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Climat : La Niña est bien là, avec son lot de variations sur les intempéries (OMM)

La Niña de 2021 pourrait provoquer, dans les régions de la Corne de l’Afrique, de l’Asie centrale et de l’Asie du Sud-Est, des précipitations inférieures à la normale
PNUD/Jean Damascene Hakuzimana
La Niña de 2021 pourrait provoquer, dans les régions de la Corne de l’Afrique, de l’Asie centrale et de l’Asie du Sud-Est, des précipitations inférieures à la normale

Climat : La Niña est bien là, avec son lot de variations sur les intempéries (OMM)

Climat et environnement

L’épisode La Niña, qui s’est développé, devrait perdurer jusqu’à l’année prochaine, influant sur les températures, les précipitations et la configuration des tempêtes dans de nombreuses régions du monde, a alerté jeudi l’Organisation météorologique mondiale (OMM).

 « Plusieurs régions devraient connaître des anomalies de précipitations les plus importantes associées à l’épisode La Niña de 2020 », a déclaré le Secrétaire général de l’OMM, Petteri Taalas.  

Selon l’Organisation météorologique mondiale, le retour d’un phénomène climatique, qui provoque généralement des intempéries variées dans le monde, s’est amorcé et devrait perdurer jusqu’à l’an prochain. 

Dans son bulletin Info-Niño/Niña, l’agence onusienne estime qu’il est très probable (90%) que les températures de surface du Pacifique tropical continuent de correspondre à une anomalie La Niña jusqu’à la fin de l’année, voire jusqu’au premier trimestre de 2021 (55%). 

Pour l’OMM, l’avènement de cet épisode La Niña devrait donc être d’une « intensité modérée à forte ».

Le dernier épisode de forte intensité remonte à 2010/11, et a été suivi d’un épisode modéré en 2011/12. Il avait provoqué notamment des pluies torrentielles Amérique du Sud et en Asie du Sud. 

A l’inverse du phénomène El Niño, La Niña a généralement pour effet de refroidir la température à l’échelle mondiale. Mais ce refroidissement « est plus que compensé par la chaleur piégée dans notre atmosphère par les gaz à effet de serre », a détaillé le Secrétaire général de l’OMM.

Déficit pluviométrique dans la corne de l’Afrique et Asie centrale et du Sud-Est

« Par conséquent, 2020 est toujours en passe de devenir l’une des années les plus chaudes jamais enregistrées et 2016–2020 devrait être la période de cinq ans la plus chaude de l’histoire », a ajouté M. Taalas. Ainsi « les années à Niña sont aujourd’hui même plus chaudes que les années à fort Niño que l’on a connues ».

D’une manière générale, le phénomène La Niña correspond au refroidissement à grande échelle des eaux de surface dans le centre et l’est du Pacifique équatorial. Il est également associé à des variations de la circulation atmosphérique tropicale, autrement dit des vents, de la pression et des précipitations. 

Ses effets sur le temps et le climat sont en général l’opposé de ceux de l’anomalie El Niño, qui est la phase chaude du phénomène El Niño-oscillation australe (ENSO). Et les phénomènes El Niño et La Niña sont des facteurs naturels déterminants du système climatique de la Terre.

« Mais tous les phénomènes climatiques d’origine naturelle s’inscrivent désormais dans un contexte de changement climatique d’origine anthropique qui accentue les conditions météorologiques extrêmes et affecte le cycle de l’eau », a fait valoir le Secrétaire général de l’OMM.  

Les prévisions saisonnières indiquent, selon l’OMM, que plusieurs régions devraient connaître certaines des anomalies de précipitations les plus importantes associées à l’épisode La Niña de 2020. Les régions de la corne de l’Afrique, de l’Asie centrale et de l’Asie du Sud-Est devraient enregistrer des précipitations inférieures à la normale, alors qu’elles seront supérieures à la normale dans certaines îles du Pacifique et dans la partie septentrionale de l’Amérique du Sud.

Invasion de criquets dans la région de Salal, au Somaliland (Somalie).
Photo : FAO
Invasion de criquets dans la région de Salal, au Somaliland (Somalie).

