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L'ouverture, maître mot du succès des élections en Iraq, selon l'Envoyé de l'ONU

L'ouverture, maître mot du succès des élections en Iraq, selon l'Envoyé de l'ONU

Ahraf Qazi, Représentant spécial pour l'Iraq
La préparation des élections prévues pour le 30 janvier 2005 se poursuit selon le calendrier, indique le dernier rapport du Secrétaire général présenté aujourd'hui au Conseil de sécurité par le Représentant spécial pour l'Iraq, pour qui il est essentiel que les élections fournissent une plateforme à l'expression de toutes les nuances de l'opinion politique iraquienne et qui indique poursuivre des consultations à cet effet.

« L'élection à venir constituera un test du nouvel ordre politique et du processus de transition » en Iraq, a déclaré ce matin le Représentant spécial du Secrétaire général pour l'Iraq, Ashraf Jehangir Qazi, qui présentait le dernier rapport du Secrétaire général au Conseil de sécurité réuni pour une séance sur la situation en Iraq.

« Le peuple iraquien attend encore l'occasion d'exercer ses droits politiques par la voie des urnes. Or, bien qu'il y ait manifestement une volonté partagée chez les Iraquiens de participer aux élections, d'importantes catégories de la population se sentent encore aliénées ou exclues de la transition politique », a-t-il affirmé.

Au cours des trois derniers mois, « l'ONU a poursuivi activement ses efforts pour engager un dialogue avec un vaste éventail de l'opinion iraquienne, y compris hors des courants dominants, dans le but de comprendre leurs besoins et aspirations et de les encourager à participer au processus politique », a indiqué Ashraf Qazi, précisant qu'il avait parallèlement encouragé le Gouvernement provisoire iraquien à toucher l'auditoire le plus large possible et que ce dernier y avait répondu.

« Un processus ouvert et inclusif sera la meilleure garantie d'une transition réussie », a estimé le Représentant spécial.

Il a aussi engagé à ce que les futures élections « fournissent une plateforme à l'expression de toutes les nuances de l'opinion politique iraquienne et à ce qu'elles permettent une représentation adéquate des iraquiens de toutes origines ethniques ou religieuses ainsi que des membres de la société civile et de personnalités indépendantes ».

Ashraf Qazi a par ailleurs souligné l'état « difficile » de la situation sécuritaire, alors que « des actes de violence de toutes sorte, la plupart d'une extrême brutalité et frappant sans discrimination » touchent au premier lieu, « comme toujours », les civils.

« De par nos contacts avec presque tous les secteurs de la société iraquienne, nous sommes convenus que la violence fait horreur à une majorité écrasante de la population iraquienne », a-t-il souligné, ajoutant que « le souhait de trouver des solutions politiques aux problèmes politiques » était largement partagé par tous les Iraquiens, « à l'exception de quelques extrémistes irréductibles ».

Par ailleurs, a souligné Ashraf Qazi, « parce que la future assemblée nationale intérimaire sera aussi l'assemblée constituante, il est important qu'elle soit jugée suffisamment représentative par tous les éléments de la société iraquienne ».

« Il n'y a donc pas d'alternative au succès d'une élection nationale inclusive », a affirmé le Représentant spécial.

Or, « la tenue d'élections libres et équilibrées menées par une commission électorale indépendante n'a pas fait partie, jusqu'à présent, de la vie politique iraquienne ». Il est donc important que les Iraquiens fassent tout leur possible pour participer aux élections, en dépit de l'insécurité, a-t-il souligné.

« Ceux qui choisissent de se tenir à l'écart ou qui cherchent à saper ce processus de transformation ne rendent service ni à eux-mêmes ni à leur pays » a affirmé Ashraf Qazi.

Le Représentant spécial a toutefois noté que « l'opinion politique demeurait très polarisée », faisant écho au fait que si l'opinion générale était de tenir l'élection à la date prévue, soit à la fin du mois de janvier, certains avaient appelé au boycott et d'autres à un report.

Interrogé, lors d'une conférence tenue à l'issue des consultations du Conseil de sécurité, sur les contacts menés auprès des groupes nationalistes arabes, Ashraf Qazi a souligné que le mandat de l'ONU était de promouvoir le dialogue et que son équipe avait été en contact avec ces groupes.

