afghan est confronté à de graves problèmes, notamment « le conflit, la pauvreté et l’application inégale de l’État de droit ».

« Deux crises mondiales majeures, la pandémie de Covid-19 et l’urgence climatique, rendent la vie encore plus difficile, en particulier pour les plus vulnérables », a fait valoir M. Guterres. Pour le chef de l’ONU, le nouveau coronavirus a exacerbé les problèmes humanitaires et de développement, entravé l’accès aux soins de santé et à l’éducation, et freiné la croissance économique, affectant des millions d’Afghans.

L’Afghanistan recense 44.706 cas confirmés de Covid-19 dont 1.687 décès, selon un décompte établi mardi par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). A l’approche de l’hiver, le chef de l’ONU craint d’ailleurs qu’une nouvelle flambée de cas de coronavirus « ne mette à rude épreuve le système de santé et l’économie déjà fragiles de l’Afghanistan, ce qui ne ferait qu’aggraver les souffrances ».

« Le peuple afghan a fait des progrès significatifs ces dernières années » - M. Guterres

En plus d’une situation déjà difficile « exacerbée cette année par le choc de la pandémie », « les Afghans continuent de considérer la corruption comme une triste réalité », a souligné de son côté la Représentante spéciale du Secrétaire général en Afghanistan. Selon Deborah Lyons, ces défis ne peuvent être ignorés et invite à les aborder « dans un esprit de détermination et non de désespoir ».

Pourtant malgré ces obstacles et des décennies de conflit, « le peuple afghan a fait des progrès significatifs ces dernières années », a rappelé le Secrétaire général de l’ONU. « L’accès à l’eau, à l’assainissement, à l’électricité et aux services de santé s’est amélioré », a détaillé M. Guterres, insistant sur le niveau de scolarisation des enfants, mais aussi la représentativité des femmes au sein du gouvernement et dans les assemblées législatives nationales ou locales.

« Pour l’avenir, ces droits doivent être les fondements d’un avenir pacifique », a donc plaidé M. Guterres. Une façon pour le chef de l’ONU de rappeler l’importance à ce que ces droits « restent ancrés dans la loi et protégés dans la pratique ».

Car sur le terrain, les femmes afghanes continuent de payer « un prix élevé dans le conflit ». Certaines ont subi des violences extrêmes et beaucoup continuent à se voir refuser des opportunités de toutes sortes, y compris l’éducation, le droit à la terre et à une vie sans violence.

Pour le Secrétaire général de l’ONU, ce sont donc des acquis à protéger. D’autant que les femmes afghanes démontrent chaque jour que leurs efforts en faveur d’un développement durable et inclusif peuvent améliorer la vie de tous.

Le Président afghan invite la communauté internationale à continuer à aider son pays

Pour les Nations Unies, les femmes et les filles afghanes ont besoin du soutien continu de la communauté internationale. C’est pourquoi, l’ONU estime qu’il est absolument essentiel que le processus de paix soit inclusif et que les femmes jouent un rôle significatif et égal dans la détermination de ses résultats.

Cette conférence des donateurs, qui se tient cette année principalement par visioconférence depuis Genève, a lieu tous les quatre ans.

Le chef de l’ONU a ainsi invité les voisins et partenaires de Kaboul à jouer leur rôle dans la construction d’un avenir pacifique et prospère pour l’Afghanistan en saisissant ces opportunités de coopération. Les progrès vers la paix contribueront au développement de toute la région et constituent une étape essentielle vers le retour en toute sécurité et dans la dignité de millions d’Afghans déplacés. « Les Nations Unies sont aux côtés du peuple afghan sur la voie de la paix, du développement et de l’autonomie », a-t-il fait remarquer.

Tout en remerciant les pays pour leur générosité, le chef de l’ONU veut néanmoins que ces promesses de contributions « se traduisent par des progrès réels et des améliorations concrètes pour le peuple afghan ».

A cet égard, le Président afghan, Ashraf Ghani, a appelé mardi les donateurs internationaux à rester aux côtés du peuple afghan. « Nous sommes en train de vivre l’une des plus grandes tragédies de l’Histoire : la pandémie de Covid-19 », a déclaré M. Ghani lors d’une allocation retransmise par vidéo depuis Kaboul. Il a exprimé la reconnaissance de Kaboul face à l’action de la communauté internationale pour l’Afghanistan, « un engagement qui reste fort » malgré ces moments « de souffrance collective ».

« Nous demandons à nos partenaires internationaux de nous aider à faire plus avec moins », a ajouté M. Ghani, insistant sur l’importance de l’aide financière pour leur « développement dans un avenir prévisible ».

Les donateurs promettent 12 milliards de dollars à l'Afghanistan d’ici à 2024

A l'issue de la conférence de donateurs. le ministre finlandais de la Coopération, Ville Skinnari, a annoncé que l'Afghanistan recevrait jusqu'à 12 milliards de dollars d'aide des pays donateurs d'ici 2024.

«Les donateurs ont promis plus de trois milliards de dollars pour la première année du plan quadriennal à venir (2021 à 2024) », a ajouté M. Skinnari, relevant que ces « engagements annuels devraient rester à ce même niveau année après année, cela devrait faire 12 milliards de dollars sur quatre ans ». 

Il s’agit d’une légère baisse par rapport il y a quatre ans. Lors de la précédente conférence de 2016 à Bruxelles, plus 15 milliards de dollars avaient été promis à l’Afghanistan. Malgré cet écart, le ministre afghan des Finances, Abdul Hadi Arghandiwal, a qualifié la rencontre de Genève de « succès ». 

Lors des débats virtuels, plusieurs pays ont insisté sur l'importance de rassembler tous les citoyens pour une paix durable en Afghanistan.