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Héros de tous les jours : instaurer la confiance et sauver des vies

Marie-Roseline Darnycka Bélizaire, une épidémiologiste de l'OMS, parle avec une femme dans le cadre des efforts de lutte contre Ebola en RDC.
Photo OMS/J. Kannah
Marie-Roseline Darnycka Bélizaire, une épidémiologiste de l'OMS, parle avec une femme dans le cadre des efforts de lutte contre Ebola en RDC.

Héros de tous les jours : instaurer la confiance et sauver des vies

Aide humanitaire

Marie-Roseline Bélizaire, médecin et épidémiologiste à l'Organisation mondiale de la santé (OMS), utilise sa passion pour la médecine communautaire pour aider à réduire la propagation de la Covid-19 en République centrafricaine (RCA).

Originaire d'Haïti, le Dr Bélizaire travaille dans le domaine humanitaire depuis l'obtention de son diplôme en médecine et, en 2015, a commencé à soutenir l'effort visant à ralentir la propagation du virus Ebola en République démocratique du Congo (RDC). Cette année, l’OMS l’a envoyée en RCA, pour mettre en place la réponse de l’agence à la Covid-19 dans le pays.

Le Dr Bélizaire partage son histoire dans le cadre de la campagne #RealLifeHeroes, du Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), en vue de la Journée mondiale de l'aide humanitaire de cette année.

Marie-Roseline Darnycka Bélizaire, une épidémiologiste de l'OMS, à Itipo, en République démocratique du Congo.
Photo OMS/Lindsay Mackenzie
Marie-Roseline Darnycka Bélizaire, une épidémiologiste de l'OMS, à Itipo, en République démocratique du Congo.

Instaurer la confiance

« J'ai choisi la médecine communautaire parce que je veux être et travailler avec la communauté. La meilleure chose que nous pouvons faire pour les communautés est de les empêcher d'avoir à être guéries, en les gardant en bonne santé. Tout peut être évité au niveau de base.

Je suis allée à Cuba et j'ai vu comment la médecine se développe au niveau familial et communautaire. Les médecins vivent dans leur communauté et ils savent tout sur la santé et les maladies de leur population. Lorsque vous êtes avec la communauté, vous vous asseyez et les écoutez vous dire ce qu'ils ressentent. En RDC, lors de la riposte à Ebola, je me suis rendue dans des villages Maï-Maï (milices communautaires). Je me suis assise et j'ai mangé avec eux : si vous mangez avec eux, ils vous feront confiance.

Il était très difficile de bâtir cette confiance au début. Ils ne font pas confiance aux étrangers. Ils ont de plus gros problèmes qu'Ebola. J'ai demandé à mes collègues d'identifier qui a de l'influence et avec quels groupes nous devrions travailler. Nous avons travaillé avec des motocyclistes, des associations de femmes, de voyage et de patients et des travailleurs du sexe. Nous n'avons laissé personne de côté, car nous voulions que tout le monde soit impliqué. Nous leur avons montré comment développer des projets et faire partie de la société et comment ils pouvaient travailler avec, et non contre, le gouvernement. Nous avions pour objectif la solidarité et l'unité.

Katwa, dans la ville de Butembo, a été l'une des plus touchées par Ebola. Les fonctionnaires ont d'abord pensé que nous étions là simplement pour gagner de l'argent. Mais une fois qu'ils ont cru en ce que nous faisions, ils ont décidé de nous aider et ils ont convaincu la communauté d'écouter.

Marie-Roseline Darnycka Bélizaire, une épidémiologiste de l'OMS, sur une moto près d'Itipo, en République démocratique du Congo.
Photo OMS/Lindsay Mackenzie
Marie-Roseline Darnycka Bélizaire, une épidémiologiste de l'OMS, sur une moto près d'Itipo, en République démocratique du Congo.

Leçons tirées

Il y a un certain nombre de leçons que vous pouvez appliquer de la réponse à Ebola en RDC à la réponse à la Covid-19 en RCA.

Premièrement, la communauté doit être au centre de toute réponse. Vous devez travailler avec les gens au tout début et à chaque étape par la suite. 

Deuxièmement, vous devez adopter une stratégie gagnant-gagnant. Cela signifie que vous n'essayez pas seulement de mettre fin à l'épidémie d'Ebola ou de Covid, vous devez vous concentrer sur ce qui va suivre. Qu'auront-ils après la fin de la maladie? Nous devons répondre à leurs besoins fondamentaux.

Troisièmement, la recherche des contacts est cruciale. C'est compliqué, car les gens peuvent être exposés à la Covid plusieurs fois, nous ne savons donc pas toujours qui en est la source. Mais nous suivons et trouvons des sources. Cela a été une courbe d'apprentissage pour cette communauté. Nous avons formé 16.000 personnes dans la région du Nord-Kivu en RDC, et nous avons maintenant une chance de construire un tel système ici.

Avec Ebola, la difficulté était l'accès à la communauté, à cause de l'insécurité ou parce que les groupes ne voulaient pas nous laisser entrer, et aussi à cause des routes en mauvaise état.

La RCA est similaire à la RDC en termes d'insécurité. Ici, nous avons une crise sanitaire au milieu d'une crise humanitaire prolongée.

Le plus grand défi est donc de coordonner notre réponse et le manque de ressources. Ce pays est si vulnérable et le système de santé est si faible. Nous devons construire un système de santé tout en faisant face à une urgence. Donc, nous nous occupons à la fois de la préparation et de la réponse. Cela rend les choses très compliquées.

L’une des meilleures choses que nous ayons accomplies en RCA est d’impliquer le ministère de la Protection civile dans le porte-à-porte pour détecter les personnes et sensibiliser. C’est une réalisation énorme, car cela a vraiment augmenté notre capacité.

J'adore ce que je fais. Je dis toujours que je n’ai pas l’impression de travailler : ce travail est une passion pour moi. Ma passion est de travailler dans la communauté. Chaque fois que je sais que quelqu'un est vivant grâce à mon intervention, je me sens épanouie - c'est ce qui remplit ma vie. Telle est ma mission.

Et c'est aussi la mission de l'OMS. Je travaille pour une institution merveilleuse et j'adhère à sa mission - sauver des vies. Je dois continuer tant que les gens ont besoin de mon aide. Cela me rend plus qu'heureuse ».