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Sommet de l’ONU sur la biodiversité : « Nous avons besoin d’une planète saine pour nos sociétés »

Le Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, Volkan Bozkir, et le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, au sommet sur la biodiversité.
ONU Info/Daniel Dickinson
Le Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, Volkan Bozkir, et le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, au sommet sur la biodiversité.

Sommet de l’ONU sur la biodiversité : « Nous avons besoin d’une planète saine pour nos sociétés »

Développement durable (ODD)

A l’occasion du premier Sommet des Nations Unies sur la biodiversité, deux hauts responsables onusiens ont appelé à agir d’urgence pour protéger la nature et le développement durable.

« L'humanité fait la guerre à la nature. Nous devons reconstruire notre relation avec elle », a déclaré le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, à l’ouverture, mardi, de ce sommet organisé par le Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, Volkan Bozkir. Ce dernier a rappelé que « notre existence sur cette planète dépend entièrement de notre capacité à protéger le monde naturel qui nous entoure ».

La déforestation, le changement climatique et la conversion des espaces naturels sauvages pour la production alimentaire humaine détruisent la toile de la vie sur Terre. « Nous faisons partie de cette toile fragile - et nous en avons besoin pour être en bonne santé afin que nous et les générations futures puissions prospérer », a dit M. Guterres.

La biodiversité et les écosystèmes sont essentiels au progrès et à la prospérité de l’humanité, pour atteindre les Objectifs de développement durable (ODD) et mettre en œuvre l'Accord de Paris sur le climat. « Pourtant, malgré des engagements répétés, nos efforts n'ont pas été suffisants pour atteindre les objectifs mondiaux en matière de biodiversité fixés pour 2020 », a déploré le Secrétaire général, qui estime qu’une ambition beaucoup plus grande est nécessaire - « non seulement de la part des gouvernements, mais de tous les acteurs de la société ».

Des agriculteurs aux Philippines apprennent à s'adapter au changement climatique.
BSWM- UNDP Philippines-GEF5 SLM Project
Des agriculteurs aux Philippines apprennent à s'adapter au changement climatique.

Pas seulement une question environnementale

Le chef de l’ONU a rappelé une évidence : la dégradation de la nature n’est pas uniquement une question environnementale. Elle englobe aussi l’économie, la santé, la justice sociale et les droits de l’homme. « Négliger nos précieuses ressources peut exacerber les tensions et conflits géopolitiques. Pourtant, trop souvent, la santé environnementale est négligée ou minimisée par d'autres secteurs gouvernementaux », a dit M. Guterres pour qui le sommet sur la biodiversité est l’occasion de montrer au monde « qu’il existe une autre voie ».

Même constat de la part de M. Bozkir qui a appelé à faire preuve de pragmatisme. « Nos systèmes de santé reposent sur une riche biodiversité. Quatre milliards de personnes dépendent des médicaments naturels pour leur santé et 70% des médicaments utilisés pour les traitements contre le cancer sont issus de la nature », a-t-il rappelé.

Pour le Président de l’Assemblée générale, une « reprise verte », mettant l'accent sur la protection de la biodiversité, peut atténuer les risques et bâtir un monde plus durable et résilient. « Cela peut aider à débloquer des opportunités commerciales estimées à 1000 milliard de dollars, créer 395 millions d'emplois d'ici 2030 et encourager une économie plus verte », a-t-il dit.

L’enjeu principal de ce sommet est de créer une « dynamique politique » menant à la mis en place d’un cadre ambitieux pour la biodiversité pour l'après-2020 et qui puisse être adopté à la prochaine conférence de l’ONU sur la biodiversité (COP15) qui doit se tenir au mois de mai à Kunming, en Chine.

Un tel cadre doit permettre d’atteindre les ODD. Il doit ainsi définir des objectifs concrets et mesurables et comprend des moyens de mise en œuvre, en particulier des mécanismes de financement et de suivi », a tenu à préciser M. Guterres. Dans cette optique, des partenariats complets et efficaces doivent être mobilisés entre les États et les sociétés, les entreprises, les jeunes, les femmes, les peuples autochtones et les communautés locales.

« Nous devons profiter de cette opportunité pour créer une dynamique politique vers le cadre mondial de la biodiversité pour l'après-2020 », a-t-il dit.

« Il y a dix ans, nous avons obtenu des engagements qui auraient dû protéger notre planète. Nous avons largement échoué », a-t-il reconnu. « Mais, là où des efforts ont été faits, les avantages pour nos économies, la santé humaine et planétaire sont irréfutables ».

Le chef de l’ONU a indiqué que la nature est résiliente et qu’elle peut récupérer si l’humanité atténue son « assaut incessant ». « Nous avons besoin d'une planète saine pour que nos sociétés prospèrent et que nos économies se reconstruisent », a-t-il souligné.

Trois priorités pour conserver et gérer durablement la biodiversité

Lors de ce sommet, M. Guterres a mis en avant trois priorités :

1/ Les solutions fondées sur la nature doivent être intégrées dans les plans de l’après-Covid19 et de développement plus larges.

Préserver la biodiversité mondiale peut engendrer les emplois et la croissance économique dont le monde a besoin d’urgence aujourd’hui.

Le Forum économique mondial signale que les opportunités commerciales émergentes dans la nature pourraient créer 191 millions d'emplois d'ici 2030. A titre d’exemple, la « Grande muraille verte » en Afrique a créé, à elle seule, 335.000 emplois.

Les solutions fondées sur la nature sont également des outils essentiels dans la lutte pour résoudre la crise climatique. Les forêts, les océans et les écosystèmes intacts sont des puits de carbone efficaces. Les zones humides saines atténuent les inondations. L’humanité dispose de solutions naturelles à portée de main pour se protéger des catastrophes naturelles, des pertes d'emplois et des retombées économiques et doit les utiliser.

2/ Les systèmes économiques et les marchés financiers doivent prendre en compte la biodiversité et investir dans la nature.

Les ressources de la nature ne figurent toujours pas dans les calculs de richesse des pays. Le système actuel est axé sur la destruction et non sur la préservation.

L'Organisation pour la coopération et l développement économique (OCDE) estime le financement mondial annuel nécessaire pour la nature entre 300 et 400 milliards de dollars - bien moins que les niveaux actuels de subventions néfastes pour l'agriculture, l'exploitation minière et d'autres industries destructrices.

Investir dans la nature protégera la biodiversité et améliorera l'action pour le climat, la santé humaine et la sécurité alimentaire. Les gouvernements doivent inclure la biodiversité comme critère dans la prise de décision financière.

3/ Garantir des politiques et les objectifs les plus ambitieux qui protègent la biodiversité et ne laissent personne de côté.

La Convention sur la diversité biologique estime que les services fournis par les écosystèmes représentent entre 50 et 90% des moyens de subsistance des ménages ruraux et forestiers pauvres.

La nature offre des opportunités commerciales aux communautés pauvres, de l'agriculture durable à l'écotourisme ou à la pêche de subsistance. Toutes dépendent de la conservation de la biodiversité et de son utilisation durable.

La plupart des peuples autochtones, en particulier, dépendent d'écosystèmes sains qui peuvent fournir les services économiques et financiers dont ils ont besoin pour préserver leurs cultures et leurs moyens de subsistance.