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Côte d'Ivoire : l'ONU retire une partie de son personnel civil

Côte d'Ivoire : l'ONU retire une partie de son personnel civil

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La mission des Nations Unies en Côte d'Ivoire procède au retrait temporaire d'une partie de son personnel civil, a annoncé son chef aujourd'hui à New York, rappelant les menaces qui continuent de peser, déplorant l'absence de matériel permettant de faire face à de nouvelles attaques et exigeant la fin de l'impunité pour les responsables des violences.

« Le retrait du personnel civil est une mesure nécessaire pour notre sécurité. Il s'agit d'une relocalisation temporaire d'environ 400 membres du personnel civil, mais, bien sûr, l'ONUCI dans son ensemble reste sur place, afin de défendre ses positions et d'essayer de promouvoir la paix et la feuille de route », a déclaré aujourd'hui Pierre Schori, représentant spécial du Secrétaire général pour la Côte d'Ivoire, à l'issue d'un exposé au Conseil de sécurité réuni pour des consultations à huis clos.

image• Retransmission de la rencontre avec la presse[12mins]

« Le personnel essentiel de la Mission reste sur place », c'est-à-dire, a indiqué le représentant spécial, « si l'on compte le personnel de toutes les agences des Nations Unies, presque 2.000 personnes ».

« Nous les transfèrerons dans nos bureaux à l'abri, à Banjul (en Gambie) et à Dakar (au Sénégal) », a-t-il précisé.

« Compte tenu des attaques au vitriol que l'on entend sur les radios et dans les médias, il faut s'attendre à ce que la situation ne s'améliorera pas dans les prochains jours. Il faut noter aussi que le personnel a été traumatisé et qu'il a besoin de repos », a-t-il poursuivi.

« Nous avons subi un siège pendant quatre jours. J'ai dormi sur un matelas dans mon bureau. Dans l'Ouest, nous avons vu comment les humanitaires ont été plus ou moins chassés et comment les stocks ont été pillés. Ils ne peuvent pas y retourner et nous attendons les résultats d'une mission d'évaluation », a-t-il répondu à une question sur la réalité des menaces qui pèsent sur la mission.

Interrogé sur la possibilité que le Conseil de sécurité adopte des sanctions individuelles contre les responsables des violences, Pierre Schori a indiqué : « c'est bien la conclusion à laquelle nous sommes arrivés, après les attaques à Abidjan, dans l'Ouest et dans d'autres régions sous le contrôle du gouvernement ».

« On parle beaucoup des sanctions en Côte d'Ivoire et au Conseil de sécurité. Si elles sont mises en place, les Jeunes patriotes ne seront pas très contents », a-t-il fait remarquer.

Mais pour moi, a-t-il insisté, la question de l'impunité est plus importante que celle des sanctions.

« Nous avons vu comment les opérations de pillage ont visé l'ONU. Il s'agit d'une situation inacceptable et il ne faut pas que cela se reproduise. Les auteurs de ces actes doivent être punis », a-t-il expliqué.

Prenant la parole à sa suite, le représentant de la France a indiqué aujourd'hui que le Conseil de sécurité était très près d'adopter de telles sanctions contre « un nombre réduit » de personnes (voir notre dépêche d'aujourd'hui).

En réponse à une question sur les réticences de la part de la communauté internationale au renforcement des moyens militaires, le représentant du Secrétaire général a expliqué qu'il était certain que l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire ( ONUCI ) n'était pas équipée pour faire face aux mouvements de foule et aux manifestations.

« Nous pensions que tout irait bien avec la feuille de route. Donc nous n'avons que trois véhicules armés dans tout Abidjan », a-t-il précisé.

« Mais même si tout allait bien, il nous faudrait plus de policiers et de troupes pour accompagner le désarmement et le processus électoral dans ce très grand pays », a-t-il estimé.

« Nous demandons trois unités spéciales de 125 personnes capables de contenir des foules, qui utilisent du gaz lacrymogène et qui ne tirent pas à balles réelles », a-t-il fait savoir.

Interrogé enfin sur la dissolution de l'Assemblée nationale, dont la recommandation par l'ONU avait servi de prétexte aux attaques contre les Nations Unies, Pierre Schori a rappelé que sa dissolution avait été automatique, en vertu de la Constitution.

« Le président Obasanjo, le président Gbagbo et moi-même avions élaboré un projet de déclaration selon laquelle les parlementaires pourraient garder un rôle consultatif visant à promouvoir la paix », a-t-il ajouté (voir notre dépêche du 18 janvier 2006).

« Nous attendons maintenant que le président et le Premier ministre trouvent une solution politique », a-t-il conclu.

Après avoir condamné « la violence orchestrée et dirigée contre les Nations Unies » en Côte d'Ivoire, le Secrétaire général avait appelé les « Jeunes patriotes », fidèles du président ivoirien, à « rentrer chez eux » (voir nos dépêches du 19 janvier 2006 et du 17 janvier 2006).

Le 17 janvier, « des casques bleus du contingent bangladeshi avaient été contraints d'ouvrir le feu sur des individus qui essayaient de pénétrer dans l'enceinte de l'ONUCI », avait indiqué le porte-parole du Secrétaire général.

« Plusieurs d'entre eux ont été tués et d'autres blessés. Les forces des Nations Unies s'efforcent de faire preuve de la plus grande retenue face à ces attaques, privilégiant autant que possible des méthodes non létales pour disperser les rassemblements et dissuader les attaques », avait-il ajouté.

Le porte-parole avait estimé « tout particulièrement choquant le recours à la propagande par les médias de la haine », qui diffusent des messages d'incitation à la violence contre les Nations Unies.