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En Libye, l’embargo sur les armes continue d’être violé (ONU)

Un enfant traverse les débris et les destructions du centre-ville de Benghazi, en Libye (photo d'archives)..
© UNICEF/Giovanni Diffidenti
Un enfant traverse les débris et les destructions du centre-ville de Benghazi, en Libye (photo d'archives)..

En Libye, l’embargo sur les armes continue d’être violé (ONU)

Paix et sécurité

La cheffe de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) a dénoncé, mercredi, devant le Conseil de sécurité la « violation flagrante » de l’embargo de l’ONU sur les armes dans ce pays d’Afrique du Nord plongé dans une guerre civile.

« Regrettable ». C’est ainsi que Stephanie Williams a qualifié, devant le Conseil, l’aide militaire que continuent de fournir plusieurs puissances étrangères aux forces du général Khalifa Haftar dans l’est de la Libye et à celles du Gouvernement d’accord national dirigé par Fayez al-Sarraj, reconnu par les Nations Unies et qui contrôle l’ouest du pays.

Ces deux derniers mois, 70 vols de ravitaillement ont atterri dans les aéroports de l’est de la Libye dominé par Haftar tandis que 30 avions ont réapprovisionné l’ouest du pays sous le contrôle du gouvernement d’al-Sarraj. Ces activités de ravitaillement des forces militaires constituent selon la cheffe de la MANUL, une « atteinte alarmante à la souveraineté de la Libye » et « une violation flagrante de l’embargo de l’ONU sur les armes ».

« La Mission continue de recevoir des rapports de présence à grande échelle de mercenaires et agents étrangers », a, par ailleurs, déclaré la Représentante spéciale par intérim du Secrétaire général de l’ONU en Libye devant le Conseil. Une présence qui, selon elle, complique davantage la situation en Libye et les chances d'un règlement futur du conflit.

Sur le terrain, une « confrontation difficile » se poursuit autour de Syrte, à environ 450 kilomètres à l’est de la capitale Tripoli. La vie des 130.000 habitants vulnérables de cette ville côtière est en péril, a alerté la Représentante spéciale par intérim, tout comme l’infrastructure pétrolière vitale du pays qui constitue sa bouée de sauvetage économique.

Dans la nuit du 26 août, les forces du général Haftar ont tiré des roquettes vers des zones dans lesquelles opéraient les forces du Gouvernement d’accord national libyen près de Syrte. Plus récemment, dans la nuit du 1er au 2 septembre, des roquettes auraient été tirées par des forces affiliées au général Haftar. « Les roquettes n'ont causé aucun dommage ni aucune blessure mais constituent une violation du cessez-le-feu que le porte-parole du général Haftar avait déclaré avoir souscrit en juin », a dit Mme Williams.

Pour la Représentante spéciale par intérim, de telles actions imprudentes risquent d’enflammer une confrontation à grande échelle, avec les conséquences dévastatrices que cela entraînerait pour le pays et la région. Elle a encouragé les deux parties à considérer la mise en place d’une zone démilitarisée, «  à commencer par Syrte » et qui serait appuyée par des mesures visant à restaurer la confiance.

 « Il est impératif que vous utilisiez votre influence pour faire comprendre à toutes les parties que le moment est venu de faire preuve de retenue », a insisté Mme Williams auprès des membres du Conseil, sollicitant l’appui de ces derniers « pas seulement avec des mots, mais surtout avec des actes ».

Crise énergétique, Covid-19, drame des migrants et réfugiés

L’instabilité politique et militaire en Libye est accentuée par la dégradation des conditions économiques et sociales. La levée partielle du blocage des raffineries de pétrole par les forces de M. Haftar n’a pas réduit la crise énergétique qui frappe la Libye. A Tripoli, les habitants vivent souvent 20 heures par jour sans électricité.

« Nous devons faire de la levée complète du blocus pétrolier, qui est en place depuis janvier, une priorité absolue », a dit Mme Williams, soulignant que « l'utilisation du pétrole comme arme de guerre n'a fait qu'exacerber la misère des Libyens et propulser le pays vers un effondrement économique et social ».

L’envoyée de l’ONU en Libye a également alerté sur les conséquences de la pandémie de Covid-19 avec un nombre de cas confirmé qui a doublé ces deux dernières semaines. En date du 1er septembre, le pays comptait 15.156 cas de nouveau coronavirus, dont 250 décès officiellement enregistrés.

La situation des migrants et réfugiés présents sur le territoire libyen continue d’être une source de profonde préoccupation. Le 17 août dernier, au moins 45 d’entre eux sont morts au large de la Libye en tentant de traverser la Méditerranée pour se rendre en Europe.

Mme Williams a répété ce que l’ONU et ses agences pour les réfugiés (HCR) et les migrations (OIM) ne cessent de répéter : « La Libye ne peut être considérée comme un port sûr de débarquement ».

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En date du 21 août, près de 2.400 migrants et réfugiés étaient officiellement détenus dans des centres en Libye. « Ils font régulièrement l’objet de violations des droits de l’homme », a rappelé la haute responsable onusienne. « Beaucoup plus sont dans des centres non officiels où l’ONU n’a pas accès », a-t-elle précisé.

Face à ce sombre tableau en Libye, la Représentante spéciale a appelé les membres du Conseil à agir, car « le statu quo est tout simplement insoutenable ».