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Les êtres humains sont en train de causer la sixième extinction de masse, selon un expert de l'ONU

Un garçon attendant son bus à Ulaanbaatar, en Mongolie, où la pollution de l'air est à un niveau dangereusement élevé.
Photo UNICEF/Mungunkhishig Batbaatar
Un garçon attendant son bus à Ulaanbaatar, en Mongolie, où la pollution de l'air est à un niveau dangereusement élevé.

Les êtres humains sont en train de causer la sixième extinction de masse, selon un expert de l'ONU

Droits de l'homme

Un expert indépendant de l’ONU a mis en garde, ce lundi à Genève, sur « les conséquences majeures » du changement climatique et du déclin de la biodiversité, sur la jouissance des droits de l’homme dans le monde. 

« Nous vivons sur la seule planète où la vie est possible selon nos connaissances d’aujourd’hui. Les êtres humains sont pourtant en train de causer la sixième extinction de masse », a déclaré, devant le Conseil des droits de l’homme, le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’environnement, David R. Boyd.

Une situation d’autant plus préoccupante que depuis la révolution industrielle, les niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère ont atteint plus de 400 parties par million, « le niveau le plus élevé depuis 650.000 ans ». « Ce qui provoque un changement climatique dangereux et imprévisible », a fait valoir le Rapporteur spécial. « Les taux d’extinction sont des centaines de fois supérieurs à la normale, ce qui indique que les humains sont à l’origine de la sixième extinction de masse sur 3,8 milliards d’années de la vie sur cette planète », a-t-il ajouté.

Dans ces conditions, les conséquences sont sans appel avec près de « 90% de la population mondiale exposée à la pollution atmosphérique ». En outre, la pollution de l’air cause sept millions de décès prématurés dans le monde par an, dont 600.000 enfants âgés de cinq ans ou moins.

« C’est davantage de décès que ceux causés par la guerre, les meurtres, la tuberculose, le VIH/sida et la malaria réunis », a insisté M. Boyd. Une vie humaine s’achève prématurément toutes les 5 secondes, soit 800 décès par heure, à cause de son exposition à la pollution atmosphérique.

Dans des villes comme Beijing, en Chine, la pollution de l'air est un problème sanitaire majeur.
Photo OMM/Alfred Lee
Dans des villes comme Beijing, en Chine, la pollution de l'air est un problème sanitaire majeur.

Impact de la pollution de l’air sur la santé humaine

Cette pollution cause notamment des maladies respiratoires, de l’asthme, des cancers du poumon, des problèmes à la naissance, ou des troubles neurologiques. Or les risques liés à la pollution atmosphérique ne sont pas répartis de manière équitable. Les personnes vulnérables telles que les enfants, les communautés autochtones, les personnes âgées ou les femmes,  souffrent de niveaux d’exposition plus élevés. Et la plupart des décès sont recensés dans les pays à revenus faibles ou modérés.

Selon l’expert indépendant onusien, il ne fait aucun doute que la mauvaise qualité de l’air est une violation de nombreux droits fondamentaux. « Il ne peut y avoir de doute que tous les êtres humains ont le droit à un air pur », a fait valoir le Rapporteur spécial qui a aussi pointé du doigt une lacune dans le système des droits de l’homme. « L’ONU doit reconnaître le droit à un environnement sûr, propre, sain et durable et les États ont des obligations de protéger la jouissance des droits de l’homme contre les dégâts environnementaux », fait-il remarquer.

A cet égard, il a décliné sept mesures clés pour que les États puissent remplir leurs obligations pour ce qui est des droits de l’homme et d’un environnement sain. Ils doivent ainsi surveiller la qualité de l’air ; identifier les sources de la pollution atmosphérique ; informer le public et l’inclure dans le processus décisionnel ; promulguer des lois ou des normes pour déterminer des limites claires dans le domaine de la pollution ; élaborer des plans d’action dans ce domaine ; appliquer ces plans en y accordant des ressources suffisantes ; et évaluer les progrès dans ce domaine.

« Les États ont l’obligation légale de garantir un environnement sain »

Le rapport contient aussi une série de bonnes pratiques, a poursuivi le Rapporteur spécial ; la limitation de l’essence avec plomb ou la réduction du contenu en souffre dans les combustibles en sont des exemples. Des politiques bien conçues peuvent réduire les émissions de gaz et ainsi améliorer la qualité de l’air et lutter contre les changements climatiques, a ajouté M. Boyd. « La pollution de l’air est un problème évitable. Les solutions - lois, normes, politiques, programmes et technologies - sont connues. La mise en œuvre de ces solutions nécessitera des investissements importants, mais les avantages d’assurer un air pur pour toute l’humanité sont incalculables », a-t-il déclaré.

Des investissements annuels de 4,7 milliards de dollars pourraient ainsi permettre un accès universel à une cuisine propre d’ici 2030. Cet investissement relativement modeste produirait d’énormes résultats, avec des millions de décès prématurés évités chaque année, une amélioration de la santé, une amélioration de la qualité de la vie, un élargissement des perspectives économiques, une réduction de la déforestation et une réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Le Rapporteur spécial a plaidé pour l’adoption d’une résolution par le Conseil des droits de l’homme, pour que toute personne ait le droit de vivre dans un environnement propre, sûr, sain et durable. Bien que l’ONU n’ait pas encore expressément reconnu le droit à un environnement sain, de nombreux États membres l’ont fait.

Au moins 130 États ont ratifié des traités régionaux relatifs aux droits de l’homme qui incluent explicitement le droit à un environnement sain - traités couvrant l’Afrique, l’Amérique latine et les Caraïbes, le Moyen-Orient, certaines parties de l’Asie et de l’Europe. Le droit à un environnement sain jouit d’un statut constitutionnel dans plus de 100 pays. Selon l’expert indépendant de l’ONU, plus de 100 États incluent ce droit dans leur législation environnementale. Au total, plus de 150 États ont déjà reconnu légalement le droit à un environnement sain.