« Nous espérons qu'ils participeront à l'élection », pour ceux qui sont prêts à abandonner les armes et qui ne sont pas des terroristes, a-t-il souligné, précisant qu'ils avaient « leur liste d'exigences » et qu'il existait un niveau élevé de méfiance.

« Il est réconfortant de voir que les partisans de Moqtadah al-Sadr ont accepté d'abandonner les armes et de se rallier au processus politique ». « C'est un des deux principaux représentants qu'il me reste à rencontrer », avec l'Ayatollah Ali Al Sistani », a-t-il indiqué.

Répondant à un journaliste qui demandait si la situation sécuritaire permettrait la tenue des élections, le Représentant spécial a estimé que l'ouverture politique aurait précisément pour effet de réduire le nombre d'opposant prêts à agir par la force, et que le nombre très élevé de bureaux de vote permettrait d'accroître le sentiment de sécurité. Il a ajouté que l'insécurité en Iraq était concentrée dans certaines régions, et qu'elle ne touchait pas tout le territoire.

« Il est donc réaliste de penser que l'élection aura lieu selon le calendrier », a-t-il précisé, ajoutant que « tous les sondages révélaient un large enthousiasme pour les élections ».

Interrogé également sur le « mantra » invoqué par l'ONU pour maintenir un personnel réduit en Iraq, qui est prête à accroître sa présence « si les circonstances en matière de sécurité le permettent », Ashraf Qazi a estimé que cette exigence était parfaitement valide, et que l'accroissement du personnel mettrait plutôt en danger la mission de l'ONU. Il est cependant prévu d'ouvrir des bureaux à Erbil et à Bassorah, a-t-il précisé.

Il a par ailleurs estimé que le personnel international sur place était effectivement en mesure d'assister la Commission électorale indépendante et qu'il serait en nombre suffisant pour l'aider lors des élections.

Devant le Conseil de sécurité, Ahraf Qazi a par ailleurs appelé à un renforcement de l'engagement régional et international, rappelant les efforts déjà accomplis lors de la Conférence de Charm el-Cheikh sur la situation au Moyen-Orient (voir notre dépêche du 23 novembre 2004), à la conférence de Téhéran (voir notre dépêche du 1er décembre 2004), qui a conduit à des accords de coopération entre les ministères de l'Intérieur des pays voisins de l'Iraq et par la décision du Club de Paris de réduire de façon significative la dette extérieure du pays.

Il a enfin appelé à poursuivre le soutien à la Commission électorale indépendante iraquienne, au regard des défis qui attendent l'Iraq l'année prochaine, à savoir l'élection d'une assemblée nationale intérimaire, l'organisation d'un référendum constitutionnel et d'élections générales dans le cadre de la nouvelle constitution.

A cet égard, le rapport du Secrétaire général rappelle qu'en Iraq, l'ONU conseille et épaule la Commission électorale indépendante iraquienne, seule compétente pour ce qui est de la surveillance, de l'organisation et de la tenue des élections de la transition.

« En vertu de la loi administrative transitoire, les prochaines élections auront pour objet d'élire l'Assemblée nationale de transition, les conseils de gouvernorat et l'Assemblée nationale du Kurdistan. À l'issue des élections, l'Assemblée nationale doit élaborer le projet de Constitution permanente pour le 15 août 2005 au plus tard, afin qu'elle soit soumise à un référendum général qui doit avoir lieu le 15 octobre 2005 » indique le rapport qui précise que si la constitution est approuvée lors du référendum, des élections doivent avoir lieu le 15 décembre 2005 au plus tard pour élire un gouvernement permanent.

Selon le rapport du Secrétaire général, “La préparation technique des élections », dont la Commission électorale iraquienne a annoncé qu'elles étaient prévues pour le 30 janvier 2005, « se poursuit selon le calendrier ».

Pour sa part, le Représentant de l'Iraq, M. Samir Sumaida'ie, a indiqué devant le Conseil de sécurité que bien que son Gouvernement soit « manifestement pleinement conscient et préoccupé de la situation sécuritaire », il estimait avoir « une obligation juridique et politique envers le peuple iraquien – une obligation dont nous avons l'intention de nous acquitter, et dans toute la mesure du possible, dans les temps impartis ».

imageRetransmission de la séance du Conseil de sécurité [32 mins]

imageRetransmission de la conférence de presse d'Ashraf Qazi [30 mins]