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Rapport Mehlis : l'assassinat de Rafic Hariri implique le Liban et la Syrie

Rapport Mehlis : l'assassinat de Rafic Hariri implique le Liban et la Syrie

Rafic Hariri (archives)
« Un faisceau de preuves conduit à l'implication tant du Liban que de la Syrie dans l'assassinat de l'ex-Premier ministre libanais Rafic Hariri, indique le rapport de la Commission d'enquête indépendante dirigée par Detlev Mehlis, pour qui l'attentat du 14 février dernier a été mené par un groupe disposant de ressources considérables et d'une organisation minutieuse.

« Il est bien connu que les services de renseignement militaires syriens étaient omniprésents au Liban, au moins jusqu'au retrait des troupes syriennes [en avril] », déclare Detlev Mehlis, chef de la Commission d'enquête internationale indépendante, dans son rapport au Conseil de sécurité, rendu public hier.

« A partir des conclusions de la Commission et des enquêtes menées au Liban à ce jour et sur la base des documents et des éléments de preuve rassemblés, ainsi que des pistes examinées, il existe un faisceau de preuves conduisant à l'implication tant du Liban que de la Syrie dans cet attentat terroriste », indique le rapport, qui résume une enquête de quatre mois, au cours de laquelle la Commission a interrogé plus de 400 personnes et examiné plus de 60.000 documents.

« Les anciens chefs de la sécurité libanais étaient nommés par les Syriens. Compte tenu de l'infiltration des institutions et de la société libanaises par les services de renseignement syrien et libanais travaillant de concert, il serait difficile d'envisager qu'un attentat aussi complexe ait pu être mené sans qu'ils en soient informés », ajoute le rapport de 63 pages.

Le rapport souligne que le conflit apparent entre Rafic Hariri et des membres du gouvernement syrien, y compris le président syrien Bashar Al-Assad, était un des éléments déterminants des informations recueillies par la Commission.

« Il incombe à la Syrie de clarifier un grand nombre des questions qui restent sans réponse », conclut le rapport, qui ajoute que la Commission a mené plusieurs pistes qui pointent directement vers la responsabilité dans l'attentat de membres hauts placés des services de renseignement syriens.

« Même si les autorités syriennes, après une première hésitation, ont coopéré à un degré limité avec la Commission, plusieurs témoins ont tenté de tromper les enquêteurs en faisant des déclarations inexactes », affirme le rapport qui ajoute que « la lettre adressée à la Commission par le ministre des Affaires étrangères de la République arabe syrienne s'était révélée contenir de fausses informations ».

Le rapport souligne que l'enquête n'est pas terminée et qu'elle prendra encore du temps. « La Commission estime que l'enquête devrait être poursuivie par les autorités judiciaires et de sécurité libanaises, qui ont prouvé qu'avec une assistance internationale et le soutien de la communauté internationale, elles pouvaient avancer et même prendre l'initiative des opérations de façon efficace et professionnelle », dit le rapport.

L'attentat qui s'était produit à Beyrouth contre le convoi de Rafic Hariri, le 14 février dernier, avait causé la mort de 22 autres personnes et conduit à des appels au retrait de toutes les troupes syriennes et de l'appareil de renseignement, présents au Liban depuis le début de la guerre civile de 1975-1990 (voir notre dépêche du 15 février 2005).

Le Conseil de sécurité avait mis en place la Commission après qu'une enquête préliminaire des Nations Unies ait qualifié l'enquête des services de police libanais de « gravement défectueuse », concluant à la responsabilité première de la Syrie quant au « climat de tension politique précédant l'assassinat » (voir notre dépêche du 30 mars 2005).

Dans la lettre par laquelle le Secrétaire général transmettrait hier le rapport au Conseil de sécurité, le Secrétaire général soulignait « les progrès accomplis dans l'enquête », mais que « l'enquête pénale n'était pas encore achevée ».

Kofi Annan y indiquait par ailleurs « son intention de proroger le mandat de la Commission jusqu'au 15 décembre 2005, ainsi que l'y autorise la résolution 1595 (2005) du Conseil de sécurité » (voir notre dépêche d'aujourd'hui).

Detlev Mehlis présentera mardi prochain un exposé public sur les conclusions de son rapport au Conseil de sécurité.