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Conseil de sécurité : deux mécanismes envisagés pour identifier et juger les crimes graves commis au Burundi depuis 1962

Conseil de sécurité : deux mécanismes envisagés pour identifier et juger les crimes graves commis au Burundi depuis 1962

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Le Conseil de sécurité a été saisi hier des conclusions d'une commission d'enquête judiciaire internationale au Burundi qui propose la création d'une « commission de la vérité » pour identifier les crimes graves commis entre 1962 et 2000 et d'une chambre spéciale des tribunaux burundais pour juger les crimes de génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis entre 1972 et 1993.

En présence du ministre de la justice du Burundi, Dinace Kiganahe, le Sous-Secrétaire général aux affaires juridiques de l'ONU, Ralph Zacklin, a présenté hier, lors d'une séance du Conseil de sécurité, les conclusions contenues dans le rapport de la mission d'évaluation, qui s'est rendue au Burundi en mai 2004, pour examiner l'opportunité et la possibilité de créer une commission d'enquête judiciaire internationale, comme prévu par l'Accord pour la paix et la réconciliation au Burundi, signé à Arusha le 28 août 2000.

Prenant en compte l'Accord d'Arusha, les besoins et les attentes des Burundais, les capacités de l'administration burundaise de la justice, les pratiques et les principes établis des Nations Unies ainsi que le caractère pratique et la viabilité de l'initiative, la mission a recommandé un double mécanisme, a annoncé le Sous-Secrétaire général.

Ralph Zacklin a expliqué que cette recommandation vise à la fois la création d'un mécanisme non judiciaire, sous la forme d'une commission de la vérité, et celle d'un mécanisme judiciaire, sous la forme d'une chambre spéciale au sein de l'appareil judiciaire burundais, qui seraient composés d'un personnel international et national.

Ce dernier élément a été particulièrement salué par les 15 membres du Conseil qui ont insisté sur l'importance de « l'appropriation nationale » pour le succès de l'opération. La commission de la vérité, dont la compétence temporelle irait de l'indépendance du Burundi en 1962 à 2000, serait dotée du mandat d'établir les faits historiques, de déterminer les causes et la nature du conflit au Burundi, de classifier les crimes commis, et d'en identifier les responsables.

Quant à la chambre spéciale, elle aurait pour mandat de poursuivre les plus grands responsables des crimes de génocide, des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre commis au Burundi. Sa compétence temporelle serait limitée aux phases spécifiques du conflit et inclurait au minimum les évènements intervenus entre 1972 et 1993.

L'appui apporté à ces propositions par le Ministre de la justice du Burundi a été salué par tous les intervenants dont le représentant de la France, Jean-Marc de La Sablière, président du Conseil de sécurité pour le mois de juin. Ce dernier a rappelé la difficulté qu'il y a eu à obtenir un tel soutien compte tenu de la différence entre le double mécanisme proposé et ce qui a été envisagé et agréé à Arusha.

Dorénavant, pour le Ministre burundais, Didace Kiganahe, les propositions répondent au double souci des négociateurs d'Arusha et du peuple burundais. Le Ministre a néanmoins jugé que telle qu'envisagée, la commission de la vérité ne dégage pas de manière suffisante le volet « réconciliation » qui est pourtant capital pour surmonter les séquelles des divisions du passé.

Didace Kiganhe a aussi appelé à une clarification des rapports entre la commission de la vérité et la chambre spéciale, avant de demander au Conseil de préciser les modalités de financement des mécanismes. Il a en effet prévenu qu'il y va de la crédibilité du système à mettre en place de lui assurer un financement continu pendant toute la durée de son fonctionnement. La question du financement a suscité plusieurs interrogations dont celle du représentant des États-Unis.