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La cheffe du PNUE estime que la nature est l’un des moyens les plus efficaces pour lutter contre le changement climatique

Inger Andersen, Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l'environnement, lors d'une réunion à Nairobi, au Kenya.
PNUE/Cyril Villemain
Inger Andersen, Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l'environnement, lors d'une réunion à Nairobi, au Kenya.

La cheffe du PNUE estime que la nature est l’un des moyens les plus efficaces pour lutter contre le changement climatique

Climat et environnement

La nature est l’un des moyens les plus efficaces de lutter contre le changement climatique et devrait faire partie de la stratégie de chaque pays en matière de climat, selon la Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), Inger Andersen.

Les dirigeants mondiaux se réuniront aux Nations Unies à New York lundi 23 septembre lors du Sommet Action Climat convoqué par le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres. Mme Andersen sera présente au sommet pour promouvoir l'idée de solutions basées sur la nature pour lutter contre le changement climatique.

Le PNUE appuie l'une des neuf pistes d'action du sommet désignées par le Secrétaire général sous la direction des gouvernements de la Chine et de la Nouvelle-Zélande.

ONU Info a demandé à Mme Andersen comment la nature peut contribuer à inverser le changement climatique.

Le plus grand glacier des Alpes suisses, l'Aletschgletscher, fond rapidement et pourrait disparaître complètement d'ici 2100.
Geir Braathen
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Comment le changement climatique affecte-t-il le monde naturel ?

climat mondial est en train de changer rapidement et ces changements se manifestent quotidiennement. Les températures mondiales augmentent, les régimes de précipitations changent et les conditions météorologiques dans de nombreuses régions du monde sont plus erratiques et imprévisibles que jamais. Les effets sont répandus. Les habitats naturels changent, la biodiversité est en train de disparaître, les cycles agricoles sont perturbés et le stress hydrique est de plus en plus courant.

Les catastrophes naturelles telles que les inondations, les sécheresses, les ouragans et les vagues de chaleur deviennent de plus en plus extrêmes et coûtent souvent aux pays des milliards de dollars et détruisent des habitations, des infrastructures et des moyens de subsistance. La crise climatique menace le bien-être des populations, la sécurité alimentaire et l’aggravation de la pauvreté.

En juin de cette année, le Secrétaire général de l'ONU a déclaré que le monde devait créer les conditions de « l'harmonie entre l'homme et la nature ».

Qu'entend-on par une solution basée sur la nature ?

Les solutions basées sur la nature sont des actions qui protègent, gèrent durablement et restaurent des écosystèmes naturels ou modifiés, qui relèvent également des défis de société, apportant ainsi simultanément des avantages en termes de bien-être humain et de biodiversité. Ainsi, que ce soit pour la sécurité alimentaire, le changement climatique, la sécurité de l’eau, la santé humaine, le risque de catastrophe ou le développement économique, la nature peut nous aider à trouver un moyen.

Et le changement climatique est une partie très importante de la solution. Il existe de nombreuses façons de lutter contre le changement climatique, mais l’une des méthodes les plus efficaces et les plus immédiates consiste à utiliser ce qui se trouve à notre porte : la nature.

Par exemple, les solutions basées sur la nature peuvent viser à réduire les émissions résultant de la déforestation et des pratiques agricoles et à renforcer la capacité des écosystèmes naturels à éliminer le dioxyde de carbone de l'atmosphère. N'oubliez pas que c'est le dioxyde de carbone qui contribue aux gaz à effet de serre qui entraînent le réchauffement de la planète.

Le Sommet Action Climat du Secrétaire général de l’ONU offre un moment opportun pour propulser des solutions basées sur la nature au premier plan de l’action pour le climat.

Mangroves: a Super Solution

Quelle gamme de solutions sont disponibles ?

La plupart des solutions du changement climatique basées sur la nature proviennent du renforcement ou de la restauration des écosystèmes naturels existants.

Par exemple, les forêts n'absorbent pas seulement le carbone, elles nous protègent également de ses impacts les plus dévastateurs. Les espèces d'arbres soigneusement plantées peuvent servir de coupe-feu, le fait de garder les arbres à proximité des terres agricoles peut protéger les cultures des forces érosives des pluies intenses et les forêts peuvent atténuer les inondations des terres grâce à la manière dont elles absorbent l'eau. Les mangroves constituent des barrières naturelles efficaces et peu coûteuses contre les inondations côtières et l'érosion des rives. La restauration des tourbières et d’autres écosystèmes naturels est également une solution efficace basée sur la nature.

