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Une femme arrive dans un centre d'accueil soutenu par l'OIM en Haïti après avoir été expulsée du Texas, aux Etats-Unis, en 2021.

Des experts de l’ONU dénoncent l’expulsion collective d'Haïtiens dans les Amériques

OIM Haïti
Une femme arrive dans un centre d'accueil soutenu par l'OIM en Haïti après avoir été expulsée du Texas, aux Etats-Unis, en 2021.

Des experts de l’ONU dénoncent l’expulsion collective d'Haïtiens dans les Amériques

Droits de l'homme

Des experts indépendants des Nations Unies ont appelé, vendredi, des Etats des Amériques et des Caraïbes à suspendre les retours forcés et à adopter des mesures pour protéger les Haïtiens en déplacement, après que 36.000 personnes d’origine haïtienne ont été déportées au cours des trois premiers mois de cette année.

Dans une déclaration publiée vendredi dans le cadre de sa procédure d’alerte rapide et d’action urgente, le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) s’est déclaré profondément préoccupé par les expulsions collectives d’Haïtiens sans évaluation appropriée des besoins de protection de chaque cas individuel.

Les experts indépendants onusiens pointent ainsi du doigt le sort des femmes enceintes, des nouveau-nés, des enfants non accompagnés ou des victimes de la traite des êtres humains.

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Selon les rapports de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), de janvier à novembre 2022, près de 22.000 Haïtiens ont été rapatriés, dont près de 15.000 par les États-Unis. Le CERD affirme que l’ampleur de l’expulsion augmente rapidement cette année.

Des personnes d’origine haïtienne victimes de torture

Les chiffres de l’OIM montrent que 36.000 personnes d’origine haïtienne ont été rapatriées par voie aérienne, terrestre et maritime de janvier à mars, dont environ 90% ont été expulsées de la République dominicaine.

Compte tenu de la situation désastreuse en Haïti, qui ne permet pas actuellement un retour sûr et digne des Haïtiens dans le pays, le Comité a demandé qu’il soit mis fin aux expulsions collectives des Haïtiens en déplacement.

Selon le CERD, chaque cas individuel doit être évalué afin d’identifier les besoins de protection conformément au droit international relatif aux réfugiés et aux droits de l’homme.

C’est dans ce contexte que des pays des Caraïbes, tels que les Bahamas et les îles Turks et Caicos, ont annoncé des mesures de répression à l’encontre des migrants haïtiens sans papiers. En janvier, les États-Unis ont également rendu publiques de nouvelles politiques frontalières permettant des expulsions accélérées vers le Mexique de migrants haïtiens et d’autres personnes traversant la frontière sud des États-Unis.

Autre facteur gravement préoccupant pour les experts indépendants de l’ONU, le fait que des personnes d’origine haïtienne seraient victimes d’un usage excessif de la force, de traitements cruels, inhumains et dégradants, et de profilage racial de la part des forces de l’ordre de certains États parties de la région des Amériques.

Chaque cas individuel doit être évalué afin d’identifier les besoins de protection conformément au droit international relatif aux réfugiés et aux droits de l’homme

Pour autant, les défenseurs  demandent aux États parties des Amériques d’enquêter sur ces allégations, mais aussi sur d’autres allégations de violations des droits de l’homme et d’abus commis par des acteurs étatiques et non étatiques, notamment aux frontières, dans les centres de détention de migrants et le long des routes migratoires.

Des discours de haine

Le Comité s’est aussi alarmé des allégations de violations des droits de l’homme et d’abus commis à l’encontre des Haïtiens en déplacement aux frontières, dans les centres de détention de migrants, ainsi que le long des routes migratoires périlleuses dans la région des Amériques, en raison du contrôle strict des migrations, de la militarisation des frontières, des politiques systématiques de détention de l’immigration et des obstacles à la protection internationale dans certains États parties de la région des Amériques.

De tels obstacles exposent ces migrants à « des atteintes à leur vie et à leur sécurité, des meurtres, des disparitions, des actes de violence sexuelle et sexiste, et à la traite par des réseaux criminels », a averti le Comité.

Le Comité a également été alarmé par l’augmentation signalée des discours de haine et des violences racistes ou xénophobes à l’encontre des Haïtiens en déplacement, y compris de la part de personnalités publiques et d’acteurs politiques.

Le CERD a donc demandé que des mesures soient prises pour prévenir et combattre la violence xénophobe et raciste et l’incitation à la haine raciale à l’encontre des personnes d’origine haïtienne et pour condamner publiquement les discours de haine raciste, y compris ceux prononcés par des personnalités publiques et des hommes politiques.

La procédure d’alerte précoce et d’action urgente du CERD, prévue par la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, vise principalement à examiner les situations susceptibles de dégénérer en conflits afin de prendre les mesures préventives appropriées pour éviter des violations massives des droits de l’homme.