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Des jeunes Haïtiens se rencontrent autour du sport et de l'artisanat

Des jeunes sont réunis lors d'un événement jeunesse dans la capitale d'Haïti, Port-au-Prince.
ONU Haiti/Jonathan Boulet-Groulx
Des jeunes sont réunis lors d'un événement jeunesse dans la capitale d'Haïti, Port-au-Prince.

Des jeunes Haïtiens se rencontrent autour du sport et de l'artisanat

Paix et sécurité

Des jeunes Haïtiens en provenance des quartiers de la capitale Port-au-Prince où la violence et les gangs font la loi se sont rencontrés récemment afin de partager leurs expériences et de s’engager dans des activités sportives et entrepreneuriales. 

La rencontre qui a réuni environ 1.500 jeunes s’est faite dans le cadre du projet Semans Lapè (Semences de la paix) soutenu par le Fond des Nations Unies pour la consolidation de la paix.

Des produits artisanaux, y compris des boucles d'oreilles, sont exposés lors d'un événement jeunesse à Port-au-Prince, en Haïti.
ONU Haiti/Jonathan Boulet-Groulx
Des produits artisanaux, y compris des boucles d'oreilles, sont exposés lors d'un événement jeunesse à Port-au-Prince, en Haïti.

Rosemonde * (23 ans)

« J’habite à Cité Soleil qui est sous le contrôle des gangs. Il n’y a qu’une seule route pour sortir de mon quartier. Après la pluie cette route est souvent sous les eaux ou est encombrée de déchets, il est donc difficile pour moi de participer aux activités hors du quartier. Je ne suis pas vraiment bien dans ma peau là où j’habite. 

Ma mère n’est pas à la maison pour l’instant. J’ai 6 frères et sœurs. Je suis l'ainée, donc je fais ce que je peux pour prendre soin de moi et de ma famille. Je fais de l’artisanat, comme des boucles d’oreilles. Lorsque j’arrive à participer aux activités de cette envergure qui rassemble tant de gens, ça me donne enfin la possibilité de communiquer avec les autres, je peux vivre et agir normalement. Je suis venue pour profiter de la vie. 

J’aurais souhaité que mon quartier soit ainsi, j’aurais souhaité qu’il y ait la paix ». 

De jeunes entrepreneurs présentent leurs produits lors d'un événement jeunesse à Port-au-Prince, en Haïti.
ONU Haiti/Jonathan Boulet-Groulx
De jeunes entrepreneurs présentent leurs produits lors d'un événement jeunesse à Port-au-Prince, en Haïti.

Samentha (22 ans)

« Je suis une entrepreneure. Je prépare de la confiture et du beurre de cacahuète ainsi que d’autres produits chez moi à Saint Martin. J’ai appris à les préparer dans une formation que j’avais suivie. J’aurai aimé vendre dans les boutiques locales, mais pour ce faire il me faut plus d’investissement. Pour le moment je les vends dans mon quartier.

Les jeunes d'Haïti veulent avancer mais il est difficile de trouver de l’aide, surtout en l'absence d’un système de support social qui fonctionne. Les jeunes sont sur l’emprise du stress, donc se rencontrer aujourd’hui pour moi c’est une bonne chose, car cela les aidera à voir qu’ils ne sont pas trop différents des personnes vivant dans les autres quartiers. 

La situation se détériore depuis plusieurs mois, mais malgré cela je pense être capable d'inspirer les autres jeunes à progresser. J’ai beaucoup d’estime de soi. Je suis une leader pour ma famille ».

Des jeunes Haïtiens participent à un événement sportif pour les jeunes à Port-au-Prince, en Haïti.
Concern Worldwide
Des jeunes Haïtiens participent à un événement sportif pour les jeunes à Port-au-Prince, en Haïti.

