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La croissance mondiale liée au dollar et à la réduction des déséquilibres commerciaux

La croissance mondiale liée au dollar et à la réduction des déséquilibres commerciaux

Jose Antonio Ocampo
Si l'on veut préserver la croissance de 3,25 points prévue pour 2005, il faudra corriger la baisse du dollar, estiment les experts du Département des affaires économiques et sociales de l'ONU dans leur rapport annuel sur les perspectives de l'économie mondiale, pour qui les déséquilibres actuels du commerce mondial ne profitent ni aux créditeurs des Etats-Unis ni à leurs exportateurs.

« Contrairement à bien des attentes, ni les déséquilibres caractérisant le commerce mondial, ni même le déficit commercial américain, ne pourront être corrigés par un dollar américain à la baisse et ce, en dépit de prévisions plutôt optimistes de croissance économique prévalant en ce début de l'année 2005 », indiquent les auteurs d'un rapport de l'ONU sur la situation et les perspectives de l'économie mondiale en 2005, lancé hier à New York et présenté par le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, José Antonio Ocampo.

Dans leur rapport, intitulé en anglais World Economic Situation and Prospects 2005 (WESP), les experts de l'ONU estiment que le cycle de reprise économique a atteint un sommet après avoir connu une année 2004 favorable, surtout dans les pays en développement.

« L'éventualité d'un mouvement correctif abrupt et dommageable pour l'ensemble de l'économie mondiale n'est toutefois pas à écarter », avertissent ces experts, notant que « la dépréciation du dollar ne sera probablement pas suffisante pour réduire les déséquilibres commerciaux au plan mondial et les ramener à un niveau acceptable, sans à-coup ».

La publication de ce rapport annuel intervient peu après la diffusion, en novembre dernier, de statistiques prévisionnelles annonçant que le déficit commercial américain continuait de se creuser de manière accélérée.

Selon le rapport des experts du Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies (DESA) et de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), « la baisse du dollar sera incapable de générer une correction de la croissance mondiale en raison de la position unique de l'économie américaine, dont la dette se situe notamment dans sa propre devise, celle-là même qui représente la principale devise utilisée dans les échanges mondiaux ».

Alors que les créditeurs des Etats-Unis « subissent des pertes suite à la chute de la valeur de leurs réserves de devises, cette dévaluation « a elle-même un impact sur la demande mondiale, ce qui atténue les avantages que pourraient tirer les exportateurs des Etats-Unis du fait de l'augmentation de la compétitivité accompagnant un dollar faible », indique le rapport.

« En définitive, les déséquilibres au plan mondial sont patents si l'on observe le niveau de la consommation américaine, le niveau de la dette des Etats-Unis et le rythme marqué d'augmentation des surplus commerciaux de leurs partenaires », estiment les experts, pour qui les variations sur les marchés monétaires ne permettront pas de résoudre le problème de ces déséquilibres et qui engagent les « autorités de Washington » à « apporter des corrections au plan fiscal, et à s'efforcer d'améliorer le taux de l'épargne privée, tout en contrebalançant les effets de telles mesures par l'adoption de mesures expansionnistes dans d'autres domaines ».

Parmi les conclusions des auteurs du rapport sur la situation de l'économie mondiale à la fin de l'année 2004 et sur les perspectives en ce début de l'année 2005, il ressort que la croissance du produit mondial brut en 2004 est estimée à 4 % et qu'une croissance de 3,25 points est prévue pour 2005.

Selon le rapport, les économies chinoise et américaine jouent conjointement un rôle prépondérant comme soutiens de l'économie mondiale – la demande américaine stimule le secteur de la production industrielle, tandis que l'émergence de la demande chinoise sur les marchés des produits de base influence favorablement les exportations des pays en développement, y compris en Amérique latine et en Afrique.

Quant aux pays en développement, « dynamisée en partie par la bonne santé du marché des produits de base » leur croissance s'élevait en moyenne à 5,5 % en 2004, soit le niveau le plus haut de ces vingt dernières années.

La croissance du continent africain s'élevait à 4,5 % en 2004, bénéficiant de l'augmentation de la production agricole, d'une plus grande stabilité politique ainsi que d'un soutien important des donateurs et de la bonne santé du marché des produits de base.

« La bonne nouvelle est que ces mêmes facteurs devraient avoir les mêmes effets au cours de l'année 2005 », soulignent les experts, qui signalent toutefois que seuls six pays ont connu une croissance supérieure aux 7 % reconnus comme le seuil minimal de croissance nécessaire, dans cette région du monde, pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement, et que quarante-trois pays demeurent en deçà de ce seuil.