Chypre : l'ONU juge nécessaire d'améliorer l'atmosphère des négociations

Après avoir rappelé que « les négociations ont débuté après l'accord de 2008 entre les dirigeants chypriotes grec et turc », Ban Ki-moon a indiqué que la phase actuelle des pourparlers avait démarré le 26 mai dernier, après une décision conjointe des deux dirigeants de se concentrer sur le chapitre relatif aux biens fonciers.
« La question des biens est sans doute la question la plus complexe », a-t-il estimé, saluant « les efforts faits par les deux parties pour la traiter avec sérieux ». Il a toutefois regretté « une absence de progrès inquiétante », en dépit du fait que « cette question cruciale soit examinée depuis près de six mois ».
Le chef de l'ONU a mis en avant « les divergences fondamentales entre les deux parties ». « Les Chypriotes grecs affirment que ceux qui disposent de biens dans le nord devraient pouvoir choisir entre l'échange, l'indemnisation ou la réinstallation, ce qui est inacceptable pour les Chypriotes turcs, qui soutiennent que les Chypriotes grecs possèdent entre 70 et 80 % des biens dans le nord et demandent donc un plafonnement du nombre de Chypriotes grecs pouvant obtenir la restitution de leurs biens, ce qui inacceptable pour les Chypriotes grecs ».
« Ces deux positions sont actuellement inconciliables », a souligné Ban Ki-moon, estimant qu'il était essentiel de « réaffirmer clairement que, pour négocier avec succès une fédération bizonale et bicommunautaire, les deux dirigeants devront se mettre d'accord sur ces questions ».
Il a précisé qu'il avait transmis ce message aux dirigeants lors de leur venue à New York, au siège de l'ONU, le 18 novembre, ajoutant qu'ils les rencontreraient à nouveau en janvier prochain et attendait « un plan concret permettant de régler les principaux points de désaccord restants ».
Dans son rapport, le Secrétaire général a également insisté sur la nécessité « d'améliorer l'atmosphère générale dans laquelle se déroulent les négociations ». Il demande donc « instamment aux deux dirigeants d'examiner les interactions avec la presse et de centrer leurs messages sur les convergences et la voie à suivre ».
« J'encourage les dirigeants à intervenir à titre individuel et conjointement afin de transmettre des messages plus constructifs et mieux harmonisés ; cela relève de leur responsabilité », a-t-il ajouté, défendant cette démarche qui « renforcerait la confiance du public et son appui au processus de paix ».
Insistant également sur le rôle des partis politiques, il a demandé « aux parlementaires et aux acteurs politiques de manifester leur soutien au processus de négociation, de manière plus suivie, en donnant aux deux dirigeants une marge de manuvre suffisante pour négocier ».
Enfin, selon lui, une participation « plus active » de la société civile est indispensable. « Maintenant plus que jamais, alors que le soutien de la population faiblit, la société civile peut jouer un rôle important en apportant son appui aux dirigeants et au processus », a-t-il insisté.
Parallèlement à la mission de bons offices menée le Secrétaire général à Chypre, l'ONU poursuit aussi ses efforts sur le terrain, avec sa Force chargée du maintien de la paix.
Dans un rapport faisant le point sur les activités de cette force onusienne ces six derniers mois, le Secrétaire général s'est félicité que la situation soit restée « stable dans la zone tampon qui sépare les parties nord et sud de l'île ».
« Le nombre total des violations militaires commises par les forces opposées a diminué, il est tombé à son niveau le plus bas depuis quelques années », a-t-il noté, avant de saluer l'ouverture d'un septième point de passage au nord-ouest de l'île, à Limnitis/Yeþilirmark, en octobre dernier.
« C'est un événement majeur qui est l'aboutissement d'efforts accomplis par les deux parties depuis deux ans », a-t-il rappelé. Il a également indiqué que « le 1er novembre, les dirigeants ont convenus de créer un comité mixte pour faciliter l'ouverture d'autres points de passage ».
Le Secrétaire général a en revanche déploré que « l'évacuation ou la fermeture des postes d'observation dans les zones où les troupes en présence sont particulièrement rapprochées » ne se soit pas concrétisée. Il a demandé en particulier « des mesures concrètes de la part des forces turques/chypriotes turques » dans ce domaine.
Regrettable également pour le chef de l'ONU, « les restrictions imposées aux déplacements du personnel civil chypriote grec de l'ONU dans la partie chypriote turque de l'île » « La liberté de se déplacer du personnel de l'ONU est une question de principe et une nécessité opérationnelle, je demande aux autorités chypriotes turques de respecter cette liberté », a-t-il insisté.
Dans ses recommandations, il a également encouragé la force onusienne « à faciliter un éventail de plus en plus large d'activités civiles, pour contribuer à rétablir des conditions de vie normales ». « Cette action est importante s'agissant de renforcer la confiance et d'instaurer des relations positives entre les communautés, je continue de penser que la création de liens et de contacts économiques, sociaux, culturels, sportifs et autres favorisera les négociations en cours », a-t-il ajouté.
Pour conclure, le Secrétaire général est revenu sur les activités humanitaires du Comité des personnes disparues, indiquant qu'en novembre 2010, les dépouilles de près de 700 personnes avaient été exhumées de part et d'autre de la zone tampon. Il a cependant déploré que le Comité n'ait pu procéder qu'à un nombre limité d'exhumations dans les zones militaires au nord. Ban Ki-moon a donc « exhorté les forces turques à adopter une approche plus ouverte, étant donné la dimension humanitaire de la question » et le caractère « crucial » de ces exhumations pour le processus de paix.