Le simple fait de modifier nos pratiques foncières pourrait permettre de réduire de 30% les émissions nécessaires pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris sur les mesures en faveur du climat à l’horizon 2030.

Quelle est leur efficacité et quel est le coût financier ?

La nature est disponible maintenant et nous devrions l'utiliser. Aucune solution technologique rapide n'a le même impact que les solutions basées sur la nature. En fait, ces solutions pourraient générer plus du tiers des réductions nécessaires d'émissions dans le monde d'ici 2030.

De manière cruciale, il faut de toute urgence accroître les investissements pour libérer le potentiel de la nature. À l'heure actuelle, ces solutions reçoivent moins de 3% du financement climatique disponible, même si elles sont extrêmement rentables. Et, elles offrent un retour sur investissement très élevé, ajoutant potentiellement des milliards de dollars à l'économie mondiale. Par exemple, la construction de la Grande Muraille, un projet ambitieux visant à inverser la désertification dans la région du Sahel en Afrique pourrait créer 10 millions d'emplois dans cette région d’ici 2030 et avoir d’autres avantages, notamment un ralentissement de la migration.

Ces solutions doivent être intégrées aux efforts d'adaptation et d'atténuation du changement climatique. À l'échelle mondiale, les gouvernements doivent aligner leurs efforts et s'engager à investir dans ces solutions dans le cadre de leurs politiques nationales.

Quelle est l’importance des solutions basées sur la nature dans la lutte globale contre le changement climatique ?

Nous ne pouvons pas limiter le réchauffement à 1,5 degré Celsius (ou 2 degrés Celsius) sans solutions climatiques naturelles. Les solutions basées sur la nature ont le potentiel de réduire les émissions de dioxyde de carbone de 12 gigatonnes par an. Cela équivaut à peu près aux émissions de toutes les centrales au charbon du monde.

Dans le même temps, il est important de garder à l’esprit, tout d’abord, que l’ambition croissante nous oblige à nous engager simultanément dans une transition énergétique et des investissements plus importants dans la nature. Et deuxièmement, si nous n’agissons pas maintenant sur la nature, sa capacité à protéger l’humanité diminuera encore plus.

La nature est donc là comme solution pour l'action climatique, mais nous devons saisir le moment. La bonne nouvelle, c’est que la nature nous pardonne et il est temps que nous lui donnions la chance qu’elle mérite.

Au Bélarus, les tourbières sont en train d'être revitalisées et agissent comme des puits de carbone efficaces.
PNUD Belarus
Au Bélarus, les tourbières sont en train d'être revitalisées et agissent comme des puits de carbone efficaces.

Y a-t-il suffisamment de projets actuellement à l'échelle mondiale pour faire la différence ?

Nous sommes dans une période d’urgence mondiale, mais aussi dans une période d’élan sans précédent. Les jeunes nous demandent des comptes et chaque semaine, un gouvernement s'engage dans l'action climatique. Les solutions basées sur la nature sont immédiatement disponibles, rentables et peuvent être étendues en fonction des besoins. Et tous les pays du monde peuvent agir.

Et nous avons de nombreux exemples de réussite. Lorsque la Grande Muraille Verte sera achevée en 2030, les terres restaurées absorberont le dioxyde de carbone équivalant au fait d’avoir toutes les voitures californiennes au parking pendant 3 ans et demi. Au Niger, le reboisement mené par les agriculteurs a amélioré la couverture forestière, réduisant le temps de collecte du bois de chauffage des femmes de trois heures à 30 minutes. Et la ville de Medellin, en Colombie, a réduit les températures de plus de 2 degrés Celsius en transformant ses jungles de béton en forêts urbaines.

Nous devons donc intensifier de telles initiatives, tirer parti de l’élan politique et obtenir des résultats à la vitesse et au rythme nécessaires pour dépasser les ambitions de l’Accord de Paris. En effet, lorsque nous donnons une chance à la nature, nous avons de meilleures chances d’atteindre les objectifs de développement durable.