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Massacre de Gatumba : implication probable des Forces nouvelles de libération, selon un rapport de l'ONU

Massacre de Gatumba : implication probable des Forces nouvelles de libération, selon un rapport de l'ONU

Les ruines du camp de Gatumba, au Burundi (archives)
Le rapport conjoint des missions de l'ONU en RDC et au Burundi sur le massacre de Gatumba conclut, malgré les incertitudes, que l'organisation rebelle burundaise « Forces nouvelles de libération » a probablement participé à l'attaque et recommande au Conseil de sécurité d'encourager l'ouverture de poursuites judiciaires à la fois par le gouvernement du Burundi et par la Cour pénale internationale.

L'Opération des Nations Unies au Burundi (ONUB), la Mission des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) et le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme ont rendu public aujourd'hui leur rapport conjoint sur le massacre de réfugiés qui s'est produit à Gatumba le 13 août 2004.

Ce rapport, établi à la demande du Conseil de sécurité, qui le 15 août dernier avait demandé aux Représentants spéciaux du Secrétaire général au Burundi et en République démocratique du Congo (RDC) de mener immédiatement une enquête conjointe sur le massacre, a été transmis le 15 octobre au Conseil de sécurité par le Secrétaire général, et rendu public aujourd'hui.

Dans la nuit du 13 août 2004, un centre de transit bénéficiant de l'assistance du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et abritant des réfugiés congolais et des rapatriés burundais à Gatumba, dans la province de Bujumbura au Burundi, avait été brutalement attaqué par un groupe important d'hommes armés ».

Au total, 152 réfugiés congolais des communautés tutsies du Sud-Kivu, connus sous le nom de Banyamulenge, ont été tués, 106 ont été blessés et 8 sont toujours portés disparus.

L'enquête menée pendant près d'un mois a permis d'établir « les faits » mais l'équipe n'a pas été en mesure d'identifier « les organisateurs, les exécutants et les commanditaires » du massacre, explique le rapport conjoint.

Ce dernier conclut que le Parti pour la libération du peuple hutu-Forces nationales de libération (PALIPEHUTU-FNL) – le seul groupe rebelle burundais ayant revendiqué la responsabilité du massacre - « a probablement participé à l'attaque », sans toutefois donner une idée précise « de la nature et de la portée de leur rôle probable ».

Les témoignages des survivants de l'attaque mais aussi les alliances passées entre groupes armés de la région et les doutes quant à la capacité des FNL de mener cette opération sans appui extérieur « donnent à penser que d'autres groupes ou individus présents dans la région ont pu jouer un rôle important » précisent encore les représentants spéciaux pour le Burundi et la RDC.

Ces derniers exposent par ailleurs que les conclusions de l'enquête sont fondées sur des éléments de preuve que l'équipe des Nations Unies a recueilli au cours du mois suivant le massacre. Or, parce que les lieux du massacre ont été fortement contaminés avant l'arrivée de l'équipe et que les corps des victimes ont été enterrés sans analyse médico-légale, « une grande partie de ces preuves a été perdue ».

Néanmoins, les équipes de l'ONUB, de la MONUC et du Haut Commissariat aux droits de l'homme estiment que « des informations suffisantes ont été recueillies pour justifier la poursuite d'une enquête judiciaire » aussi bien au niveau national, menée par le gouvernement du Burundi avec l'entière coopération de la RDC et du Rwanda, et au niveau international, menée par le Cour pénale internationale (CPI).

Le rapport conclut par ailleurs que « l'attaque visait manifestement les Banyamulenge et répondait de toute évidence à des motivations ethniques et politiques » expliquant que « nombre de groupes armés opérant dans l'est de la RDC et dans la région frontalière du Burundi nourrissent de vifs ressentiments à l'égard de ce groupe et d'autres pourraient avoir des raisons politiques d'empêcher son retour en RDC ».

En outre, l'équipe a constaté que « des groupes armés opérant dans l'est de la RDC et au Burundi et impliqués dans des massacres de civils avaient pour habitude de collaborer de manière ponctuelle en fonction d'intérêts financiers et aux fins de trafic d'armes sans guère se préoccuper de considérations politiques ou idéologiques ».