L'actualité mondiale Un regard humain

Darfour : la CPI exige l'entière coopération du Soudan et de l'Union africaine

Darfour : la CPI exige l'entière coopération du Soudan et de l'Union africaine

Luis Moreno-Ocampo
Luis Moreno Ocampo, Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), a exigé aujourd'hui, devant le Conseil de sécurité, l'entière coopération de tous les pays de l'Union africaine (UA) et une collaboration supplémentaire du gouvernement du Soudan, dans son enquête sur les crimes commis au Darfour depuis le 1er juillet 2002.

Rendant compte des progrès réalisés dans l'enquête sur les « graves violations des droits de l'homme » perpétrés au Darfour et présentant au Conseil de sécurité le rapport sur les activités de son Bureau depuis le 29 juin dernier, Luis Moreno Ocampo, Procureur de la CPI, a expliqué que la première phase de ses travaux d'investigation, qui consiste à rassembler les faits qui se rapportent à ces crimes ainsi qu'aux groupes ou aux individus qui en portent la responsabilité, avait bien progressé.

Le Procureur de la CPI a néanmoins indiqué que « l'insécurité permanente qui prévaut au Darfour empêche la mise en place d'un système efficace de protection des victimes et des témoins », ce qui a contraint son Bureau à mener son enquête en dehors du Soudan.

Ces restrictions n'ont cependant pas empêché l'enquête d'avancer grâce aux renseignements et aux autres formes d'assistance fournis par les États et les organisations, a fait savoir Luis Moreno Ocampo.

« Nous avons identifié des témoins dans 17 pays. Plus de 100 témoins potentiels ont été sélectionnés et un certain de dépositions ont déjà été enregistrées. Nous sommes actuellement en train de sélectionner des centaines d'autres témoins potentiels, soit directement, soit avec l'assistance d'Etats ou d'organisations », a-t-il informé.

À cet égard, il a évoqué la relation de collaboration qui avait été engagée entre la CPI et le gouvernement soudanais. Il a également fait état des contacts établis avec d'autres parties au conflit, afin qu'elles soient en mesure de fournir des informations et des éléments de preuve à la CPI au cours de la prochaine phase de l'enquête.

La deuxième phase de son enquête, qualifiée de « déterminante », se concentrera sur un certain nombre d'incidents à caractère criminel et sur les personnes qui en portent la responsabilité la plus lourde, a annoncé le Procureur.

Le succès de cette deuxième phase, a estimé Luis Moreno Ocampo, exigera l'entière collaboration de l'UA. A ce propos, il exhorte l'UA à signer un accord CPI-UA dont le texte a été finalisé en mai 2005.

Son Bureau sollicitera aussi une assistance et une collaboration supplémentaire de la part du gouvernement du Soudan en ce qui concerne notamment la collecte de renseignements factuels et d'éléments de preuve, maintenant qu'une relation de coopération avait été engagée avec ce dernier.

Le deuxième rapport du Procureur, remis aujourd'hui au Conseil de sécurité, boucle la première phase de l'enquête, démarrée le 1er juin dernier.

Luis Moreno Ocampo avait remis un premier rapport sur les activités de son Bureau le 29 juin dernier (voir notre dépêche du 29 juin 2005).

Le Conseil de sécurité avait voté, le 31 mars dernier, la résolution 1593 qui décidait de déférer au Procureur de la CPI la situation au Darfour depuis le 1er juillet 2002 (voir notre dépêche du 1er avril 2005).

Une Commission d'enquête internationale sur les violations des droits de l'homme commis au Soudan, créée à la demande du Secrétaire général, avait conclu, dans son rapport remis le 29 janvier dernier, que le gouvernement soudanais et les milices Janjaouites avaient commis des crimes contre l'humanité dans la région du Darfour.

Mais la Commission n'avait pas pu déterminer, comme le lui avait demandé le Secrétaire général, s'il y avait eu « génocide », c'est-à-dire, « l'intention de détruire tout ou partie d'une communauté définie par sa race ou religion ».

Elle avait donc renvoyé cette question à la CPI (voir notre dépêche du 1er février 2005).

Rendant compte à la presse de sa dernière visite au Darfour, Juan Mendez, Conseiller spécial pour la prévention des génocides, avait prévenu, le 11 octobre dernier, que la situation s'était gravement détériorée au Darfour, au cours des derniers mois, et que les populations n'étaient toujours pas à l'abri d'un génocide ou « d'un deuxième génocide » (voir notre dépêche du 11 octobre dernier).

Voir l'ensemble de la déclaration de Luis Moreno Ocampo dans le communiqué de l'ONU d'aujourd'hui.