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Soudan : projet de résolution présenté par les Etats-Unis après leur référence à la Convention sur le génocide

Soudan : projet de résolution présenté par les Etats-Unis après leur référence à la Convention sur le génocide

John Danforth, Ambassadeur des Etats-Unis à  l'ONU
Le porte-parole de l'ONU a analysé aujourd'hui les déclarations du Secrétaire d'Etat américain se référant, à propos du Darfour, à l'article 8 de la Convention sur le génocide au moment où il annonçait la présentation d'un projet de résolution au Conseil de sécurité, réuni aujourd'hui en consultations à huis clos sur le Soudan, comme une façon de mettre en relation les deux textes.

Interrogé à propos du Soudan sur les déclarations du Secrétaire général Colin Powell qualifiant de génocide ce qui se passait au Darfour, le porte-parole de l'ONU, Fred Eckhard, a précisé que, selon ses informations, le Secrétaire d'Etat américain s'était spécifiquement référé à l'article 8 de la Convention sur le génocide.

« C'est la première fois qu'un Etat partie a jamais invoqué cet article », a précisé le porte-parole à propos d'une Convention pourtant approuvée en 1948.

Selon l'article 8 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, « toute Partie contractante peut saisir les organes compétents de l'Organisation des Nations Unies afin que ceux-ci prennent, conformément à la Charte des Nations Unies, les mesures qu'ils jugent appropriées pour la prévention et la répression des actes de génocide. »

Le porte-parole de l'ONU a ajouté que le Secrétaire d'Etat américain avait également indiqué qu'il allait introduire un projet de résolution cet après-midi, lors des consultations à huis clos tenues par le Conseil de sécurité sur le Soudan, « liant par là même », a fait observer Fred Eckhard, « l'article 8 de la Convention sur le génocide au projet de résolution introduit cet après-midi et qui n'est pour l'instant pas un document public. »

« Il nous reste maintenant à observer quel va être l'étape suivante à savoir la façon dont il va être présenté à l'organe compétent de l'ONU, le Conseil de sécurité, et les actions que ce dernier va prendre », a-t-il ajouté.

Auparavant, il avait indiqué que le Représentant spécial de l'ONU pour le Soudan, Jan Pronk, était de retour dans la capitale soudanaise de Khartoum après avoir séjourné à Oslo où il avait participé à une série de réunions avec le ministre norvégien des Affaires étrangères et le ministre du Développement international et avait discuté avec différents responsables des préparatifs de la Conférence des donateurs sur le Soudan, qui aura lieu dans la capitale norvégienne du 27 au 28 septembre.

Pendant ce temps, aucun accord n'a pu être trouvé sur la version révisée par l'Union africaine du projet de protocole sur les questions liées à la sécurité et les pourparlers d'Abuja au Nigeria se trouvent dans l'impasse, a indiqué le porte-parole qui a précisé que les médiateurs africains ont demandé aujourd'hui la tenue d'une plénière pour prendre note des points de vue des parties sur ce projet de façon à permettre au processus d'avancer.

Une fois les parties entendues, les médiateurs prévoient d'ajourner le cycle des pourparlers en cours et de faire le point sur l'état des négociations auprès de la présidence de l'Union européenne.

Au plan humanitaire, le premier convoi de camions d'aide alimentaire, envoyée par le Programme alimentaire mondial (PAM), est arrivée dans un camp de réfugiés de l'Est du Tchad aujourd'hui jeudi, ouvrant ainsi une nouvelle route de 2 800 Km à travers le Sahara depuis la rive méditerranéenne de la Libye avec pour objectif de nourrir des dizaines de milliers de réfugiés soudanais, a indiqué Fred Eckhard.

A sa sortie du Conseil, le Représentant permanent des Etats-Unis auprès de l'ONU à New York, l'ambassadeur John C. Danforth, s'est dit « très encouragé par les discussions de l'après-midi et par le fait que le Conseil de sécurité ait conscience qu'une action était nécessaire. » Il a indiqué qu'il avait beaucoup été question du rôle de l'Union africaine qui est très important pour l'avenir immédiat du Darfour, de l'importance de maintenir au Darfour une présence extérieure, ce qui apporte l'assurance aux populations de la région de bénéficier d'une certaine protection

Il s'est félicité de la lettre adressée par le Gouvernement du Soudan indiquant qu'il encourageait la présence de l'Union africaine, à condition toutefois que « cela devienne une réalité. »

En réponse à un commentaire faisant état de plusieurs pays qui avaient indiqué que la résolution leur posait de sérieux problèmes, l'ambassadeur Danforth a répondu qu'il n'avait connaissance que d'un pays dans ce cas.

Interrogé sur l'éventualité de sanctions, il a répondu que « les sanctions n'étaient qu'un outil pour parvenir à quelque chose », ajoutant que « nous devons clarifier ce que nous voulons. Nous l'avons fait dans la précédente résolution. Peut-être devons-nous le faire encore plus dans celle-ci. Il faut aussi bien faire comprendre que l'objectif dans l'immédiat est de mettre en place l'Union africaine en nombre suffisant au Darfour. »

Il a récusé l'argument relayé par un journaliste voulant que l'utilisation du terme génocide ne fasse que compliquer les négociations au sein du Conseil, affirmant que cela n'était absolument pas le cas. « C'est le point de vue du Secrétaire d'Etat Colin Powell et un point de vue auquel il tient. Il a été appuyé par les deux ailes du Congrès dans une résolution commune. Il a été appuyé par une enquête conduite par le Département d'Etat qui a conduit des interviews sur le terrain. Des dizaines de milliers de personnes ont été tuées, violées. [...] ».

Tout en expliquant que de son point de vue, « la façon de dénommer le processus est moins important [...] que de faire en sorte que cela s'arrête » il a indiqué n'avoir aucune objection à parler de génocide. »

« Notre principal objectif, a toutefois ajouté M. Danforth, est de sauver des vies et nous y parviendrons non par un débat juridique mais en amenant autant d'observateurs africains que possible sur le théâtre des opérations au Darfour, en appuyant le processus de paix qui s'efforce de résoudre les problèmes sous-jacentes, en obtenant que les négociations de Naivasha au Kenya [entre le Gouvernement et les mouvements rebelles du Sud] qui « n'ont que trop traîné » parviennent à une conclusion et enfin, par un soutien financier à l'aide humanitaire.

Il a précisé qu'une réunion d'experts était prévue demain à 10 heures et déclaré espérer que la résolution passerait la semaine prochaine. « Mais il y a 15 membres au Conseil de sécurité, alors nous verrons », a-t-il ajouté.

Il a vigoureusement réfuté que l'objectif final de la démarche soit un changement de régime à Khartoum. « Ce n'est absolument pas vrai », a-t-il affirmé.