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ISTANBUL : Une représentante des communautés déplacées par Boko Haram appelle à financer davantage les ONG locales

Aishatu Margima, 59 ans, une infirmière à la retraite de l’Etat d’Adamawa, au nord-est du Nigéria, qui a abrité chez elle une cinquantaine de personnes ayant fui Boko Haram, en entretien avec le Centre d'actualités de l'ONU. Photo : Ibraheem Alawadi
Aishatu Margima, 59 ans, une infirmière à la retraite de l’Etat d’Adamawa, au nord-est du Nigéria, qui a abrité chez elle une cinquantaine de personnes ayant fui Boko Haram, en entretien avec le Centre d'actualités de l'ONU. Photo : Ibraheem Alawadi

ISTANBUL : Une représentante des communautés déplacées par Boko Haram appelle à financer davantage les ONG locales

« Quand les personnes déplacées sont arrivées, elles étaient si nombreuses ! », s'est souvenue Aishatu Margima, 59 ans, une infirmière à la retraite de l'Etat d'Adamawa, dans le nord-est du Nigéria.

En pleine insurrection de Boko Haram dans la région, Mme Margima a vu arriver un jour chez elle, dans la ville de Yola, une cinquantaine de personnes déplacées, en majorité des femmes et des enfants ayant fui les atrocités commises par le groupe extrémiste.

« Ils ont frappé à ma porte. Ils étaient en si mauvais état que je ne pouvais pas les renvoyer. Parce que cela peut arriver à n'importe qui », a déclaré Mme Margima dans un entretien avec le Centre d'actualités de l'ONU, au second jour du Sommet humanitaire mondial, à Istanbul.

Ces dizaines de personnes déplacées sont ensuite restées chez Mme Margima pendant sept mois.

« Ça a été dur », a-t-elle confié. « Mais avec mes maigres ressources et le soutien de mes voisins, nous y sommes arrivés ».

Les personnes déplacées dormaient et mangeaient tous les jours chez Mme Margima, qui leur achetait des vêtements et des médicaments, lorsque ces derniers n'étaient pas disponibles dans le centre de santé le plus proche.

« Ils étaient si nombreux que certains dormaient dans le bureau », a-t-elle dit.

Au cours de cette période, les personnes déplacées lui ont raconté les atrocités qu'elles avaient subies.

« Il y avait une femme ; Boko Haram a abattu son mari devant ses yeux », s'est souvenue Mme Margima, ajoutant que les membres du groupe extrémiste ont également tenté d'abattre ses deux enfants, mais que ces derniers ont survécu.

« Une autre femme ; deux de ses enfants sont tombés malades pendant leur fuite et sont morts en chemin », a-t-elle encore dit, ajoutant que cette femme avait été contrainte de laisser leurs corps dans la forêt, par peur d'être abattue par Boko Haram.

« Dans beaucoup de villages du nord-est du Nigéria, Boko Haram a laissé des corps innombrables en plein air, sans sépulture », a souligné Mme Margima.

Après sept mois, les personnes déplacées sont retournées dans leur communauté ou sont allées s'abriter ailleurs, en lieu sûr.

« Pour la plupart d'entre eux, je sais où ils sont, car ils m'appellent par téléphone tout le temps pour me remercier », a-t-elle dit.

De manière générale, si beaucoup de personnes s'étaient réfugiées dans des camps pour déplacés dans le nord-est du Nigéria, il y en avait encore plus au sein des communautés d'accueil, a-t-elle expliqué.

Selon l'organisation humanitaire Oxfam, 92% des deux millions de personnes déplacées par les violences au Nigéria ont trouvé refuge dans des communautés d'accueil comme celle de Mme Margima, à Yola.

Mme Margima s'est rendue au Sommet d'Istanbul à l'invitation d'Oxfam, avec laquelle elle travaille régulièrement au Nigéria, notamment sur des projets de promotion de l'égalité entre les sexes et de lutte contre les violences sexuelles à l'encontre des femmes et personnes déplacées dans la région.

De cet évènement, elle espère qu'il permettra d'apporter davantage de soutien et de ressources aux personnes déplacées par Boko Haram, afin qu'elles puissent soutenir leurs familles.

« Il y a un besoin très important de reconstruire les infrastructures détruites, y compris des hôpitaux, des écoles et des abris », a-t-elle ajouté.

Elle a également appelé la communauté humanitaire à fournir davantage de soutien aux ONG locales qui ont la capacité de fournir une assistance de première main aux déplacés, pas seulement dans les camps, mais aussi dans les communautés d'accueil.

Enfin, elle espère qu'à terme, ce grand rendez-vous humanitaire puisse contribuer à mettre fin aux atrocités de Boko Haram.