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Syrie : l’ONU appelle à un cessez-le-feu immédiat dans le nord-ouest

Un enfant marche dans la neige dans un camp de fortune pour familles déplacées dans le nord-ouest de la Syrie.
© UNICEF/Baker Kasem
Un enfant marche dans la neige dans un camp de fortune pour familles déplacées dans le nord-ouest de la Syrie.

Syrie : l’ONU appelle à un cessez-le-feu immédiat dans le nord-ouest

Droits de l'homme

Alarmé par la détérioration rapide de la situation humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie et les souffrances des civils, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a appelé mardi à un cessez-le-feu immédiat.

« Le Secrétaire général appelle à un cessez-le-feu immédiat. Le droit international humanitaire doit être respecté. Il n'y a pas de solution militaire. La seule voie vers la stabilité est une solution politique crédible et inclusive facilitée par les Nations Unies, conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité », a dit son porte-parole dans une déclaration à la presse.

Le droit international humanitaire doit être respecté. Il n'y a pas de solution militaire -  le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres

Le chef de l’ONU a noté que l’offensive actuelle a déplacé près de 900.000 civils depuis le 1er décembre 2019, souvent à plusieurs reprises, des centaines de personnes ont été tuées au cours de la même période, et les hostilités approchent maintenant des zones densément peuplées.

Plus tôt dans la journée, la Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, a aussi exprimé son « horreur » face aux violences et l’ampleur de la crise humanitaire dans le nord-ouest syrien. Elle a réclamé la mise en place de « couloirs humanitaires » pour permettre aux civils de fuir les combats.

La cheffe des droits de l’homme de l’ONU a déclaré qu’il était cruel et incroyable que des civils, principalement des femmes et des enfants, vivant sous des morceaux de bâche plastique et dans des conditions de gel, soient bombardés.

Selon Mme Bachelet, des familles entières, dont certaines ont fui d’un coin à l’autre de la Syrie au cours de la dernière décennie, « constatent tragiquement que les bombes font partie de leur vie quotidienne ».

« Comment peut-on justifier le lancement d’attaques aussi aveugles et inhumaines? » a lancé Bachelet, dans un communiqué rendu public ce mardi à Genève.

« Aucun abri n’est plus sûr. Et comme l’offensive du gouvernement se poursuit et que les gens se retrouvent de force dans des zones de plus en plus petites, je crains que d’autres personnes soient tuées », a-t-elle relevé.

Des couloirs humanitaires

Michelle Bachelet a appelé le gouvernement syrien et ses alliés ainsi que les groupes rebelles, « à autoriser les couloirs humanitaires » et à faciliter le « passage des civils en toute sécurité ».

« La protection des civils est primordiale, et le mépris flagrant pour la vie et la sécurité des civils va à l’encontre des obligations que toutes les parties doivent respecter en vertu du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme », a mis en garde Mme Bachelet.

Le gouvernement syrien, soutenu par ses alliés, a lancé récemment une grande offensive militaire pour reprendre des zones clés à Idlib et Alep. Du 1er au 16 février, le Bureau des droits de l’homme des Nations Unies a ainsi enregistré des incidents au cours desquels au moins 100 civils, dont 18 femmes et 35 enfants, ont été tués et de nombreux autres civils blessés à la suite des frappes aériennes et terrestres menées par les forces gouvernementales et leurs alliés. En outre, sept civils, dont deux femmes et trois enfants, ont été tués à la suite des frappes terrestres des groupes armés non étatiques.

La protection des civils est primordiale - Michelle Bachelet, Haut-Commissaire aux droits de l'homme

Depuis le 1er janvier de cette année, le Haut-Commissariat a enregistré la mort de 298 civils à Idlib et Alep. Environ 93% de ces décès ont été causés par le gouvernement syrien et ses alliés. De son côté, l’UNICEF indique depuis le début de l’année, 28 enfants ont été tués et 49 blessés dans la région. En outre, 10 installations médicales et 19 centres d’enseignement ont été directement touchés ou affectés par des frappes.

Face à un tel drame, la Haut-Commissaire a appelé d’urgence toutes les parties au conflit syrien, y compris les acteurs étatiques et non étatiques, à mieux protéger civils.

« Les civils qui fuient les combats sont entassés dans des zones sans abri sûr dont la taille diminue d’heure en heure. Et pourtant, ils sont bombardés. Ils n’ont tout simplement nulle part où aller », a-t-elle fait valoir, tout en ajoutant qu’il y avait un risque élevé que les civils ne puissent plus passer d’Idlib à d’autres zones en Syrie.

La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Michelle Bachelet.
OIT/M. Creuset
La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Michelle Bachelet.

Offensive dans le nord-ouest syrien : 900.000 déplacés depuis décembre (ONU)

Le conflit dans le nord-ouest de la Syrie a provoqué la fuite de 900.000 personnes depuis le début de l’offensive de Damas en décembre 2019. Ce qui représente, selon l’ONU, le plus grand déplacement de personnes depuis le début du conflit en 2011. Selon les estimations onusiennes, environ 80 % des déplacés sont des femmes et des enfants.

A cet égard, l’UNICEF précise que depuis le 1er décembre 2019, plus de 500.000 enfants ont été déplacés par la violence intense qui sévit dans le nord-ouest de la Syrie. Des dizaines de milliers d’enfants et leurs familles vivent désormais sous des tentes et en plein air, dans un climat très froid et sous la pluie.

Par ailleurs, ces mouvements de populations et les hostilités ont perturbé les programmes réguliers de vaccination de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), « ce qui augmente considérablement le risque d’apparition de maladies », a averti Tarik Jasarevic, porte-parole de l’OMS.

Le carnage dans le nord-ouest de la Syrie continue de faire un terrible bilan pour les enfants - Henrietta Fore, Directrice exécutive de l’UNICEF  

Un centre de vaccination sur trois dans le nord-ouest est temporairement ou définitivement fermé en raison des hostilités et des zones qui ont été désertées. Pourtant, l’OMS prévoit une campagne de vaccination contre la polio le mois prochain, afin de tenir la polio à distance de la Syrie.

De plus, l’agence onusienne basée à Genève note qu’à la date de ce mardi 18 février, 74 établissements de santé ont suspendu leurs services à Idleb et Alep depuis le 1er décembre 2019, ce qui a directement réduit l’accès des civils aux soins de santé. Les dernières attaques ont eu lieu hier lundi après-midi, sur deux hôpitaux distincts à Daret Azza dans le gouvernorat d’Alep. Elles portent à 6 le nombre total d’attaques des infrastructures sanitaires cette année. Des raids dans le nord-ouest du pays qui ont fait une dizaine de morts et une trentaine de blessés.

Plus globalement, « le carnage dans le nord-ouest de la Syrie continue de faire un terrible bilan pour les enfants », a déclaré dans un communiqué Henrietta Fore, Directrice exécutive de l’UNICEF.  

De son côté, Mme Bachelet s’est « alarmée » de « l’échec de la diplomatie » face à la crise syrienne, estimant qu’elle « devrait faire passer la protection des civils avant toute victoire politique ou militaire ».

« Je condamne dans les termes les plus fermes l’impunité persistante pour les violations du droit international humanitaire commises par les différentes parties au conflit », a conclu la cheffe des droits de l’homme de l’ONU.