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Un volontaire aide les réfugiés nouvellement arrivés à débarquer d'un grand canot pneumatique, sur l'île de Lesbos, dans la région de l'Égée du Nord (photo d'archives).

L’ONU réclame l’abandon de toutes les charges contre les humanitaires jugés en Grèce

© UNICEF/Ashley Gilbertson VII Photo
Un volontaire aide les réfugiés nouvellement arrivés à débarquer d'un grand canot pneumatique, sur l'île de Lesbos, dans la région de l'Égée du Nord (photo d'archives).

L’ONU réclame l’abandon de toutes les charges contre les humanitaires jugés en Grèce

Droits de l'homme

Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme (HCDH) a demandé, vendredi 13 janvier, à la justice grecque d’abandonner toutes les accusations retenues contre 24 humanitaires portant secours aux migrants et dont le procès se déroule actuellement sur l’île de Lesbos en Grèce.

« Nous réitérons notre appel pour que les charges contre les 24 soient abandonnées », a affirmé Elizabeth Throssell, une porte-parole du Haut-Commissariat, lors du briefing régulier de l’ONU à Genève.

Pour les services du Haut-Commissaire Volker Türk, les charges sont liées à leurs actions de sauvetage de migrants en mer et comprennent plusieurs délits présumés liés à la facilitation du trafic de migrants.

Ce genre de procès est vraiment inquiétant, parce qu’il criminalise les actions qui sauvent la vie des gens et crée un précédent dangereux

Le procès de 24 travailleurs humanitaires accusés de trafic d’êtres humains et d’espionnage a débuté mardi 10 janvier. Ils sont aujourd’hui accusés par Athènes d’être l’équivalent de passeurs et risquent jusqu’à 25 ans de prison, selon les rapports des médias.

Le Bureau des droits de l’homme des Nations Unies note d’ailleurs que lors de l’audience de ce vendredi matin à Mytilini sur Lesbos, où se déroule le procès, l’accusation a recommandé l’annulation de certaines des charges.

« Nous nous félicitons de cette évolution, mais nous réitérons notre appel à l’abandon de toutes les charges contre tous les accusés », a ajouté Mme Throssell.

Des volontaires aident des réfugiés et migrants arrivant sur l'île grecque de Lesbos (photo d'archives).
© UNICEF/Ashley Gilbertson
Des volontaires aident des réfugiés et migrants arrivant sur l'île grecque de Lesbos (photo d'archives).

« Un précédent dangereux »

Parmi ces accusés, qui travaillaient pour une ONG de secours aux migrants débarquant à Lesbos depuis les côtes turques voisines, figure la réfugiée syrienne Sarah Mardini, qui a inspiré avec sa sœur nageuse olympique le film diffusé sur Netflix « Les Nageuses », qui  retrace leur périple entre la Syrie et l’Allemagne.

Pour l’entité onusienne, « ce genre de procès est vraiment inquiétant, parce qu’il criminalise les actions qui sauvent la vie des gens et crée un précédent dangereux ».

« En effet, il y a déjà eu un effet paralysant, avec des défenseurs des droits humains et des organisations humanitaires contraints d’interrompre leur travail en faveur des droits humains en Grèce et dans d’autres pays de l’UE », a détaillé la porte-parole du HCDH.

Les personnes jugées étaient toutes membres ou bénévoles d’une ONG grecque appelée Emergency Response Centre International ou ERCI, qui a aidé plus d’un milliers de personnes à se mettre en sécurité et a fourni aux survivants une assistance médicale et autre sur l’île grecque de Lesbos de 2016 à 2018. 

Depuis lors, l’ERCI a été contraint de mettre fin à ses activités, tandis que les accusés sont confrontés à la perspective d’être jugés depuis plus de quatre ans.

Une réfugiée syrienne âgée de 8 ans dans un camp ouvert par des bénévoles près de Mytilini, à Lesbos, en Grèce.
Photo UNICEF/Gilbertson VII Photo

Les dangers d’une criminalisation du sauvetage en mer des migrants

Or selon le HCDH, sauver des vies et fournir une assistance humanitaire ne devrait jamais être criminalisé ou poursuivi en justice.

« Ces actions sont, tout simplement, un impératif humanitaire et de droits de l’homme », insistent les services du Haut-Commissaire Volker Türk.

Plus largement, le Bureau des droits de l’homme des Nations Unies s’inquiète également du fait que depuis longtemps, la législation contre le trafic de migrants dans un certain nombre de pays européens est utilisée pour criminaliser à la fois les migrants et ceux qui les aident.

Mais pour l’ONU, la lutte contre le trafic de migrants repose en définitive sur l’amélioration des voies sûres pour la migration régulière.

Malgré le besoin crucial d’une aide pour sauver des vies en Méditerranée orientale, où près de 500 migrants sont morts ou disparus depuis 2021 selon l’Organisation internationale pour les migrations, aucune organisation civile de recherche et de sauvetage n’opère actuellement en Grèce, regrette le HCDH.