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Si la technologie façonne l'avenir, ce sont les êtres humains qui décident de ses usages, a affirmé Kofi Annan aujourd'hui à Genève

Si la technologie façonne l'avenir, ce sont les êtres humains qui décident de ses usages, a affirmé Kofi Annan aujourd'hui à Genève

Kofi Annan
Evoquant le potentiel des technologies de l'information et de la communication, le Secrétaire général de l'ONU a aussi mis en avant les risques de fractures qu'elles posent à la communauté mondiale et a appelé à s'embarquer dans la société de l'information en reconnaissant qu'il s'agissait d'une entreprise qui transcendait sa dimension technologique.

"La technologie a donné naissance à l'ère de l'information. À nous maintenant d'édifier une société de l'information", a déclaré le Secrétaire général de l'ONU devant l'assemblée réunie pour la cérémonie d'ouverture du premier Sommet mondial sur la société de l'information, organisé par l'ONU.

"Ce sommet est unique en son genre", a poursuivi Kofi Annan. "Contrairement à la plupart des conférences mondiales, il n'est pas consacré aux menaces qui pèsent sur la planète, mais aux moyens de mieux tirer parti d'un nouvel atout mondial."

Evoquant le potentiel des technologies de l'information et de la communication, il a souligné que le défi à relever par le Sommet était de décider ce que l'on allait en faire.

La fracture numérique est en fait "une fracture multiple" qui se retrouve au niveau du contenu dont une bonne partie est très éloignée des besoins réels de la population", a fait valoir le Secrétaire général. "Le fait que près de 70% des sites web dans le monde soient en anglais étouffe les voix et les points de vue locaux", a-t-il également souligné.

"La fracture existe aussi entre les sexes, les femmes et les fillettes ayant un accès moindre à la technologie que les hommes et les garçons." Elle "se retrouve au niveau des échanges", le commerce électronique permettant "à certains pays et à certaines sociétés de tisser des liens plus étroits que jamais alors que, pour les autres, le risque de marginalisation s'accroît. Et il y a bien sûr tous les autres obstacles et disparités d'ordre social et économique", a énuméré Kofi Annan.

"Il n'y a aucune raison de croire que, petit à petit, ces disparités disparaîtront d'elles-mêmes, à mesure que les technologies répandront naturellement leurs bienfaits sur toute l'humanité", a-t-il déclaré. "Pour qu'une société de l'information ouverte et sans exclusive, qui profite à tout le monde, puisse voir le jour, il faut une détermination sans faille et des investissements suffisants", a ajouté Kofi Annan qui a appelé les dirigeants rassemblés à "mobiliser la volonté politique nécessaire."

Il s'est félicité de la présence d'un grand nombre de représentants du monde des affaires. "L'avenir du secteur des technologies de l'information dépend moins du monde développé, où les marchés deviennent saturés, que du monde en développement, où des milliards d'individus n'ont pas encore été touchés par la révolution informatique."

En ce qui concerne les organes de presse, il a rappelé que la veille, lors du Forum mondial des médias électroniques, "des professionnels de toutes les régions du monde avaient adopté une déclaration dans laquelle ils se sont engagés à agir en faveur du développement et de la cohésion sociale."

Les technologies de l'information et de la communication ne sont ni la panacée ni une formule magique "mais elles peuvent contribuer améliorer la vie de tous les habitants de la planète", a déclaré Kofi Annan. "Cependant, alors que nous évoquons le pouvoir de ces technologies, il n'est pas inutile de rappeler que c'est l'homme qui en a la maîtrise. Si la technologie façonne l'avenir, ce sont des êtres humains qui créent la technologie et décident de ses usages", a-t-il poursuivi.

"Sachons donc tirer parti des nouvelles technologies, mais restons conscients des vrais enjeux : il s'agit d'instaurer une société de l'information ouverte et dynamique, qui soit à la hauteur des défis sociaux, économiques et politiques de notre temps", a-t-il déclaré.

Il a conclu en citant une phrase d'Oppenheimer, le spécialiste américain du nucléaire qui écrivait il y un demi-siècle une phrase jugée par le Secrétaire général "étrangement prémonitoire" : "L'ouverture de la société, l'accès sans restriction au savoir et l'association spontanée et libre d'hommes soucieux de le faire progresser, c'est ce qui peut permettre à un monde technologique vaste, complexe, en expansion et en transformation constantes, toujours plus spécialisé et plus pointu, de garder son humanité."