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Federica Mogherini : « la voie européenne vers la paix et la sécurité est identique à la voie onusienne »

Federica Mogherini, haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, parlant au Conseil de sécurité.
Photo : ONU/Eskinder Debebe
Federica Mogherini, haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, parlant au Conseil de sécurité.

Federica Mogherini : « la voie européenne vers la paix et la sécurité est identique à la voie onusienne »

Paix et sécurité

Devant le Conseil de sécurité, la Haute-Représentante de l’Union européenne (UE) pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Federica Mogherini, a estimé mardi, qu’il existe une « voie européenne » vers la paix et la sécurité qui est identique à la « voie onusienne ».

 «Nous les Européens, a-t-elle indiqué, partageons les mêmes valeurs et intérêts à commencer par la défense du multilatéralisme et du système des Nations Unies. Et vous n’entendrez jamais, a-t-elle poursuivi, l’Union européenne demander si l’ONU sert nos intérêts et valeurs ».  

Federica Mogherini a souligné que la coopération et la coordination entre les États membres de l’UE au sein du Conseil de sécurité s’était énormément intensifiée, précisant que cette décision était venue directement des États membres.

La Haute-Représentante a fait observer que l’UE investit dans sa coopération avec le système de l’ONU « comme jamais auparavant », «  car nous voulons assumer notre part de responsabilité dans notre foyer commun», a-t-elle ajouté.

Nombreux conflits à résoudre

Devant le Conseil de sécurité dont les travaux sont présidés ce mois-ci par la France, Mme Mogherini s’est attardée sur la question de la résolution de plusieurs conflits. S’agissant de la Syrie, elle a fait valoir que la seule solution durable doit se fonder sur un processus dirigé par l’ONU et la mise en œuvre de la résolution 2254, à savoir une transition politique négociée vers un pays démocratique, inclusif, réconcilié et uni.

Elle a indiqué que ce mercredi 13 mars, l’UE coprésidera avec l’ONU la troisième Conférence de Bruxelles sur l’avenir de la Syrie et de la région, dans le but de mobiliser l’appui au processus politique dirigé par les Nations Unies ainsi qu’à l’aide humanitaire et aux pays de la région.

S’agissant du Yémen, elle a également fait part de l’appui de l’UE à l’Accord de Stockholm, pour ensuite indiquer qu’en Libye, l’Union coordonne son action directement avec le Quatuor libyen qui regroupe l’UE, l’ONU, la Ligue des États arabes et l’Union africaine (UA). Ensemble, a-t-elle soutenu, nous pourrons aider les acteurs libyens à se diriger vers la réconciliation, grâce à la tenue d’une conférence nationale et d’élections dès que les conditions le permettront. 

L’Afghanistan, un autre pays où la coopération UE-ONU est essentielle - Federica Mogherini, Haute-Représentante de l'Union européenne 

La Haute-Représentante a aussi parlé de l’Afghanistan, « un autre pays où la coopération UE-ONU est essentielle », indiquant suivre de près les contacts entre les Talibans et le gouvernement des États-Unis et appelant les premiers à participer à des pourparlers intra-afghans avec le gouvernement de Kaboul. De son côté l’UE peut jouer le rôle de garant du processus de paix et contribuer à le rendre plus inclusif avec la participation des femmes, des minorités et de tous les secteurs de la société civile.

Mme Mogherini s’est par ailleurs inquiétée de l’escalade dramatique des tensions au Venezuela et de la persistance de l’impasse politique, insistant sur l’importance de dégager une solution politique, pacifique et démocratique. Aucune intervention militaire, qu’elle vienne de l’intérieur ou de l’extérieur du pays, ne serait acceptable à nos yeux, a-t-elle affirmé, et solution ne saurait être imposée depuis l’extérieur.

Les Casques bleus essentiels en Afrique

Se tournant vers l’Afrique, Mme Mogherini a regretté la remise en cause du rôle des Casques bleus de l’ONU, y voyant l’outil essentiel vers l’établissement d’une paix et d’une sécurité durables. Les États Membres de l’UE, a-t-elle ajouté, contribuent un tiers du budget de maintien de la paix de l’ONU, plus que n’importe quelle autre puissance mondiale, et nous en sommes fiers.

Elle n’en a pas moins dit l’importance de trouver des solutions africaines aux défis africains, les opérations d’appui à la paix de l’UA étant à ses yeux un instrument essentiel pour la promotion de la paix et de la sécurité en Afrique. Elle a appuyé le processus de réforme financière et institutionnel engagé par l’UA, ainsi que la possibilité d’utiliser les contributions de l’ONU pour financer les opérations de l’UA autorisées par le Conseil de sécurité.