Evens (19 ans)

« Beaucoup de jeunes, comme mes trois sœurs qui ont terminé leurs études passent la majorité de leur temps chez eux. Ils n’ont rien à faire. Ce genre d’activités où l’on nous aide à penser différemment sont très importantes, car elles nous poussent à voir plus loin. Évidemment, il est bon de passer du temps avec d’autres jeunes. J’aime faire du sport. Depuis ma toute petite enfance, j'étais fort et j’aimais la compétition, aujourd’hui encore cela m'encourage à continuer à m’améliorer. 

Mon rêve pour les autres jeunes c’est qu’ils puissent voir leur vie comme moi je vois la mienne. C’est-à-dire se concentrer beaucoup plus sur leur travail, ce qu’ils veulent apprendre. Je les encourage toujours d’essayer durement. 

L’un de mes rêves après mes études classiques, c’est de voyager, découvrir d’autres pays, mais pour le moment ce n’est pas possible ».

Joseph est l'un des 1500 jeunes qui ont participé à l'événement à Port-au-Prince, en Haïti.
ONU Haiti/Jonathan Boulet-Groulx
Joseph est l'un des 1500 jeunes qui ont participé à l'événement à Port-au-Prince, en Haïti.

Joseph (21 ans)

« Vivre en Haïti est très difficile maintenant à cause de l’insécurité, de l’instabilité politique et la crise de carburant. D’après mon grand-père, la vie était différente dans le passé. Cela s’empire d’année en année. Une activité de la sorte est très importante, car elle permet aux jeunes de se rencontrer et de voir leur vraie valeur. Le pays a besoin de plus d’activité de loisir. 

Le projet Semences de la Paix m’avait formé, maintenant je suis un entrepreneur. Je suis aussi un étudiant. Bien avant le projet je vendais du chocolat, mais maintenant grâce à mes nouvelles connaissances mes produits sont mieux présentés. Mon business s’appelle Happy Choco. Je suis un entrepreneur, mais l'école sera toujours importante pour moi ».

Des danseurs se produisent lors d'un événement jeunesse à Port-au-Prince, en Haïti.
ONU Haiti/Jonathan Boulet-Groulx
Des danseurs se produisent lors d'un événement jeunesse à Port-au-Prince, en Haïti.

Mirlande (19 ans)

« La situation de ma zone, Cité Lumière, est tellement difficile. Elle regorge de violence, mais aussi, après une pluie, nous sommes littéralement sous les eaux. La zone est inondée. La vie n’a jamais été facile, mais elle n’a jamais été si difficile. Il est quasiment impossible que mes amis viennent chez moi. Beaucoup de personnes nous jugent parce que nous venons de cette zone de la ville. Les choses doivent changer, afin que nous ne vivions plus dans une société où il y a les gens d’en haut et les gens d’en bas. Tout le monde doit avoir une bonne vie. La majorité des personnes victimes de violence sont innocentes. 

Cette activité nous permet de discuter et de prendre des nouvelles de nos amis. Cela est vraiment important pour moi. J’aime danser, je pense que si des activités de ce genre se faisaient plus souvent, les jeunes comme moi respireront mieux.  

Mon rêve c’est d’aller à l’université pour devenir comptable et continuer à danser à un niveau professionnel. Mais, c’est difficile nous n’avons même pas les moyens de continuer avec les études classiques. C’est l’un des problèmes de la majorité de ces jeunes. Beaucoup d’entre nous ont du talent et de l’intelligence, mais nous ne pouvons pas les exploiter à notre avantage. 

L’activité d’aujourd’hui peut changer l’attitude de tout le monde en regard des jeunes venant des quartiers défavorisés ». 

NOTE 

* Tous les noms ont été modifiés pour la protection de l'identité des participants. 

Le projet Semans Lapè (Semences de la paix) a été mis sur pied par le Fond des Nations Unies pour la consolidation de la paix (PBF) en collaboration avec Concern et l’organisation nationale Lakou Lapè et sakala.