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Les chefs de police de l’ONU au Mali et en RDC exposent les défis du rétablissement de l’Etat de droit

Réunion du Conseil de sécurité sur les opérations de maintien de la paix le 6 novembre 2019.
Photo : ONU/Manuel Elias
Réunion du Conseil de sécurité sur les opérations de maintien de la paix le 6 novembre 2019.

Les chefs de police de l’ONU au Mali et en RDC exposent les défis du rétablissement de l’Etat de droit

Paix et sécurité

Les Commissaires de police des missions des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUSCO) et au Mali (MINUSMA) ont partagé mercredi devant les membres du Conseil de sécurité leurs expériences de terrain.

Chef de la police de la MONUSCO, Awale Abdounasir a rappelé que la primauté de l’Etat de droit demeure une condition préalable au développement des États fragilisés, tels que la RDC.

En plus de la mobilisation de l’armée, il a jugé approprié de renforcer le système judiciaire par une chaîne pénale plus transparente et très rigoureuse dans l’application des lois. La solution militaire ayant montré ses limites, M. Abdounasir a prôné des solutions politiques durables, la lutte contre la mauvaise gouvernance, ainsi que la garantie d’un système de justice pénale opérationnel et accessible, sans oublier l’impérieuse nécessité d’accroître la transparence dans la gestion des affaires publiques. 

Le Commissaire de police djiboutien a plaidé pour le renforcement des capacités opérationnelles de la police civile des pays fragilisés, assorti d’un plan conséquent de réforme au profit des tribunaux et établissements pénitentiaires, arguant qu’il s’agit là d’un gage de bonne gouvernance pour une lutte efficiente. Il a relevé que la lutte contre les crimes organisés exigera toujours des stratégies nationales, régionales et internationales, le tout enraciné dans une coopération mondiale avec une approche politique.

Devant le Conseil de sécurité, M. Abdounasir a affirmé qu’il n’y a pas de solution aux nombreuses crises sécuritaires issues des crimes organisés en RDC en l’absence d’une stratégie politique globale pour lutter contre les principaux groupes armés et s’attaquer aux causes profondes du conflit, ainsi que leur source de financement. L’approche de la MONUSCO sera donc désormais fondée sur des plans de prévention et d’intervention menés politiquement, afin d’éviter la trop grande militarisation de la réponse. Il a enfin plaidé pour la consolidation des mécanismes régionaux intervenant dans le domaine du crime organisé. 

Seynabou Diouf, Commandante de police sénégalaise à UNPOL (au centre) visite un orphelinat à Kibati en République démocratique du Congo.
Nations Unies
Seynabou Diouf, Commandante de police sénégalaise à UNPOL (au centre) visite un orphelinat à Kibati en République démocratique du Congo.

Lenteur de la mise en oeuvre de l'accord de paix au Mali

Issoufou Yacouba, le chef de la police de la MINUSMA, a expliqué que la lente mise en œuvre de l’accord de paix au Mali avait affecté la capacité de l’État à rétablir son autorité dans le Nord et le Centre. Une lenteur qui a érodé la confiance de la population et créé un environnement propice aux organisations terroristes qui répondent aux besoins essentiels de la population dans leurs zones d’influence.

Malgré l’opérationnalisation croissante de la force conjointe du G5 Sahel pour renforcer les autorités maliennes, certaines communautés sont la proie de groupes extrémistes et ont dû constituer des groupes d’autodéfense, exacerbant les conflits communautaires, a signalé le Commissaire de police nigérien. La police de la MINUSMA a fait ce qu’elle a pu pour pallier ces manques, notamment par la formation des unités locales et la fourniture des infrastructures manquantes.

Pour la protection des civils, la police de la MINUSMA apporte un soutien crucial à l’opérationnalisation du Centre de fusion et d’analyse du renseignement et au Centre de coordination et de gestion des risques dans l’analyse de l’information, ce qui permet d’améliorer les capacités opérationnelles grâce à un système de veille et d’alerte rapide. Elle appuie également la mise en œuvre des stratégies du gouvernement malien, notamment celles visant à protéger les civils et à rétablir l’autorité de l’État et des services de base.

À cet égard, 49 projets ont été mis en œuvre dans la région de Mopti, a précisé M. Yacouba. La mission onusienne au Mali apporte aussi son soutien à la lutte contre l’impunité, qui est une cause profonde de la crise, et au renforcement de la chaîne judiciaire, notamment par les capacités d’analyse des données criminelles.

S’agissant de la mise en œuvre d’un plan global de redéploiement des forces de sécurité maliennes, la MINUSMA plaide pour une accélération du processus de réforme du secteur de la sécurité et, de manière globale, appuie les initiatives visant à rétablir la gouvernance dans les zones non contrôlées car il s’agit d’un enjeu primordial, a souligné M. Yacouba.  La mission onusienne appuie encore les initiatives du gouvernement malien à travers l’engagement de la société civile et des communautés.

Dans un pays aussi divers que le Mali, il est d’une grande importance de soutenir le concept de police de proximité pour établir des partenariats stratégiques fondés sur la concertation préalable et l’inclusion des communautés, a relevé le Commissaire de police. M. Yacouba a souligné que les défis sont encore nombreux au Mali, citant notamment la lenteur du processus de réforme du secteur de la sécurité, les difficultés à gérer les frontières et les problèmes de financement des capacités des forces de sécurité.