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Haïti : l'ONU s'alarme de la paralysie engendrée par les manifestations

Haïti : l'ONU s'alarme de la paralysie engendrée par les manifestations

Un bébé et d'autres patients souffrant de diarrhées sont allongés sur le sol d'un hôpital dans le département d'Artibonite, en Haïti.
“Chaque seconde qui passe peut sauver ou briser des milliers de vies”. C'est le cri d'alarme qu'a lancé jeudi soir le Représentant Spécial du Secrétaire général des Nations Unies en Haïti, Edmond Mulet, quatre jours après le début des manifestations qui continuent de paralyser certaines villes du nord du pays.

Les auteurs de ces actes “criminels et irresponsables” empêchent l'acheminement de l'assistance médicale et sanitaire aux milliers de patients récemment frappés par l'épidémie du choléra, les condamnant ainsi à une mort certaine, a ajouté M. Mulet.

“Si cette situation perdure, de plus en plus de patients dans l'attente désespérée de soins risquent de mourir ; de plus en plus d'Haïtiens dans l'attente désespérée d'accès à des soins préventifs risquent d'être rattrapés par l'épidémie”, a encore dit le Représentant spécial.

Malgré les appels pressants de la communauté humanitaire, des routes, des aéroports et des ponts sont toujours bloqués, des barricades sont toujours érigées dans la région de Cap Haïtien, une des régions les plus affectées par la propagation du choléra.

M. Mulet a appelé à la conscience de ceux qui commettent ces actes et les a exhorté à faire preuve de compassion envers ceux de leurs compatriotes dont la vie tient à un fil.

Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), l'épidémie de choléra a fait pour l'instant plus de 1.100 morts. Plus de 18.000 personnes infectées par le choléra ont été hospitalisées.

Trois agences des Nations Unies, l’OMS, le Programme alimentaire mondiale (PAM) et le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) ont aussi appelé à la fin des manifestations violentes qui ont débuté le 15 novembre dans le Nord d’Haïti car cette violence compromet la réponse face à l’épidémie de choléra.

Dans un contexte où les besoins de la population haïtienne sont accentués par l’accumulation de crises - le séisme du 12 janvier, l’ouragan Tomas et l’épidémie de choléra, ces trois agences souhaitent pouvoir reprendre leurs opérations à plein régime le plus vite possible.

Pour la Représentante de l’OMS en Haïti, le Dr. Lea Guido, « le nombre de décès dus au choléra ne cesse d’augmenter et la situation sécuritaire empêche les approvisionnements d’arriver à ceux qui ont le plus besoin comme les enfants malnutris, les femmes enceintes et les personnes âgées ». Le département du Nord fait face à un taux de létalité hospitalière de 7,5%, le plus élevé dans le pays.

Selon l'OMS et l'UNICEF, ce taux pourrait être multiplié par cinq si les patients n'ont pas accès aux services de santé. Les problèmes de sécurité n’ont pas épargné les services de transport aérien offerts par le PAM à l’ensemble de la communauté humanitaire. Après une courte interruption, l’hélicoptère du PAM a repris ses vols vers le nord du pays.

« Si la violence persiste, ce sont les plus vulnérables qui en paieront le prix », a dit la Représentante du PAM en Haïti, Myrta Kaulard. À Cap Haïtien et dans le nord-est, le PAM ne pourra pas fournir de repas chauds quotidiennement à 190.000 enfants inscrits dans les écoles faisant partie du programme de cantines scolaires. De plus, 35.000 femmes enceintes et enfants de moins de 5 ans ne recevront pas de produits alimentaires spécialisés pour prévenir ou combattre la malnutrition. « Déjà, des distributions de savons et de comprimés de purification d'eau dans les écoles du pays n'ont pu avoir lieu, a ajouté Mme Kaulard. Ceci ralentit notre campagne de prévention du choléra et risque de mettre la vie de ces enfants en danger ».

La représentante de l’UNICEF en Haïti, Francoise Gruloos-Ackermans, a déclaré pour sa part que l’insécurité récente dans le Nord compromettait la lutte contre le choléra, en particulier en ce qui concerne les enfants qui constituent la moitié de la population. « L’insécurité affecte directement la réponse à l’épidémie de choléra et met la vie de milliers de personnes en danger, parmi eux de nombreux enfants. »

Les Nations Unies coordonnent actuellement un appel à l’aide internationale d’urgence pour lever des fonds d’un montant de 164 millions de dollars pour financer la réponse face au choléra.