La Haute-Représentante a plus particulièrement parlé de la situation au Mali, indiquant avoir rencontrés, il y a quelques jours, les représentants des mouvements signataires de l’Accord pour la paix de 2015 et jugeant essentiel de garantir la présence de l’ONU tout au long des processus engagés dans le pays.

Il en va de même pour la Somalie, a-t-elle ajouté, où la « transition des responsabilités » doit se faire progressivement. D’ailleurs, à l’échelle du continent, l’UE s’est départie du l’ancien modèle « donateur-récipiendaire » pour privilégier un partenariat à pied d’égalité et depuis un an l’UE travaille dans un format trilatéral avec l’UA et l’ONU dans le but de trouver une solution à la situation dramatique des migrants africains qui se trouvent dans des centres de détention en Libye. Grâce à cette coopération, s’est-elle félicitée, plus 30.000 personnes sont volontairement rentrés chez eux ou ont pu obtenir une protection internationale. C’est là sans doute notre contribution la plus novatrice à un multilatéralisme plus effectif.

Kosovo, Ukraine, Russie

Mme Mogherini a aussi parlé des contributions de l’UE à la réconciliation dans les Balkans, précisant que dès que les taxes imposées par le gouvernement de Kosovo seront abolies, elle convoquera « immédiatement » une nouvelle réunion du Dialogue dans le but de déboucher sur la normalisation des relations entre Pristina et Belgrade. Elle a également souligné que tout accord final devra obtenir l’appui du Conseil de sécurité, ajoutant que l’UE est prête à intensifier ses échanges avec les membres dudit Conseil à cette fin. Et après l’Accord de Prespa, « un autre exemple positif de la coopération UE-ONU », une issue positive du dialogue insufflerait encore plus d’espoir à l’ensemble de la région et à l’Europe.

La Haute-Représentante s’est par ailleurs dit inquiète sur la situation en Ukraine. Elle a confié que la Russie est un interlocuteur important pour l’UE ; pour des dossiers allant « de l’Iran à l’Arctique », mais a avoué être profondément préoccupée par « certains comportements », citant, outre l’Ukraine, l'attaque de Salisbury, l’espionnage contre l’Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) et le respect du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire.

La diplomate européenne s’est inquiétée du fait que l’architecture mondiale du désarmement et de la non-prolifération est remise en cause « comme jamais auparavant », avertissant que face à la fragmentation des centres de pouvoir, la dissuasion ne suffit plus pour prévenir les guerres. Notre sécurité collective exige une architecture multilatérale solide de non-prolifération et de désarmement, a-t-elle insisté.

Iran et Moyen-Orient

Dans le même ordre d’idée, la Haute-Représentante a souligné que l’UE continuera d’œuvrer au maintien de l’accord nucléaire avec l’Iran, rappelant que la mise en œuvre des engagements de l’Iran avait été confirmée à 14 reprises par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), la dernière fois il y a à peine 15 jours. Elle a aussi insisté sur l’importance de lever les sanctions liées au nucléaire.

 L’UE compte donc de continuer d’œuvrer au maintien des dividendes économiques de la levée des sanctions. C’est là, a-t-elle insisté, une contribution à notre sécurité collective et la manière de prévenir la prolifération nucléaire dans une région extrêmement tendue.

« Nous sommes préoccupés par le comportement de l’Iran sur d’autres dossiers, à commencer les missiles balistiques, les droits de l’homme et les dynamiques régionales, mais sans accord nucléaire, tout dialogue avec l’Iran sera plus difficile. Démanteler un accord qui fonctionne ne sera jamais un bon point de départ pour faire avancer nos intérêts de sécurité collective », a-t-elle souligné.

Mme Mogherini a ensuite rappelé que l’UE a imposé de sanctions sévères à la République populaire démocratique de Corée et maintien ses canaux ouverts pour encourager le dialogue à tous les niveaux.

« Notre approche a toujours été de bâtir, et jamais de démanteler », a-t-elle lancé. Reconnaissant que le système multilatéral actuel n’est pas parfait, elle a apporté son plein appui au processus de réforme lancé par M. António Guterres. Nous devons, a-t-elle insisté, élargir et améliorer le système de gouvernance mondiale et non pas l’affaiblir ou le démolir.

Mme Mogherini a par ailleurs indiqué que lors de la crise financière subie par l’UNRWA, l’Office de secours de l’ONU aux réfugiés palestiniens, l’UE et ses membres se sont mobilisés pour éviter la cessation abrupte de ses activités. Nous ne pouvons pas nous permettre de voir l’Office s’effondrer, a-t-elle souligné, avertissant du chaos qui s’en suivrait. L’Office, a-t-elle insisté, est essentiel pour la vie de millions de personnes ainsi que prou préserver la viabilité de la solution des deux États.