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L'absence d'entrevues entre la Commission d'enquête et les leaders des Forces Nouvelles soulignée à Abidjan

L'absence d'entrevues entre la Commission d'enquête et les leaders des Forces Nouvelles soulignée à Abidjan

Le dernier rapport du Groupe de suivi sur la Côte d'Ivoire décrit une situation marquée par les commémorations du 19 septembre 2002 et le fait que la Commission d'enquête indépendante chargée de tirer au clair ce qui s'est passé ce jour-là ait bouclé ses travaux sans avoir rencontré les dirigeants des Forces nouvelles, le mouvement d'opposition qui serait impliqué dans les violences perpétrées à cette date.

« Dans l'ensemble, la situation sur le plan de la sécurité et sur le plan militaire est calme, en dépit d'informations faisant état de tensions accrues dans l'ouest, en particulier entre des éléments des Forces nouvelles et des membres de l'Opération Licorne », indique, à propos de la période allant du 15 au 30 septembre dernier, le quatrième rapport du Groupe de suivi tripartite, créé en vertu de l'Accord d'Accra III.

Ce document décrit une situation politique principalement marquée par la commémoration du deuxième anniversaire de la crise du 19 septembre 2002. Ce jour-là, des attaques lancées par 800 militaires, pour la plupart recrutés durant le régime militaire du général Gueï, « ostensiblement pour protester contre leur démobilisation », ont déclenché des émeutes dans l'ensemble du pays, relate le Secrétaire général dans son rapport du 26 mars 2003.

Les forces loyalistes reprenaient rapidement le contrôle d'Abidjan tandis que les rebelles rejoints par des civils et militaires s'emparaient de Bouaké et d'autres villes du Nord et de l'Ouest du pays. Le général Gueï et plusieurs membres de sa famille ainsi que le ministre de l'Intérieur, Emile Boga Doudou, comptaient au nombre des morts.

Les rumeurs selon lesquelles il s'agissait d'une tentative de coup d'Etat soutenue par des étrangers, entraînaient un mouvement d'hostilité contre les immigrés venus des pays voisins. A Abidjan la destruction de bidonvilles jetaient 20 000 personnes à la rue.

A l'occasion de ce jour anniversaire, « tous les dirigeants des partis politiques et des forces ont prononcé des déclarations sur les tristes événements de ce jour », indique le rapport du Groupe de suivi, « et certains se sont dit déçus du peu de progrès réalisé, selon eux, dans la mise en œuvre de l'Accord d'Accra III, en particulier en ce qui concerne l'adoption de lois essentielles par l'Assemblée nationale à la date butoir du 30 septembre 2004 et la mise en train du processus de DDR censé commencer le 15 octobre 2004. »

Le Groupe souligne toutefois « l'initiative importante » lancée ce jour-là, la création de « Corridors de la paix » dont l'objectif était de permettre le regroupement des familles séparées par le conflit.

Dans un premier temps, précise-t-il, « des convois transportant des enfants sont allés du sud, contrôlé par le Gouvernement, vers le nord, contrôlé par les Forces nouvelles, avec un sauf-conduit des soldats de la paix de l'ONUCI [Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire]. »

Le rapport décrit une atmosphère où l'espoir se mêle à « une certaine anxiété au sujet des mesures que l'Assemblée nationale et les protagonistes politiques envisagent de prendre pour faire avancer la mise en œuvre des Accords de Linas-Marcoussis et d'Accra III. »

« Le communiqué de presse publié à l'issue de la réunion du Conseil de sécurité du 27 septembre 2004 sur la Côte d'Ivoire, joint au présent rapport [...], a donné lieu à des interprétations différentes quant aux obligations qui incombent aux divers acteurs politiques », note-t-il.

Lors de la cérémonie de clôture de la session extraordinaire de l'Assemblée nationale le 28 septembre 2004, il a été indiqué que les travaux relatifs aux textes législatifs qui n'avaient pas été adoptés se poursuivraient durant la session ordinaire suivante de l'Assemblée nationale, du 6 octobre au 17 décembre 2004, note le Groupe de suivi.

Il indique également que les consultations tenues dans le cadre du processus électoral par le Groupe des partenaires organisées par l'ONUCI avec la participation du PNUD [Programme des Nations Unies pour le développement], de l'Union européenne, de l'Organisation internationale de la francophonie et d'autres donateurs potentiels (Royaume-Uni, Suisse et France), se sont poursuivies.

« L'objectif est de mettre en place un forum de discussion des questions liées au processus électoral en vue de trouver des solutions pratiques, y compris un financement adéquat, pour la tenue, non seulement des élections présidentielles d'octobre 2005, mais également d'un référendum éventuel, sur la base d'une lecture correcte des incidences constitutionnelles de l'amendement de l'article 35 », précise le rapport.

Après avoir exposé l'état des préparatifs en matière de désarmement et de réinsertion, le Groupe de suivi attire l'attention sur le fait que la Commission d'enquête internationale n'a pas rencontré certains des principaux dirigeants des Forces nouvelles, tels que Guillaume Soro, Secrétaire général du MPCI [Mouvement patriotique de Côte d'Ivoire] ainsi que plusieurs autres ministres et dirigeants de partis politiques.

« Lors d'une réunion avec les membres de la Commission d'enquête internationale, le Comité de coordination créé par le Président de la République a souligné que la Commission n'avait pas rencontré certains des principaux dirigeants des Forces nouvelles qui auraient été responsables de certaines violations massives des droits de l'homme en Côte d'Ivoire », souligne le Groupe.

Il réitère en conclusion ses recommandations formulées dans ses précédents rapports à savoir la tenue de consultations avec, d'une part, le Président Gbagbo et d'autres parties prenantes politiques pour déterminer les difficultés que pose l'adoption des réformes juridiques prévues et, d'autre part, entre les quatre principaux dirigeants politiques ivoiriens, sous l'égide de la CEDEAO [Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest] et de l'Union africaine, de façon à « trouver un moyen politiquement acceptable et pratique de régler la controverse concernant l'article 35 et son applicabilité à l'élection présidentielle de 2005. »