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Côte d'Ivoire : malgré l'embargo, les dépenses militaires du gouvernement restent élevées

Côte d'Ivoire : malgré l'embargo, les dépenses militaires du gouvernement restent élevées

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Alors que la Côte d'Ivoire se trouve soumise à un embargo sur les armes depuis novembre 2004, le rapport d'un Groupe d'experts de l'ONU a souligné hier le niveau élevé des dépenses militaires du pays et recommandé au Conseil de sécurité de renforcer sa surveillance sur le détournement des fonds liés à l'exportation du cacao, du coton et des diamants.

« Les dépenses de défense de la Côte d'Ivoire sont élevées et le Conseil de sécurité devrait demander au gouvernement ivoirien de présenter d'urgence un décompte global de ces dépenses en 2005 au Système des Nations Unies pour l'établissement de rapports normalisés sur les dépenses militaires », indique le rapport du Groupe d'experts sur la Côte d'Ivoire, créé par la résolution 1584 et examiné hier par le Comité des sanctions.

« Depuis novembre 2004, le gouvernement ivoirien a cherché à réparer, entretenir et reconstituer la FACI – Force aérienne de la Côte d'Ivoire - par volonté politique de disposer d'une force aérienne qui lui procurerait un avantage militaire que les Forces nouvelles n'ont pas », précisent les experts.

« Selon le ministère de la défense, 8 Bélarussiens et 2 techniciens aéronautiques ukrainiens sont actuellement employés sous contrat pour aider la FACI dans ce domaine », ajoute le rapport.

« Le terminal fruitier du port d'Abidjan est manifestement un lieu stratégique de déchargement de matériel militaire. Il devrait être l'objet d'une surveillance accrue de l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire ( ONUCI ), indiquent le Groupe d'experts.

A cet égard, les experts suggèrent la nomination par l'ONUCI d'un expert en douanes pour mieux surveiller l'application des sanctions.

Le rapport recommande par ailleurs de mener des audits minutieux dans les secteurs industriels du cacao, du coton et du diamant pour établir l'éventuel détournement de fonds pour financer l'acquisition d'armes.

« Il y a un manque de transparence des finances publiques concernant le montant des recettes de la production et de l'exportation du cacao et leur redistribution. Les organismes quasi budgétaires liés au cacao devraient être soumis à un audit financier général, international, indépendant et crédible », affirme le Groupe d'experts.

« L'exportation de diamants de Côte d'Ivoire est illégale mais il n'existe aucune évaluation crédible du volume actuel des exportations de diamants bruts. L'ONUCI et le Secrétariat du Processus de Kimberley devraient mener ensemble une enquête sur la production et l'exportation illicite de diamants et en publier les résultats », précisent les experts.

Beaucoup d'États Membres déplorent de ne pas pouvoir appliquer véritablement la résolution 1572 du Conseil de sécurité, le Comité n'ayant pas pu leur indiquer à quelles personnes ou organisations s'appliquaient le gel des avoirs et les interdictions de voyage, rappelle le rapport.

Le Comité doit apporter d'urgence des éclaircissements sur ce point, suggère le groupe d'experts.

Le 18 octobre dernier, le Conseil de sécurité avait prorogé, jusqu'au 15 décembre prochain, le mandat des experts. Par la résolution 1631, le Conseil priait « le Groupe d'experts de lui présenter avant le 1er décembre 2005 un bref point de l'application de l'embargo sur les armes, en formulant des recommandations » (voir notre dépêche du 18 octobre 2005).

Créé par la résolution 1584 (2005), le Groupe d'experts est chargé de recueillir et d'analyser toutes informations pertinentes en Côte d'Ivoire, dans les pays de la région et dans d'autres pays sur les mouvements d'armes et la fourniture de toute assistance se rapportant à des activités militaires, conformément à l'embargo sur la Côte d'Ivoire imposé par la résolution 1572 du 15 novembre 2004.

Dans sa résolution 1572 adoptée le 15 novembre 2004, le Conseil de sécurité avait également créé un Comité des sanctions chargé de désigner les personnes qui notamment bloqueraient la mise en œuvre du processus de paix ou seraient jugées en état d'infraction à l'embargo sur les armes (voir notre dépêche du 15 novembre 2004).

Selon la résolution, ces personnes pourraient être soumises à des sanctions individuelles - gel des avoirs et les interdictions de voyage.

La flotte aérienne militaire de la Côte d'Ivoire avait été détruite le 6 novembre 2004 par la force française Licorne, à la suite d'une attaque par deux avions Sukhoï 25 des forces gouvernementales ivoiriennes qui avaient fait huit morts dans les rangs des troupes françaises, blessé 23 autres militaires et tué un Américain.