L'actualité mondiale Un regard humain

Climat : il faut écouter les milliers de jeunes mobilisés dans le monde pour relever le défi (ONU)

En 2014, après des jours de pluies continues, des régions du nord d’Haïti ayant subi de graves inondations, faisant plus d’une douzaine de morts et des milliers de sans abri.
Photo : MINUSTAH/Logan Abassi
En 2014, après des jours de pluies continues, des régions du nord d’Haïti ayant subi de graves inondations, faisant plus d’une douzaine de morts et des milliers de sans abri.

Climat : il faut écouter les milliers de jeunes mobilisés dans le monde pour relever le défi (ONU)

Climat et environnement

A l’initiative de sa Présidente, Maria Fernanda Espinosa, l’Assemblée générale des Nations Unies a tenu jeudi, à New York, une réunion de haut niveau sur le climat et le développement durable pour tous, qui a insisté sur la nécessité d’écouter les milliers de jeunes mobilisés dans le monde pour réclamer des réponses au problème du changement climatique.

Appartenant à « la dernière génération qui peut éviter de causer des dommages irréparables à la planète », la Présidente a estimé que leurs   messages sont clairs et directs : «  il n’y a pas de planète B », « le moment de sauver la planète est arrivé ».

« Ne pas les écouter est une erreur, tout comme croire que nous disposons de beaucoup temps », a-t-elle ajouté.

Mme Espinosa a souligné l’urgence d’agir, rappelant que le dernier rapport du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC) a sonné l'alarme sur l'irréversibilité et l’ampleur de ce phénomène. Elle en a voulu pour preuve le récent cyclone Idai qui a dévasté le Mozambique, le Malawi et le Zimbabwe, causant des centaines de morts et affectant des millions de personnes.

« L’une des pires catastrophes météorologiques de l’histoire de l’Afrique », a-t-elle déploré. Ce ne sont là que des signes avant-coureurs de ce que nous devrions éviter, a-t-elle mis en garde.

La Présidente de l’Assemblée générale a donc réitéré son appel pour que 2019 soit l'année de l'action climatique à tous les niveaux et avec tous les acteurs. Car chacun à son niveau peut améliorer son empreinte carbone à travers le « choix des aliments consommés, des vêtements, des moyens de transport et les déchets générés ». « Nous avons besoin de changement systémique, » a-t-elle martelé. 

Pour Mme Espinosa, une croissance économique en harmonie avec la nature est possible à condition de modifier les modes de production et de consommation et d’éviter les gaspillages et les excès. Elle a pointé du doigt ce paradoxe de voir 1,3 milliard de tonnes de nourriture gaspillées chaque année, alors que près de 2 milliards de personnes souffrent de la faim ou de malnutrition.

De plus, a-t-elle poursuivi, l’augmentation de la production agricole doit aller de pair avec des mesures de conservation des forêts, « poumons du monde », qui absorbent chaque année l'équivalent de 2 milliards de tonnes de dioxyde de carbone.

Réunion de haut niveau sur le climat et le développement durable pour tous
Photo : ONU/Manuel Elias
Réunion de haut niveau sur le climat et le développement durable pour tous

Le rôle des villes

La bataille pour la durabilité se joue également dans les villes, où sont produites 70% des émissions mondiales de dioxyde de carbone, a poursuivi la Présidente, exhortant l’ensemble des délégations à s’engager pour que 2020 soit la dernière année d'augmentation de ces émissions causées par l'activité humaine. A cette fin, elle a plaidé en faveur de davantage de coopération et de transfert de technologie.

Sans action climatique, aucun programme de développement durable n'est possible - Maria Fernanda Espinosa

Mme Espinosa a ensuite mis en relief la profonde interdépendance entre l’Accord de Paris et le Programme de développement durable à l'horizon 2030. Mieux, ils se renforcent mutuellement, car « sans action climatique, aucun programme de développement durable n'est possible ».

Selon la Présidente, une action climatique audacieuse présente également des avantages économiques d’envergure. A lui seul, le secteur de l'énergie durable pourrait créer environ 18 millions d'emplois. Dans le même temps, elle a évalué le coût de l'inaction à 2 milliards de dollars par an et mentionné l’impact sur la santé et le bien-être des populations.

Pour Maria Fernanda Espinosa, le nombre de personnes vivant dans la pauvreté en raison des effets climatiques, estimé à 26 millions par an, pourrait être réduit. Il importe aussi de réduire le nombre des déplacés climatiques qui a atteint quelque 2 millions en 2018. Dès lors, une approche intégrée est essentielle pour faire avancer le Programme 2030 et l'Accord de Paris, a-t-elle insisté, avant de d’annoncer une série de manifestations prévue dans les mois à venir afin de « synchroniser encore plus ces engagements ».

