ONU-Habitat : la population des villes africaines va tripler d'ici à 2050

Ce rapport intitulé « L'état des villes d'Afrique en 2010 : la gouvernance, les inégalités et le marché des terres urbaines » a été rendu public à l'occasion de la 3ème Conférence ministérielle africaine sur le logement et le développement urbain (AMCHUD) qui se déroule à Bamako, au Mali.
« L'urbanisation est là pour rester et d'ici quelques décennies, l'Afrique sera à prédominance urbaine. Déjà, d'énorme corridors urbains traversant l'Afrique sont les moteurs de la croissance économique », a déclaré le Directeur exécutif de l'agence onusienne chargée des établissements humains et des politiques de développement urbain, Joan Clos, lors de la publication du rapport.
« La question est maintenant pour les gouvernements, les autorités locales et tous les autres parties prenantes de savoir comment unir leurs efforts pour assurer la gestion efficace des agglomérations urbaines », a-t-il ajouté, estimant que « des politiques urbaines intelligentes pouvaient contribuer à la diffusion des avantages de l'urbanisation et sortir le continent de la pauvreté ».
Le rapport de l'ONU-Habitat montre que sur l'ensemble de l'Afrique, 24 millions d'habitants vivant dans des bidonvilles ont vu leurs conditions de vie s'améliorer au cours de la dernière décennie. Il met toutefois en exergue une différence entre les villes d'Afrique du Nord, où la part des habitants vivant dans des bidonvilles est passée de 20% à 13%, et celles d'Afrique sub-saharienne, où la diminution n'est que de 5%.
L'agence onusienne met aussi en garde les pays d'Afrique, qui « souffriront de manière disproportionnée des effets négatifs du changement climatique, des événements météorologiques extrêmes, bien que le continent contribue pour moins de 5% aux émissions mondiales de gaz à effet de serre ».
A l'appui de cette mise en garde, le rapport cite les récentes pluies diluviennes qui se sont abattues sur le Burkina Faso, faisant 150.000 sans-abri, tandis que d'autres parties du continent étaient confrontés à des sécheresses prolongées et des pénuries alimentaires, qui poussent toujours plus de ruraux à rejoindre des villes, augmentant encore la pression urbaine.
« Les responsables politiques doivent prendre en compte une telle fluidité lors de la planification urbaine, pour répondre aux besoins de logement des pauvres », a insisté Joan Clos.
Selon les chiffres de l'ONU-Habitat, alors que près de 1 milliard de personnes vivent dans des établissements informels, irréguliers et non planifiés dans les villes des pays en développement, c'est en Afrique sub-saharienne que la situation est particulièrement inquiétante, avec deux tiers des 304 millions de citadins vivant dans des taudis.
« En termes de pourcentage, il s'agit d'un record mondial », a regretté Daniel Biau, le Directeur de la division de la coopération technique régionale au sein de l'ONU-Habitat, qui a participé à la rédaction du rapport. Selon lui, il y a trois causes sous-jacentes à ce phénomène : l'urbanisation rapide, le manque d'opportunités d'emplois décents et les lacunes dans la planification et la gestion urbaines.
Pour corriger la situation et faire de l'urbanisation en Afrique une réussite, il a estimé qu'il y avait « quatre priorités fondamentales ».
Premièrement, le développement des infrastructures, « le pilier du développement économique comme le confirme l'expérience des pays asiatiques comme la Chine, la Corée, l'Indonésie, la Malaisie ou la Thaïlande ». Deuxièmement, le développement des services de base comme les soins de santé, l'éducation primaire, l'accès à l'eau potable, l'assainissement, les transports publics et la sécurité, qui sont « des domaines dans lesquels les gouvernements africains doivent redoubler d'efforts ».
Troisième élément clé, « la définition de stratégies réalistes en milieu urbain », alors qu'à l'heure actuelle « la plupart des villes africaines ne disposent pas de plans de développement urbain ». Enfin, quatrième élément, l'assistance aux plus pauvres pour qu'ils améliorent leurs conditions de logements, en facilitant l'accès aux terrains et au financement nécessaire pour la construction de logements décents.