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Afghanistan : l’ONU lance un appel à financement d’un fonds pour une « économie populaire »

Des ménages s'inscrivent pour recevoir des rations alimentaires sur un site de distribution de nourriture à Herat, en Afghanistan.
UNICEF/Sayed Bidel
Des ménages s'inscrivent pour recevoir des rations alimentaires sur un site de distribution de nourriture à Herat, en Afghanistan.

Afghanistan : l’ONU lance un appel à financement d’un fonds pour une « économie populaire »

Développement économique

L’économie afghane est en train d’imploser, et tous les ménages, à l’exception de trois pour cent d’entre eux, devraient passer sous le seuil de pauvreté dans les mois à venir, a alerté jeudi le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui a annoncé par la même occasion, le lancement d’un fonds fiduciaire pour « l’économie populaire ».

Face à l’implosion de l’économie actuelle dans le pays, ce fonds devrait aider des millions d’Afghans. Dévoilé jeudi à Genève, celui-ci doit notamment soutenir les micro-sociétés et garantir un revenu provisoire de base pour les plus vulnérables.

Cette nouvelle initiative de réponse à la crise, intégrée à la réponse globale du système des Nations Unies, contribuera à prévenir une catastrophe humanitaire et l’effondrement de l’économie du pays en soutenant les populations les plus vulnérables et les micro-entreprises en faillite en Afghanistan.

Le programme - appelé « ABADEI » en anglais, qui signifie que les communautés sont résilientes et inspire l’espoir d’un avenir meilleur dans plusieurs langues locales, verra le PNUD, les agences des Nations Unies et les organisations non gouvernementales fournir des solutions au niveau communautaire qui complètent les interventions humanitaires urgentes.

De la nourriture est distribuée par le PAM à Herat, dans l'ouest de l'Afghanistan, en août 2021.
PAM
De la nourriture est distribuée par le PAM à Herat, dans l'ouest de l'Afghanistan, en août 2021.

En plus de l’aide humanitaire immédiate, maintenir les économies locales en activité

« L’Afghanistan a besoin d’une aide humanitaire immédiate, mais nous devons également maintenir les économies locales en activité - c’est fondamental pour que les gens aient encore des moyens de subsistance et sentent qu’ils ont un avenir dans leurs communautés », a déclaré Achim Steiner, Administrateur du PNUD, lors d’une conférence de presse à Genève.

Nous devons également sauver des moyens de subsistance - Achim Steiner, Administrateur du PNUD

Il s’agit de fournir directement aux Afghans les fonds via un système permettant d’exploiter les fonds des donateurs gelés depuis la prise du pouvoir par les talibans en août dernier. L’objectif affiché par les Nations Unies est d’injecter de l’argent dans les familles afghanes pour leur permettre de survivre cet hiver et de rester chez elles malgré la tourmente socio-politique.

« Il y a 38 millions de personnes qui ne peuvent pas être maintenues en vie que de l’aide extérieure », a dit Achim Steiner. Pour l’ONU, la communauté internationale doit « intervenir et stabiliser l’économie populaire ».

« En plus de sauver des vies, nous devons également sauver des moyens de subsistance », a dit M. Steiner. « Car sinon, nous serons confrontés, cet hiver et l’année prochaine, à un scénario dans lequel des millions et des millions d’Afghans seront tout simplement incapables de rester sur leurs terres, dans leurs maisons, dans leurs villages et de survivre. »

Des personnes déplacées reçoivent de l'aide sur un site de distribution à Kaboul, en Afghanistan.
Photo : HCR/Tony Aseh
Des personnes déplacées reçoivent de l'aide sur un site de distribution à Kaboul, en Afghanistan.

L’Allemagne a déjà promis 58 millions sur les 660 millions de dollars nécessaires

Pour éviter cette implosion de l’économie afghane, l’Allemagne a déjà promis 58 millions de dollars sur les plus de 660 millions de dollars nécessaires au cours des 12 prochains mois, a ajouté l’administrateur du PNUD. M. Steiner est d’ailleurs en contact avec d’autres donateurs pour mobiliser des ressources pour développer ce fonds devant aider 4,5 millions de personnes, avant d’être élargi si le financement est suffisant.

Ce dispositif onusien va notamment soutenir des emplois pour améliorer les infrastructures publiques. Les petites entreprises seront aidées, de même que des start-up. Pour les personnes plus âgées et les handicapés notamment, un revenu provisoire sera garanti. Il faut lutter contre la crise financière sur le plan intérieur et en concertation avec la communauté internationale, selon l’ONU.

«Nous avons démarré ces activités», a fait valoir M. Steiner. Mais face à un financement limité, l’ONU en appelle à l’aide des partenaires internationaux et des différents acteurs. Selon M. Steiner, le défi consiste finalement à réaffecter les fonds des donateurs déjà affectés à l’Afghanistan et qui ont été gelés depuis l’arrivée des Talibans.

Le Secrétaire général António Guterres (à gauche) s'adresse à la réunion extraordinaire des dirigeants du G20 sur l'Afghanistan.
Photo : ONU/Eskinder Debebe
Le Secrétaire général António Guterres (à gauche) s'adresse à la réunion extraordinaire des dirigeants du G20 sur l'Afghanistan.

Jusqu’à 97 % de la population afghane risque de passer sous le seuil de pauvreté l’année prochaine

« Les discussions de ces dernières semaines se sont concentrées sur la manière de trouver un moyen de mobiliser ces ressources, compte tenu de l’implosion économique en cours et de l’engagement répété de la communauté internationale de ne pas abandonner le peuple afghan », a fait valoir M. Steiner.

Le fonds va s’ajouter à l’appel humanitaire de 600 millions de dollars de l’ONU pour l’approvisionnement en nourriture ou en matériel jusqu’à la fin de l’année. Car selon les Nations Unies, quarante ans de guerre, de catastrophes naturelles récurrentes, une pauvreté chronique, la sécheresse et la pandémie de Covid-19 ont dévasté le peuple afghan. Les bouleversements récents n’ont fait qu’exacerber les besoins et compliquer davantage un contexte opérationnel extrêmement difficile.

Avant même les événements du 15 août, la situation humanitaire en Afghanistan était l’une des pires au monde. À la mi-2021, près de la moitié de la population - soit plus de 18 millions de personnes - avait déjà besoin d’une aide humanitaire et d’une protection. Le PNUD a publié En septembre dernier, le PNUD a publié une évaluation économique qui prévoit que jusqu’à 97 % de la population afghane risque de passer sous le seuil de pauvreté l’année prochaine, à moins qu’une réponse aux crises politique et économique du pays ne soit lancée de toute urgence.