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Haïti : l’ONU s’inquiète de l’enlisement de la crise socio-politique

Port-au-Prince, la capitle d'Haïti.
Photo MINUJUSTH/Leonora Baumann
Port-au-Prince, la capitle d'Haïti.

Haïti : l’ONU s’inquiète de l’enlisement de la crise socio-politique

Paix et sécurité

Le Bureau des droits de l’homme de l’ONU a fait part vendredi de son inquiétude concernant la situation socio-politique en Haïti et l’enlisement d’une crise dans un contexte de vaste mouvement de protestation dans le pays.

« Au moins 42 personnes sont mortes et 86 ont été blessées à la suite de l’escalade des tensions depuis le début de la dernière vague de manifestations le 15 septembre dernier, selon des informations vérifiées par notre bureau », a déclaré lors d’un point de presse à Genève, Marta Hurtado, porte-parole du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme (HCDH).

Les services de la Haut-Commissaire Michelle Bachelet soulignent que la grande majorité des victimes ont été blessées par balle. « Les rapports indiquent que les forces de sécurité sont responsables de 19 sur la quarantaine de décès, tandis que les autres ont été tués par des individus armés ou des auteurs inconnus », a ajouté Mme Hurtado.

Parmi les personnes tuées figurait au moins un journaliste. Neuf autres journalistes ont été blessés et beaucoup auraient été menacés. Dans ces conditions, le Haut-Commissariat a exhorté tous les acteurs à s’abstenir de cibler les journalistes et à respecter la liberté des médias de rendre compte de la situation.

Si l’agence onusienne s’est félicitée de l’ouverture d’enquêtes par l’Inspection générale de la Police nationale haïtienne sur les allégations de violations des droits de l’homme commises par la police, elle plaide toutefois pour une reddition des comptes.

« Nous soulignons que les enquêtes doivent être approfondies, transparentes et indépendantes, afin que les responsables des violations commises soient tenus de rendre compte de leurs actes », a insisté la porte-parole du Bureau des droits de l’homme.

Le Haut-Commissariat s’est également dit préoccupé par les conséquences de ces manifestations sur le quotidien des Haïtiens, notamment leur impact sur la capacité des populations de faire valoir leurs droits fondamentaux en matière d’éducation, de santé, d’alimentation et autres besoins. D’ailleurs dans le domaine de l’éducation, l’ONU rappelle que depuis le début de l’année scolaire en septembre, la plupart des enfants haïtiens n’ont pas pu aller à l’école.

Risque de détention provisoire prolongée avec la fermeture de tribunaux locaux

De plus, les barrages routiers et la violence ont fait que les populations, notamment dans les régions situées à l’extérieur de la capitale (Port-au-Prince), ont eu de graves difficultés à accéder à la nourriture, à l’eau potable, aux médicaments et au carburant.

Selon l’ONU, le secteur de la santé aurait été particulièrement touché, avec des pénuries d’électricité, de carburant, de fournitures et l’incapacité de nombreux membres du personnel médical à se rendre à leurs lieux de travail.

Devant une telle situation, les services de Mme Bachelet exhortent toutes les parties à éviter d’entraver le fonctionnement des hôpitaux et à faciliter l’accès aux soins de santé, ainsi que la fourniture, y compris par les voies humanitaires, de nourriture et de médicaments aux personnes détenues, aux orphelinats et aux autres groupes vulnérables tels que les personnes vivant avec un handicap.

L’autre secteur touché est celui du système judiciaire. Avec la fermeture des institutions judiciaires et autres institutions publiques dans le pays, l’ONU redoute l’impact que cela aura notamment sur les groupes vulnérables. « Par exemple, le nombre alarmant de détenus en détention provisoire prolongée a encore augmenté en raison de la fermeture de nombreux tribunaux locaux pour des raisons de sécurité », a fait valoir Mme Hurtado.

Finalement, l’ONU rappelle qu’il est crucial que tous les acteurs prennent des mesures pour soutenir et promouvoir des solutions pacifiques aux nombreux griefs qui ont conduit les Haïtiens à descendre dans la rue à plusieurs reprises au cours des 16 derniers mois. « Nous sommes prêts à appuyer les efforts visant à trouver une solution significative et inclusive à la situation actuelle et à alléger les souffrances du peuple haïtien », a conclu la porte-parole du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme.