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Au moins, 2,75 millions de migrants bloqués par la Covid-19 (OIM)

Avant la pandémie de Covid, des travailleurs migrants du Tadjikistan employés à Moscou, en Russie, sur un site de construction.
Photo OIM/Marcel Crozet
Avant la pandémie de Covid, des travailleurs migrants du Tadjikistan employés à Moscou, en Russie, sur un site de construction.

Au moins, 2,75 millions de migrants bloqués par la Covid-19 (OIM)

Migrants et réfugiés

Au moins 2,75 millions de migrants étaient empêchés de rentrer chez eux cet été par les restrictions imposées pour combattre la pandémie de Covid-19, affirme l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), qui appelle d’urgence à une coopération internationale pour trouver des solutions à cette crise.

Une étude trimestrielle de l’OIM sur l’impact de la pandémie de Covid-19 sur les migrants révèle pour la première fois l’ampleur et la complexité des défis auxquels sont confrontés les gouvernements et les personnes en mouvement à un moment où au moins 2,75 millions de migrants sont bloqués dans le monde. 

« L’ampleur et la mise en œuvre de dizaines de milliers de mesures de restrictions au déplacement y compris les fermetures de frontières et les mesures de confinement liées au Covid-19, exigent que les Etats collaborent avec leurs voisins et les pays d’origine des migrants pour répondre à leurs besoins et leur fragilités », a souligné le Directeur général de l’OIM, Antonio Vitorino.

Mais selon cette agence onusienne basée à Rome, ce chiffre de 2,75 millions représente les cas connus de migrants bloqués à l’étranger. Et pour les besoins de l’enquête, les migrants bloqués sont définis comme des individus en dehors de leur pays de résidence habituelle, souhaitant retourner chez eux mais qui ne peuvent le faire en raison de restrictions de mobilité liées à la Covid-19. Cet instantané, basé sur des données collectées dans 382 lieux dans plus de 101 pays, « est considéré comme une large sous-estimation du nombre de migrants bloqués ou autrement touchés par le nouveau coronavirus », indique le rapport.

Des conditions insalubres

Les circonstances dans lesquelles les gens se trouvent varient énormément. Dans une récente déclaration commune, les agences des Nations Unies ont d’ailleurs souligné la situation critique de quelque 400.000 marins actuellement bloqués en mer, dont beaucoup sont à bord de leurs navires depuis 17 mois, soit six mois de plus que le maximum de 11 mois.

Mais d’une manière générale, une fois bloqués, certains migrants sont plus exposés aux abus, à l’exploitation et à la négligence. « La perte de leurs moyens de subsistance peut accroître leur vulnérabilité et les exposer à l’exploitation par des syndicats criminels, des trafiquants d’êtres humains et d’autres personnes qui profitent de ces situations », a déclaré Paul Dillon, porte-parole de l’OIM lors d’un point de presse à Genève. 

« Les migrants sont souvent confrontés à la stigmatisation, à la discrimination et aux attaques xénophobes, mais la mesure dans laquelle les médias sociaux en particulier ont servi d’incubateur et d’amplificateur de discours de haine est un phénomène profondément inquiétant », a ajouté le M. Vitorino, cité dans le communiqué.

Selon l’OIM, la violence dont ses équipes ont été témoins à l’encontre des migrants et d’autres personnes vulnérables est « inexcusable ». « Il est essentiel de criminaliser les formes extrêmes de discours de haine, y compris l’incitation à la discrimination et à la violence, et de tenir les auteurs responsables », a insisté le chef de l’OIM.

En outre, des mesures telles que le recours à la quarantaine pour gérer la propagation du coronavirus ont malheureusement aussi entraîné l’entreposage des migrants dans des conditions insalubres. Une situation où les mesures d’hygiène et d’éloignement physique de base ne peuvent être respectées. Pour l’OIM, cela créé un terrain propice à la propagation de maladies potentiellement mortelles et une situation où les migrants risquent d’être confrontés à une discrimination supplémentaire.

Plus 3.000 Mozambicains autorisés à retourner travailler en Afrique du Sud

C’est dans ce contexte que l’OIM a suivi, depuis début mars, les restrictions à la mobilité dans le monde. Et les données les plus récentes révèlent que quelque 220 pays, territoires et zones ont imposé plus de 91.000 restrictions à la circulation. Grâce à ces mesures de confinement dans le monde, l’OIM a reçu des centaines de demandes pour aider près de 115.000 migrants bloqués à rentrer chez eux volontairement et en toute sécurité.

L’OIM a pu ainsi aider au retour volontaire de plus de 15.000 migrants vulnérables et en détresse au cours des derniers mois, d’une manière qui répond aux préoccupations de santé publique liées à la Covid-19. « Il devrait être clair que les migrants peuvent être renvoyés chez eux de manière sûre et digne malgré les contraintes imposées par la Covid-19. Là où les gouvernements ont pris des mesures, des dizaines de milliers de migrants ont pu rentrer chez eux d’une manière qui tient compte des défis sanitaires importants que pose la pandémie », a fait valoir M. Vitorino.

Mais pour l’agence onusienne, une coopération internationale efficace est nécessaire de toute urgence pour faire face à la situation de ces millions de migrants bloqués dans le monde entier en raison des restrictions de mobilité imposées pour contenir la propagation de Covid-19.

A ce sujet, l’OIM rappelle que le Canada, le Portugal, l’Italie, l’Allemagne et de nombreux autres États ont adapté le régime des visas pour les travailleurs saisonniers à la lumière des contraintes de mobilité posées par la pandémie.

Le gouvernement du Qatar a également annoncé que les travailleurs migrants en quarantaine ou sous traitement recevront un salaire complet, tandis que la République slovaque a prolongé les autorisations de séjour pour les non-citoyens à titre de mesure de crise exceptionnelle. 

Si les restrictions à la mobilité continuent d’entraver la circulation des travailleurs migrants dans le monde, des exceptions sont faites. Ces dernières semaines, près de 3.400 Mozambicains travaillant dans les mines ont été autorisés à retourner en Afrique du Sud pour reprendre leur travail après avoir subi un examen médical. Des discussions sont en cours pour fournir la même installation à des milliers de travailleurs agricoles.

« Les couloirs de travail ont été rouverts, ce qui a contribué à relancer les économies des pays d’origine et de destination et à atténuer l’impact économique de la pandémie », a indiqué le chef de l’OIM, plaidant pour une poursuite de « ces bonnes pratiques à plus grande échelle ».