Elle a cité les prochains forums politiques de haut niveau, sous les auspices de l'ECOSOC en juillet et de l'Assemblée générale en septembre ainsi que le Sommet sur le climat organisé par le Secrétaire général, une plateforme idéale pour renforcer l’engagement, mobiliser les ressources nécessaires pour répondre l’urgence générée par les changements climatiques.

Enfin, la Présidente a préconisé d’aborder les changements climatiques dans le cadre d’une approche intergénérationnelle.

« Le rôle des jeunes en tant qu’agents de changement est central. C'est une question de survie pour tous, sans exception. L'humanité est à la croisée des chemins et le moment est venu de décider quel chemin nous voulons emprunter », a-t-elle conclu, voyant dans le multilatéralisme et la coopération « nos meilleurs instruments ».    

Les changements climatiques nous affectent tous

Le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a prévenu pour sa part que « les changements climatiques se produisent aujourd'hui et nous affectent tous ». Il  a rappelé que chaque semaine apporte un nouvel exemple de dévastation liée au climat et qu'aucun pays n’est l’abri, tout en notant que ce sont les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables qui sont les plus touchées. 

« Mes pensées vont aux centaines de milliers de personnes affectées par le récent cyclone Idai au Mozambique, au Malawi et au Zimbabwe », a-t-il dit. De tels phénomènes sont de plus en plus fréquents, leur impact de plus en plus sévère, et la situation ne fera qu’empirer si nous n’agissons pas dès maintenant, s’est alarmé le Secrétaire général, pour qui les changements climatiques mettent en péril des décennies de progrès visant à assurer un développement durable, notamment en matière de lutte contre la pauvreté. 

Toutefois, la lutte contre les changements climatiques représente également une occasion de consolider et d’accélérer les gains réalisés afin de renforcer la santé publique et la sécurité des nations. « Nous n’avons aucune excuse pour ne pas agir », a martelé le Secrétaire général, suggérant de s’appuyer sur le Programme de développement durable à l'horizon 2030 et l’Accord de Paris sur le climat.

« Nous avons besoin d’action, d’ambition et de volonté politique », a encore dit M. Guterres, en appelant les États membres à faire en sorte que le plan de travail de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, adopté en décembre dernier à Katowice, en Pologne, puisse atteindre son « plein potentiel ». 

Selon le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), il nous reste moins de 12 ans pour éviter des perturbations climatiques irréversibles et limiter le réchauffement de la planète à 1,5 degré Celsius de plus que les niveaux préindustriels. 

Le Secrétaire général de l'ONU lors de son intervention dans le cadre de la Réunion de haut niveau sur le climat et le développement durable pour tous
Photo : ONU/Manuel Elias
Le Secrétaire général de l'ONU lors de son intervention dans le cadre de la Réunion de haut niveau sur le climat et le développement durable pour tous

 

Afin de « générer l’ambition » nécessaire, le Secrétaire général a convoqué un Sommet sur l’action climatique, qui se tiendra le 23 septembre prochain, à New York. 

« Ne venez pas avec un discours, venez plutôt avec un plan », a-t-il déclaré en s’adressant aux dirigeants du monde, afin que nous puissions nous engager « une fois pour toutes » sur une « voie durable » et améliorer les contributions prévues déterminées au niveau national. 

M. Guterres a également demandé aux États de démontrer comment on peut parvenir à une réduction des gaz à effet de serre de 45% au cours de la prochaine décennie et à des émissions globales nulles en 2050, « comme le demande la science». 

Les jeunes nous montrent la voie - le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres

Si « l’économie verte représente l’avenir », nous devons nous assurer de ne laisser personne de côté, a-t-il prévenu, citant en particulier les femmes.  À cet égard, le Sommet sur l’action climatique, qui réunira des représentants des gouvernements, du secteur privé et de la société civile, mettra l’accent sur la « transition énergétique » et l’investissement dans l’économie verte. 

Alors que de plus en plus de gouvernements et de villes comprennent que des solutions climatiques ont le potentiel de renforcer l’économie et la protection environnementale, le Secrétaire général a décelé un « élan grandissant » en faveur du changement.

Enfin, António Guterres a appelé à mettre un terme aux subventions aux énergies fossiles et à l’agriculture polluante en faveur de l’énergie renouvelable. Pour ce faire, il faut une action multilatérale regroupant l’ensemble des gouvernements du monde. « Les jeunes nous montrent la voie, et l’avenir est maintenant », a-t-il conclu.