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Des gens protestent contre le coup d'État militaire au Myanmar (photo d'archives).

Myanmar : deux ans après le coup d’État, une régression inimaginable, selon l’ONU

© Unsplash/Saw Wunna
Des gens protestent contre le coup d'État militaire au Myanmar (photo d'archives).

Myanmar : deux ans après le coup d’État, une régression inimaginable, selon l’ONU

Droits de l'homme

Deux ans après le coup d’État des militaires, le Myanmar fait face à une régression inimaginable, a fustigé vendredi le chef des droits de l’homme de l’ONU.

Selon le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme (HCDH), le pays s’est enfoncé plus profondément que jamais dans la crise et a subi une régression totale des droits de l’homme.

« Selon presque toutes les mesures possibles, et dans tous les domaines des droits de l’homme - économiques, sociaux et culturels, mais aussi civils et politiques - le Myanmar a profondément régressé », a déclaré le Haut-Commissaire Volker Türk, en évoquant la spirale de la crise depuis la tentative de coup d’État du 1er février 2021.

Loin d’être épargnés, les civils ont été les véritables cibles des attaques - victimes de barrages d’artillerie et de frappes aériennes ciblés et aveugles, d’exécutions extrajudiciaires, du recours à la torture et de l’incendie de villages entiers. « En cette période sombre, je tiens à reconnaître le courage de tous ceux qui ont perdu la vie dans la lutte pour la liberté et la dignité au Myanmar », a-t-il ajouté.

Depuis le coup d’État, les militaires ont emprisonné les dirigeants démocratiquement élus du pays et, dans les mois qui ont suivi, ont détenu plus de 16.000 autres personnes. La plupart des détenus font l’objet « d’accusations spécieuses devant des tribunaux contrôlés par les militaires, en violation flagrante des droits à une procédure régulière et à un procès équitable, liée à leur refus d’accepter les actions des militaires ».

Des manifestants contre le coup d'Etat militaire au Myanmar (photo d'archives).
Unsplash/Pyae Sone Htun
Des manifestants contre le coup d'Etat militaire au Myanmar (photo d'archives).

Près de 2.900 morts depuis le putsch

Selon des sources crédibles, au moins 2.890 personnes sont mortes aux mains de l’armée et d’autres personnes travaillant avec elle, dont au moins 767 avaient été initialement placées en détention. « Il s’agit très certainement d’une sous-estimation du nombre de civils tués à la suite d’une action militaire », a détaillé M. Türk.

En outre, 1,2 million de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays et plus de 70.000 ont quitté le pays, rejoignant ainsi plus d’un million d’autres personnes, dont la majeure partie de la population musulmane rohingya, qui a fui les persécutions et les attaques dont elle a été victime au cours des dernières décennies.

Pour le chef des droits de l’homme de l’ONU, « les responsables des attaques quotidiennes contre les civils et des violations des droits humains doivent rendre des comptes ». « Comment une armée qui prétend défendre le pays peut-elle avoir amené son propre peuple - issu de toutes les composantes de la société riche et diversifiée du Myanmar - à un tel point de désespoir ? »

Par ailleurs, des informations crédibles indiquent que plus de 34.000 structures civiles, dont des maisons, des cliniques, des écoles et des lieux de culte, ont été brûlées au cours des deux dernières années. L’économie du Myanmar s’est effondrée et près de la moitié de la population vit désormais sous le seuil de pauvreté.

L’ONU exige la libération de tous les prisonniers politiques

Pour sortir de cette « situation catastrophique, mais aussi d’une aggravation des souffrances humaines et des violations des droits au quotidien », M. Türk en appelle aux dirigeants régionaux et à toute la communauté internationale. « Deux des conditions critiques qui ont été convenues - cesser toute violence et permettre l’accès humanitaire - n’ont pas été respectées. En fait, nous avons constaté le contraire. La violence est devenue incontrôlable et l’accès humanitaire a été sévèrement restreint ».

Le Haut-Commissaire a souligné d’autres mesures qui seraient cruciales pour jeter les bases politiques de la résolution de la crise. Il s’agit notamment de la libération de tous les prisonniers politiques, y compris la Conseillère d’État Aung San Suu Kyi et le Président U Win Myint, comme l’a demandé le Conseil de sécurité des Nations Unies.

Le chef des droits de l’homme de l’ONU préconise également un dialogue inclusif avec toutes les parties - impliquant à la fois le Président de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN ou ANASE) et l’Envoyé spécial des Nations Unies.

« Après l’adoption le mois dernier de la résolution du Conseil de sécurité exigeant la fin immédiate de la violence, il est maintenant temps que le monde s’unisse pour prendre des mesures communes afin de mettre un terme à la tuerie, de protéger le peuple du Myanmar et de garantir le respect de ses droits humains universels », a insisté M. Türk.