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Coronavirus : un coup dur pour les économies africaines, estime l’ONU

Le port de Dar es Salaam, en Tanzanie.
Photo Banque mondiale/Rob Beechey
Le port de Dar es Salaam, en Tanzanie.

Coronavirus : un coup dur pour les économies africaines, estime l’ONU

Développement économique

La Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA) a averti que la pandémie de coronavirus pourrait sérieusement mettre à mal la croissance économique déjà stagnante de l’Afrique.

Selon la CEA, l’impact du Covid-19 en Afrique se manifesterait par une perte de revenus pouvant atteindre 65 milliards de dollars pour les pays du continent exportateurs de pétrole, alors que les prix du pétrole brut continuent de chuter.

Selon la Secrétaire exécutive de la CEA, Vera Songwe, le coronavirus a incontestablement un impact sur le commerce de l’Afrique. « Après avoir déjà fortement frappé le principal partenaire commercial de l’Afrique, la Chine, le Covid-19 a inévitablement un impact sur le commerce de l’Afrique », a déclaré vendredi l’économiste camerounaise lors d’une conférence de presse à Addis- Abeba où siège la CEA.

Bien que seulement quelques cas ont été signalés dans plus d’une quinzaine de pays d’Afrique, la crise va porter un coup sévère aux économies africaines. L’Afrique pourrait perdre la moitié de son produit intérieur brut (PIB), « la croissance passant de 3,2 % à environ 2 %, pour un certain nombre de raisons, dont la perturbation des chaînes d’approvisionnement mondiales », a fait valoir Mme Songwe, ajoutant que l’interconnexion du continent avec les économies touchées par le virus de l’Union européenne, de la Chine et des États-Unis provoquait des effets d’entraînement.

Selon la CEA, la pandémie de coronavirus pourrait faire chuter les recettes d’exportation de combustibles de l’Afrique à environ 101 milliards de dollars en 2020. L’organisme régional onusien cite le cas du Nigeria. « Le Covid-19 pourrait réduire les exportations totales de pétrole brut du Nigeria en 2020 de 14 à 19 milliards de dollars ».

Plus largement, une baisse des prix des matières premières pourrait entraîner des pressions budgétaires pour les puissances économiques africaines telles que l’Afrique du Sud, le Nigéria, l’Algérie, l’Égypte et l’Angola. Par ailleurs, les envois de fonds et le tourisme font partie des secteurs économiques touchés.

Alors que le coronavirus continue de se propager dans le monde entier, la CEA estime que cette propagation entraînera une diminution des flux d’investissements directs étrangers (IDE), une fuite des capitaux, un resserrement des marchés financiers intérieurs et un ralentissement des investissements – et en conséquence des pertes d’emplois.

Plus de 10 milliards de dollars de hausse imprévue pour les dépenses de santé

En outre, la CEA avertit que les produits pharmaceutiques importés en Afrique, en grande partie d’Europe et depuis d’autres partenaires extérieurs au continent également touchés par le Covid-19, pourraient voir leurs prix augmenter et leur disponibilité réduite pour les Africains.

« Avec près des deux tiers des pays africains étant des importateurs nets de denrées alimentaires de base, on craint que les pénuries n’aient de graves répercussions sur la disponibilité et la sécurité alimentaires », relève l’organe onusien.

Devant un tel scenario, l’Afrique aurait aussi besoin de 10,6 milliards de dollars de hausse imprévue de ses dépenses de santé pour freiner la propagation du coronavirus, alors que d’autre part, les pertes de revenus pourraient conduire à « une dette insoutenable ».

La CEA estime que les gouvernements africains pourraient revoir et réviser leurs budgets afin de redéfinir les priorités des dépenses en vue d’atténuer les effets négatifs attendus du nouveau coronavirus sur leurs économies. Comme filet de sécurité, la commission onusienne exhorte les gouvernements à offrir des incitations aux importateurs de denrées alimentaires pour qu’ils fassent rapidement des achats afin de garantir des réserves alimentaires suffisantes dans les principaux produits alimentaires de base.

Une opportunité pour la Zone de libre-échange continentale africaine

Malgré les signaux préoccupants qu’envoit le coronavirus sur l’économie africaine, la CEA estime que cette crise pourrait être un opportunité pour le continent de tirer partie de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) qui doit entrer en vigueur en juillet.

Selon l’organisme onusien, le marché intra-africain pourrait contribuer à atténuer certains des effets négatifs du Covid-19 en limitant la dépendance vis-à-vis des partenaires extérieurs, en particulier dans le domaine des produits pharmaceutiques et des denrées alimentaires de base.

La CEA souligne la nécessité pour l’Afrique de mettre en œuvre d’urgence la ZLECA en exhortant les pays africains qui exportent des médicaments à donner la priorité à la vente sur le marché continental.