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La Mission de maintien de la paix au Soudan du Sud espère des renforts sous 48 heures

La Représentante spéciale du Secrétaire général pour le Soudan du Sud, Hilde Johnson (à l'écran), donne une conférence de presse depuis Juba.
ONU/Paulo Filgueiras
La Représentante spéciale du Secrétaire général pour le Soudan du Sud, Hilde Johnson (à l'écran), donne une conférence de presse depuis Juba.

La Mission de maintien de la paix au Soudan du Sud espère des renforts sous 48 heures

La Mission des Nations Unies au Soudan du Sud espère obtenir des renforts de maintien de la paix sous 48 heures, notamment des troupes et des hélicoptères, afin de protéger les civils piégés par un conflit qui aurait déjà fait un millier morts, a déclaré jeudi la numéro 1 de l'ONU dans le pays.

« Nous avons désespérément besoin d'améliorer nos capacité pour être en mesure de nous acquitter de notre mandat [de protection des civils] de manière beaucoup plus proactive », a déclaré la Représentante spéciale du Secrétaire général pour ce pays, Hilde Johnson, lors d'une conférence de presse donnée en duplex depuis Juba, la capitale du Soudan du Sud. Rappelant que plus de 50.000 civils avaient déjà trouvé refuge dans les différentes bases des Nations Unies, elle a souligné la nécessité de faire preuve d'une vitesse « sans précédent » pour obtenir les troupes et moyens nécessaires.

« Mais je tiens à le souligner : tous les Casques bleus ont pour ordre de recourir à la force lorsque des civils sont sous une menace imminente. »

Mardi, le Conseil de sécurité a suivi les recommandations du Secrétaire général en autorisant le déploiement temporaire de renforts au sein de la MINUSS – 5.500 soldats et 440 policiers de plus –, ainsi que l'envoi d'actifs critiques, comme des hélicoptères de combat, pour aider la Mission, qui compte actuellement un effectif d'environ 7.000 personnels, à s'acquitter de son mandat.

Ces troupes supplémentaires seraient transférées au besoin depuis les opérations de maintien de la paix actuellement déployées en République démocratique du Congo (RDC), dans la région soudanaise du Darfour, à Abyei, en Côte d'Ivoire et au Libéria.

Les tensions au Soudan du Sud, la plus jeune nation du monde, ont dégénéré en un conflit ouvert le 15 décembre dernier après les accusations lancées par le gouvernement du Président Salva Kiir, contre son rival, l'ancien Vice-Président Riek Machar, limogé en juillet, et auquel est attribuée une tentative présumée de coup d'état. M. Kiir appartient à l'ethnie Dinka et M. Machar à celle des Lou Nuer.

« Nous travaillons sans relâche pour obtenir le plus vite que possible ces actifs […]. Nous tablons sur une fenêtre de 48 heures pour obtenir plusieurs des actifs essentiels dont nous avons besoin », a déclaré Mme Johnson aux journalistes à New York.

« Nous sommes soutenus, à New York et dans d'autres missions, par des collègues qui comprennent que l'ampleur des défis qui se posent au Soudan du Sud exige d'agir à une vitesse sans précédent. »

La MINUSS, a-t-elle dit, enquête par ailleurs sur les allégations faisant état d'exécutions extrajudiciaires, de détentions arbitraires, de mauvais traitements, d'abus et de viols en réunion, dans un souci de lutter contre l'impunité et de faire traduire les auteurs de ces actes en justice. « Nous espérons que cela sera suivi d'actions » a-t-elle ajouté, se félicitant de l'ordre donné, il y a deux jours, par M. Kiir, de faire arrêter tout individu suspecté d'être impliqué dans de telles atrocités.

Mme Johnson a toutefois noté que la MINUSS n'avait pas été en mesure de vérifier les informations selon lesquelles un charnier de 75 corps aurait été découvert à Bentiu, dans le nord du pays, à la suite d'un massacre, mais qu'en tout état de cause, ce chiffre, compris initialement entre 30 et 50 victimes, avait été exagéré.

« J'appelle les dirigeants politiques du Soudan du Sud à ordonner à leurs partisans de déposer les armes et à donner une chance à la paix, et de le faire de toute urgence », a-t-elle lancé, rappelant les décennies de lutte violente qui avaient précédé l'accession du Soudan du Sud à l'indépendance et soulignant que la diversité ethnique de ce pays était une source de force et d'unité, pas de divisions.

« Ces 11 derniers jours ont été une période très difficile pour le Soudan du Sud et tous les citoyens de cette jeune nation », a poursuivi la Représentante spéciale. « Ce qui s'est passé la semaine dernière a pour beaucoup d'entre eux éveillé les cauchemars du passé. L'avenir de cette nation, née dans la douleur après des décennies de conflit et de violences, est en jeu. Et pour nous, l'une des choses les plus importantes, c'est de voir ces cauchemars prendre fin. »

En dépit des défis, a dit Mme Johnson, « la MINUSS maintient et renforce sa présence à travers tout le pays », déployant ses troupes dans les zones les plus dangereuses.

« A ce moment précis, les Casques bleus sont débordés par leur obligation de protéger les civils réfugiés dans nos camps et d'assurer leur sécurité », a-t-elle noté. « Nous patrouillons maintenant jour et nuit dans les quartiers de Juba pour tenter de créer un environnement plus sûr qui encourage les habitants à rentrer chez eux. »

Mme Johnson a également indiqué que des combats font rage aussi à Bor, la capitale de l'Etat de Jonglei, au nord de Juba, où les forces gouvernementales contrôlent l'aéroport et les intersections clés. Elle a précisé que la MINUSS appuyait pleinement les efforts du Président du Kenya, Uhuru Kenyatta, et du Premier Ministre de l'Éthiopie, Hailemariam Desalegn, qui s'est rendu aujourd'hui à Juba dans le but de négocier la paix.

Parallèlement, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a prévenu que les enfants sud-soudanais étaient en grave danger. « On estime que 81.000 civils ont fui leurs foyers, dont une majorité de femmes et d'enfants, mais nous pensons qu'au vu de la vitesse à laquelle évolue la situation, les chiffres réels sont probablement plus élevés », a indiqué le représentant de l'UNICEF au Soudan du Sud, Iyorlumun Uhaa.

Ce dernier s'est tout particulièrement alarmé du sort des enfants de Bor et des environs. « Les vivres et l'eau salubre commencent à manquer de manière désespérante dans la base la MINUSS sur place et l'absence de systèmes d'assainissement présente un risque élevé de propagation des maladies », a-t-il expliqué. « Les enfants, toujours parmi les plus vulnérables dans les conflits, passent leurs journées sans abri sous une chaleur étouffante et dorment à la belle étoile pendant des nuits très froides. »