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Violences au Darfour : plus de 250 morts et 100.000 personnes déplacées (ONU)

Un camp de personnes déplacées à Sortoni, au Darfour, au Soudan
MINUAD/Mohamad Almahady
Un camp de personnes déplacées à Sortoni, au Darfour, au Soudan

Violences au Darfour : plus de 250 morts et 100.000 personnes déplacées (ONU)

Migrants et réfugiés

L’escalade de la violence intercommunautaire au Darfour, à l’ouest du Soudan, a causé la mort de 250 personnes, plus de 300 blessés et le déplacement de plus de 100.000 individus ces sept derniers jours, selon les Nations Unies.

Selon l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), 3 500 personnes qui ont fui ces violences sont arrivés au Tchad voisin, dans la province du Ouaddaï.

« Ces réfugiés - dont la majorité sont des femmes et des enfants - ont été accueillis dans quatre endroits très isolés, dépourvus de services de base ou d’infrastructures publiques, où ils se sont abrités sous des arbres », a déclaré vendredi le porte-parole du HCR, Boris Cheshirkov, lors d’un point de presse à Genève.

En raison de la pandémie de Covid-19, les autorités locales tchadiennes dirigent les nouveaux arrivants vers un site de transit, où ils seront mis en quarantaine avant d’être transférés dans un camp de réfugiés existant, loin de la frontière. Avant cette dernière série d’affrontements au Darfour, le Tchad accueillait déjà plus de 360.000 réfugiés soudanais.

De graves préoccupations face aux tensions ethniques et tribales

Revenant sur la chronologie de ce regain de tension, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) rappelle que 160 personnes auraient été tuées et 215 blessées au cours du week-end du dernier. Ce lourd bilan est la conséquence d’affrontements entre des hommes armés des communautés Masalit et arabe, autour du camp de personnes déplacées à Krinding au Darfour occidental.

Ces incidents seraient survenus à la suite du meurtre d’un chef de tribu arabe, qui aurait été commis par un homme Masalit. En représailles, des hommes armés arabes ont ouvert le feu sur les personnes déplacées du camp, pour la plupart des Masalit, et ont mis le feu à de nombreux abris.

Malgré les mesures prises par le gouverneur du Darfour occidental pour maîtriser la situation samedi, de violents affrontements ont éclaté dimanche dans la région entre des hommes armés des deux communautés.

Lors d’un second incident lundi dernier, 72 personnes auraient été tuées et plus de 70 autres blessées à Gereida, dans l'Etat du Sud-Darfour, à la suite d’affrontements entre des hommes armés des tribus Falata et Reizigat.

Dans cette localité du sud du Darfour, l’incident a été déclenché par le meurtre d’un garçon Reizigat de 10 ans le 17 janvier. En recherchant ses chameaux, l’enfant aurait traversé des terres revendiquées par la tribu Falata. Le jour suivant, des hommes armés de la tribu Reizigat ont lancé une attaque sur un village Falata. Les deux parties ont échangé des tirs, causant des morts et des mouvements de populations.

Selon les informations dont dispose le HCDH, le Comité de sécurité de l’État du Sud-Darfour a tenté de contenir la situation en déployant des forces sécuritaires.

L’insécurité et l’impunité chronique rendent le Darfour vulnérable à de nouvelles violences

Le HCDH redoute les répercussions de ces deux incidents meurtiers de violence intercommunautaire survenus au Darfour. « Nous craignons que le manque de sécurité et l’impunité chronique dans la région ne rendent cette dernière vulnérable à de nouvelles violences graves », a déclaré la porte-parole du HCDH, Ravina Shamdasani.

Pour l’ONU, ces incidents soulèvent « de graves inquiétudes quant au risque imminent de nouvelles violences au Darfour ». L’ONU avance ainsi « un environnement où les tensions ethniques et tribales datant de plusieurs décennies et qui ont été encore alimentées par le régime précédent, continuent de s’envenimer ».

Face à de « graves lacunes de protection des civils et de reddition des comptes pour les auteurs de ces abus », les services de la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, invitent le gouvernement soudanais à rétablir l’ordre public et l’État de droit au Darfour. Le hCDH demande instamment à Khartoum de briser ce cycle de violences, avec « des citoyens prenant les armes pour venger des attaques contre les membres de leurs communautés ».

« Les victimes et leurs familles ont le droit d’obtenir réparation », a insisté la porte-parole du HCDH. Des réparations qui passe par des mesures immédiates pour donner suite aux conclusions d’un précédent rapport sur les violences intercommunautaires qui se sont produites entre le 29 et le 31 décembre 2019 à El Geneina, au Darfour occidental. Pour l’ONU, cela constituerait « une étape cruciale dans la lutte contre l’impunité ».