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Exigez un accord de paix au Darfour, demande Jan Pronk au Conseil de sécurité

Exigez un accord de paix au Darfour, demande Jan Pronk au Conseil de sécurité

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Au lendemain de la création du gouvernement d'unité nationale au Soudan, l'Envoyé de l'ONU est venu demander au Conseil de sécurité le renforcement du soutien au maintien de la sécurité et aux activités humanitaires dans le pays, en accélérant le déploiement des troupes, en augmentant les fonds alloués et en lançant un message exigeant la conclusion d'un accord de paix au Darfour.

L'Accord Nord-Sud, même s'il progresse lentement, progresse sûrement, malgré la mort de John Garang, a déclaré aujourd'hui le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan, Jan Pronk, lors d'une conférence de presse qui s'est tenue à l'issue d'un exposé à huis clos devant le Conseil de sécurité, auquel il a présenté « un certain nombre de risques pour la période à venir ».

image• Retransmission de la conférence de presse [60mins]

S'agissant des institutions fondées sur la base de l'accord global de paix, la Commission militaire conjointe entre le Nord et le Sud fonctionne bien, mais la Commission politique et la Commission d'évaluation de la mise en œuvre de l'Accord n'ont pas été mises en place, a affirmé Jan Pronk dans un premier temps.

« Hier, le gouvernement d'unité nationale a été établi, après plusieurs semaines de négociations, on peut donc s'attendre à ce que la situation progresse », a-t-il avancé.

L'insécurité au Sud-Soudan s'est aggravée, en particulier à cause de la Lord's Resistance Army (LRA) [Armée de la résistance du Seigneur], le mouvement rebelle du nord de l'Ouganda, qui pourrait être actif maintenant au Nord de la République démocratique du Congo (RDC), a-t-il alerté dans un deuxième temps.

« C'est une menace pour nous », a prévenu Jan Pronk, qui a estimé que la question devrait être réglée militairement et politiquement. « Car même si Joseph Kony, son chef charismatique qui se croît invincible en raison de pouvoirs surnaturels, venait à mourir, il serait vite remplacé ».

Depuis plus de 15 ans, la LRA s'est illustrée par le recrutement de près de 20.000 enfants enlevés pour servir d'enfants soldats et d'esclaves sexuels, ainsi que par des pratiques de mutilations.

Interrogé sur la survie de la LRA au cours des années, Jan Pronk a indiqué que les bruits couraient qu'elle aurait été soutenue dans le passé par le gouvernement soudanais, qui aurait récemment fait savoir qu'il voudrait y mettre fin.

Troisièmement, a précisé le Représentant spécial, la région d'Abyei, au centre du pays (carte), connaît des tensions entre tribus en attendant des décisions sur son statut spécial.

Quatrièmement, les autorités devront adopter des lois et décrets en application de la Constitution. « Il n'y a déjà plus de censure au Soudan. Mais une loi a imposé récemment l'enregistrement des ONG soudanaises pour être autorisées à fonctionner, sur des critères arbitraires ».

Jan Pronk a estimé que cette loi serait vraisemblablement contestée et qu'elle ne correspond pas au ton des récentes déclarations du Président Bashir. « Cela révèle donc peut-être des tensions au sein du Gouvernement », a-t-il précisé.

La mort de John Garang, chef des rebelles du Sud et héros des Soudanais du Sud les plus pauvres de Khartoum, a entraîné pour la première fois depuis 1956 des tueries dans la rue et un sentiment de peur (voir notre dépêche du 3 août 2005), a-t-il indiqué, soulignant : « il faut à tout prix éviter que cela ne se renouvelle, notamment à cause des connotations ethniques et raciales de ces tueries ».

Ces populations, qui vivent dans des conditions plus difficiles que les réfugiés dans les camps de déplacés, risquent aussi de se voir expulsés de leurs huttes à la périphérie de Khartoum, à mesure que s'étend la capitale, a-t-il ajouté.

S'agissant du Darfour, « les pourparlers de paix se poursuivent à Abuja », a déclaré Jan Pronk. « Je suis déjà satisfait que le médiateur de l'Union africaine, Salim Ahmed Salim (voir notre dépêche du 6 juillet 2005), ait réussi à maintenir les parties à la table, alors qu'elles viennent de commencer leur sixième cycle de négociations ».

Toutefois au rang des « requêtes » qu'il a formulé aujourd'hui auprès du Conseil de sécurité, figure en premier rang celle de lancer un « très ferme message sur le Darfour, en 'exigeant' un accord global sur le Darfour d'ici à la fin de l'année ». « On ne peut plus alterner négociations et fusillades », a-t-il déclaré.

Interrogé à cet égard sur les pouvoirs du Conseil de sécurité, Jan Pronk a estimé que s'il adoptait une position unie, il pourrait effectivement exercer une pression efficace.

Le Représentant spécial a indiqué par ailleurs avoir demandé au Conseil de renouveler le mandat de la Mission, ce qui devrait être fait vendredi, et ensuite accélérer le déploiement des forces. « A présent, nous avons un quart des quelque 10.000 troupes autorisées. Le délai est maintenant imputable aux pays contributeurs de troupes », a-t-il précisé.

Le Représentant spécial a aussi appelé au déploiement des troupes de l'Union africaine, avant la conclusion d'un accord de paix, afin que les populations acceptent de rentrer chez elles.

« Nous avons besoin de fonds très importants » en plus du budget de la Mission pour l'assistance humanitaire, a enfin déclaré Jan Pronk, qui a précisé que la situation humanitaire dans le Sud n'était pas bonne, et qu'elle empirait avec la hausse du prix du pétrole.

« Les besoins en matière humanitaire et de développement, dƇ,9 milliard de dollars, ne sont couverts pour l'instant qu'à hauteur de 950 millions de dollars », soit environ 50 %, a-t-il indiqué.