Sécheresse et invasion de criquets menacent la sécurité alimentaire en Afrique de l’Est

En Afrique, l’épisode La Niña de 2020 coïncide avec une saison de pluies et de semailles importante dans une grande partie de l’Afrique de l’Est, qui devrait connaître des conditions plus sèches que la normale. « Ajoutée aux effets de l’invasion de criquets pèlerins, cette situation est préoccupante et pourrait accroître l’insécurité alimentaire dans la région », avertit l’Agence onusienne. 

Dans le même temps, La Niña peut donner lieu à une augmentation des précipitations en Afrique australe, comme l’indiquent certains modèles de prévision saisonnière récents, même s’ils doivent être actualisées au cours des prochains mois. Selon l’OMM, ce phénomène peut également avoir une incidence sur la saison des cyclones dans le sud-ouest de l’océan Indien, en réduisant leur intensité. 

En Asie et dans sa partie centrale, les épisodes La Niña s’accompagnent en général d’une diminution des précipitations de janvier à mai. Cela dit, les dernières prévisions saisonnières mettent en évidence une probabilité accrue qu’une région allant du Levant à l’Asie centrale connaisse une pluviométrie inférieure à la normale avant même cette période.

Par ailleurs, les épisodes La Niña sont souvent associés à une pluviométrie élevée dans une grande partie de l’Asie du Sud-Est et en Australie, et les dernières prévisions saisonnières correspondent à ces caractéristiques de La Niña.  

Pour les îles du Pacifique, les effets de La Niña varieront d’un pays à l’autre. Il est probable que les îles du Pacifique central et oriental seront plus susceptibles d’enregistrer des précipitations inférieures à la normale, tandis que celles du Pacifique Sud-Ouest connaîtront plutôt des précipitations supérieures à la normale.

Marsh Harbour, sur l'île d'Abacos, aux Bahamas, qui a été ravagée par l'ouragan Dorian début septembre 2019.
Photo : ONU/OCHA/Mark Garten
Marsh Harbour, sur l'île d'Abacos, aux Bahamas, qui a été ravagée par l'ouragan Dorian début septembre 2019.

La Niña peut contribuer à augmenter l’intensité de la saison des ouragans

Dans la partie méridionale de l’Asie, les prévisions saisonnières prévoient des conditions sèches attendues au cours des prochains mois dans le nord de la région et des conditions proches de la normale partout ailleurs. Lors des précédentes manifestations de La Niña, des conditions plus sèches que la normale ont été notées dans l’extrême sud de l’Asie et plus humides dans la plupart des régions centrales de juin à septembre. 

Dans les Amériques et Caraïbes, les derniers résultats des modèles de prévision confirment une analyse des impacts observés jusqu’ici en Amérique du Nord. En effet, La Niña se caractérise par des précipitations supérieures à la normale dans la partie septentrionale de la région et inférieures à la normale dans la partie méridionale. 

Dans les Caraïbes, les épisodes La Niña peuvent contribuer à augmenter l’intensité de la saison des ouragans. En Amérique du Sud, La Niña peut donner lieu à des précipitations supérieures à la normale sur de grandes parties du nord de la région, tandis que plus au sud, des précipitations inférieures à la normale peuvent être observées sur les côtes orientales et occidentales. L’épisode La Niña de 2020 présente des caractéristiques très similaires.

Plus largement, l’OMM rappelle l’importance de garder à l’esprit que les phénomènes El Niño et La Niña ne sont pas les seuls facteurs déterminant les régimes climatiques. Une façon de rappeler l’importance d’être au fait des dernières prévisions saisonnières. 

De plus, outre El Niño et La Niña, le bulletin prend en considération l’influence d’autres facteurs climatiques, tels que l’oscillation nord-atlantique et le dipôle de l’océan Indien. Il s’agit ainsi d’évaluer les effets qu’ils peuvent avoir sur la température de surface et le régime des précipitations au niveau régional.

Les experts de l’OMM et les partenaires dans le domaine humanitaire se réuniront en novembre pour procéder à une analyse approfondie de la saison à venir.