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Le Secrétaire général de l'ONU António Guterres (3e à partir de la droite à table) s'adresse à une réunion du Conseil de sécurité sur le multilatéralisme.

Dans un monde divisé, le chef de l’ONU insiste sur l’importance du multilatéralisme et la nécessité de le réformer

Photo ONU/Loey Felipe
Le Secrétaire général de l'ONU António Guterres (3e à partir de la droite à table) s'adresse à une réunion du Conseil de sécurité sur le multilatéralisme.

Dans un monde divisé, le chef de l’ONU insiste sur l’importance du multilatéralisme et la nécessité de le réformer

Paix et sécurité

Lors d’un débat au Conseil de sécurité, mercredi, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a souligné combien le multilatéralisme était important dans un monde divisé et confronté à l’évolution considérable des conflits.

Selon le chef de l’ONU, le système international créé après la Seconde Guerre mondiale a réussi à prévenir un conflit militaire entre grandes puissances : les États dotés d’armes nucléaires ont coopéré pour réduire leur nombre, prévenir la prolifération et éviter une catastrophe nucléaire, en même temps que le rétablissement et le maintien de la paix par les Nations Unies ont aidé à mettre fin aux conflits et à sauver des millions de vies.

Mais malgré ces progrès importants, la communauté internationale est toujours aux prises avec nombre de défis depuis 76 ans : guerres interétatiques, limites du maintien de la paix, terrorisme, système de sécurité collective divisé, évolution spectaculaire des conflits, dans le même temps que les armes létales sont de moins en moins chères et de plus en plus sophistiquées, donnant à l’humanité aujourd’hui, la capacité de s’anéantir entièrement. 

À cela, s’ajoutent la crise climatique, qui contribue désormais aux conflits de multiples façons, les implications négatives des technologies numériques qui se multiplient, la désinformation et les discours de haine qui empoisonnent le débat démocratique et alimentent l’instabilité sociale, a noté le Secrétaire général.

Par ailleurs, de nombreux éléments de la vie moderne deviennent des armes : le cyberespace, les chaînes d’approvisionnement, les migrations, l’information, les services commerciaux et financiers et les investissements. Or, les cadres de coopération mondiale n’ont pas suivi cette évolution, à tel point qu’aujourd’hui, les problèmes deviennent rapidement polarisants, exigeant une mise à jour de la boîte à outils, des normes et approches de la communauté internationale. 

Un Nouveau programme pour la paix

En réponse à tous ces défis et dans le cadre de son rapport « Notre programme commun », le Secrétaire général a dit proposer un Nouveau programme pour la paix, qu’il espère soumettre aux États Membres en 2023. Ce dernier adoptera une vision large et à long terme et abordera toute la gamme des défis sécuritaires connus et émergents auxquels la communauté internationale est confrontée, qu’ils soient locaux, nationaux, régionaux et internationaux. 

Cet ordre du jour examinera les moyens de mettre à jour les outils existants de médiation, de maintien de la paix, de consolidation de la paix et de lutte contre le terrorisme. Il analysera également les menaces nouvelles et émergentes dans des domaines moins traditionnels, notamment le cyberespace et l’espace extra-atmosphérique et identifiera les liens entre de nombreuses formes de vulnérabilité, les droits de l’homme, la fragilité des États et le déclenchement de conflits.

Le Secrétaire général a ensuite relevé qu’une majorité d’États Membres a désormais conscience que le Conseil de sécurité devrait être réformé pour refléter les réalités géopolitiques contemporaines. 

Il a dit être prêt à apporter le soutien nécessaire à cette fin, observant aussi que le Conseil tire déjà parti des nouvelles méthodes de travail mises en place, notamment des débats publics et des mécanismes informels. Le Secrétariat se tient également prêt à apporter son soutien à toute décision visant à rationaliser les pratiques de l’Assemblée générale, en matière de résolutions, de présentation de rapports, de fonctionnement des commissions ou de renforcement des travaux de la semaine de haut niveau.

Csaba Kőrösi, Président de l'Assemblée générale des Nations Unies, s'adresse à une réunion du Conseil de sécurité sur le multilatéralisme.
Photo ONU/Loey Felipe
Csaba Kőrösi, Président de l'Assemblée générale des Nations Unies, s'adresse à une réunion du Conseil de sécurité sur le multilatéralisme.

Questions existentielles

De son côté, le Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, Csaba Kőrösi, a déclaré que le monde se trouvait à un tournant décisif pour le multilatéralisme.

Selon lui, les règles, instruments et institutions qui ont guidé les relations entre États pendant plus de 75 ans sont aujourd’hui confrontés à des questions profondes, voire existentielles. Alors que le monde émerge de la pandémie de COVID-19 et qu’il est aux prises avec les crises climatiques, la dette, les urgences alimentaires et énergétiques, une chose est sûre : ces défis mondiaux sont bien trop colossaux pour qu’une nation, à elle seule, puisse les juguler, a dit M. Kőrösi. 

Notre seul espoir consiste à rechercher une solution multilatérale, conformément à la Charte des Nations Unies et au droit international, a-t-il ajouté, rappelant que les mesures prises à l’ONU ont des effets sur huit milliards de personnes. 

Le Président a critiqué l’inaction de l’Assemblée générale et, plus fréquemment, celle du Conseil de sécurité. Trop souvent, a-t-il commenté, de graves clivages géopolitiques ont empêché des réponses et des progrès au sein du Conseil. 

Le multilatéralisme doit et peut mieux fonctionner, a fait valoir M. Kőrösi, indiquant que les 193 États Membres de l’ONU ont des attentes par rapport aux 15 membres du Conseil de sécurité. Il a salué le fait que le Conseil a été en mesure, la semaine dernière, d’établir une exemption humanitaire pour tous les régimes de sanctions. Toutefois, il a déploré le fait que depuis le début de la guerre en Ukraine, pas une seule résolution n’a été adoptée par le Conseil pour alléger la crise. L’Assemblée générale s’est vue obligée d’agir lorsque les décisions ont été bloquées par le Conseil. 

M. Kőrösi a indiqué, dans ce contexte, que l’initiative de l’Assemblée sur le veto avait ouvert « une grande porte pour une nouvelle forme de collaboration et de reddition de comptes ». Il a annoncé qu’il convoquerait en 2023 un débat formel sur l’utilisation du veto pour permettre aux États Membres de mener une réflexion sur la manière dont les deux organes pourraient œuvrer de concert, dans le cadre de leurs fonctions respectives, en appui à la paix et à la prospérité.