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Italie : le Comité des droits de l’enfant préoccupé par la notion de dangerosité sociale d’une loi sur les migrants

Des réfugiés et migrants, dont de nombreux enfants, secourus en mer par des garde-côtes italiens arrivent à Port Augusta (archive)
Photo : HCR/F. Malavolta
Des réfugiés et migrants, dont de nombreux enfants, secourus en mer par des garde-côtes italiens arrivent à Port Augusta (archive)

Italie : le Comité des droits de l’enfant préoccupé par la notion de dangerosité sociale d’une loi sur les migrants

Droits de l'homme

Le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies s’est dit préoccupé par l’entrée en vigueur en Italie de la loi n°132 de décembre 2018, un texte contenant des « dispositions urgentes en matière de protection humanitaire et d’immigration ainsi que sur la sécurité publique ».

« Cette loi n° 132-2018 contient des mesures visant à suspendre la procédure d’asile pour les personnes, y compris les enfants, considérées comme ‘socialement dangereuses’ ou reconnues coupables d’un crime », fait valoir le rapport final du Comité.

Le texte contient également des dispositions « sur la protection humanitaire en faveur d’un système de permis spécial dans des circonstances strictement définies et l’augmentation de 90 à 180 jours des périodes de rétention pour immigrés, et réduit le système d’accueil et d’intégration aux réfugiés et personnes vulnérables reconnus, y compris les enfants non accompagnés ».

« Les autres difficultés de l’Italie, c’est tout ce qui est lié à la question migratoire. Les migrants, les demandeurs d’asile font face à de réels problèmes », a ainsi déclaré Hynd Ayoubi Idrissi, experte indépendante du Comité lors d’un point de presse jeudi à Genève.

« Ce qui a préoccupé davantage le Comité, c’est la nouvelle loi, la fameuse loi 132-2018 qui concerne la question de la protection internationale, la migration et surtout la sécurité publique et qui a introduit une notion assez dangereuse, assez large qu’on peut interpréter même arbitrairement, c’est la notion de dangerosité sociale », a-t-elle ajouté.

Selon cette experte indépendante onusienne, « la notion de dangerosité sociale permettra d’arrêter le processus de demande d’asile et même le processus de protection internationale s’il s’agit d’une personne considérée « comme socialement dangereuse ».

L’Italie a créé une unité spéciale pour la protection des mineurs étrangers non accompagnées

Mme Idrissi a ensuite rappelé la genèse d’un texte que s’était pourtant doté Rome en 2017. « C’est la loi 47-2017 qui est une très bonne loi, dans le respect des standards internationaux en matière de gestion de la question migratoire, notamment en ce qui concerne les enfants ». Mais l’experte regrette que cette loi n’ait pas été mise en œuvre car « les décrets d’application ne sont pas encore pris et ils vont prendre du retard avec l’arrivée du nouveau gouvernement italien d’après ce que nous avons compris ».

Dans ses observations et recommandations finales, le Comité invite instamment l’État partie à traiter les affaires impliquant des enfants non accompagnés et séparés de manière positive, humaine et rapide afin de trouver des solutions durables. Il demande aussi à Rome de renforcer les mesures visant à réduire l’apatridie des enfants de migrants et faciliter l’accès aux procédures de réunification familiale des enfants de migrants avec leurs familles. « L’Italie doit aussi envisager de signer le Pacte mondial des Nations Unies pour des migrations sûres, ordonnées et régulières », conclut le document du Comité des droits de l’enfant.

A noter que lors de la présentation du rapport le 22 janvier dernier, Manlio Di Stefano, Sous-Secrétaire d’État italien aux affaires étrangères avait indiqué que Rome avait fait de la protection des mineurs victimes de traite sa priorité. Mais M. Di Stefano, avait aussi rappelé que son gouvernement était confronté à la gestion de flux migratoires importants d’adultes et de mineurs accompagnés et non accompagnés.

L’Italie a développé une approche stratégique à différents niveaux dans ce domaine. Une unité spéciale pour la protection des mineurs étrangers non accompagnées a ainsi été créée. Le parlement a quant à lui adopté en 2017 une loi qui crée un nouveau cadre règlementaire pour l’assistance aux mineurs étrangers accompagnés ou non accompagnés, appliquant ainsi des principes essentiels repris des dispositions de la Convention, comme l’accès à l’information ou le rapprochement familial, a poursuivi M. Di Stefano. La nouvelle législation prévoit en outre la prise en charge des mineurs par la mise en œuvre d’un système de tuteurs volontaires. Il n’y aucune forme de rapatriement forcé pour les mineurs étrangers, avait assuré le représentant italien.