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Coronavirus : une crise qui exige plus de droits, pas moins

Au Brésil, l'OIM soutient les Vénézuéliens et les Brésiliens vivant dans les abris touchés par la crise de la Covid-19.
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Au Brésil, l'OIM soutient les Vénézuéliens et les Brésiliens vivant dans les abris touchés par la crise de la Covid-19.

Coronavirus : une crise qui exige plus de droits, pas moins

Droits de l'homme

A l’ouverture de la 44e session du Conseil des droits de l’homme à Genève, Michelle Bachelet a appelé les Etats à reconnaître que les droits humains de tous sont indispensables pour la reprise et la reconstruction du monde de l’après Covid-19.

« Six mois après la détection des premiers cas, il est clair que cette épidémie menace à la fois la paix et le développement - et qu'elle exige davantage de droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, et pas moins », a déclaré la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.

La Haute-Commissaire a rappelé que les données existantes montrent que les personnes issues de minorités raciales et ethniques ont plus de chance de mourir du coronavirus et de subir ses conséquences socio-économiques. « Cela est particulièrement vrai pour les personnes d'ascendance africaine qui, dans tous les domaines de la diaspora afro-descendante, continuent de faire face à une éducation inégale ; des services et accès inadéquats aux soins de santé ; et les formes croisées de discrimination structurelle qui les placent en première ligne dans des emplois dits « essentiels » qui renforcent leur vulnérabilité », a précisé Mme Bachelet.

Les peuples autochtones sont également particulièrement vulnérables à la pandémie. Un accès inadéquat aux soins de santé et à d'autres installations clés aggrave leur risque de pandémie, tandis que l'absence de données ventilées entrave l'adoption de mesures adaptées pour répondre à leurs besoins. « Il est temps que cette négligence cesse », a souligné la cheffe des droits humains de l’ONU.

La Covid-19 a également aggravé l'exclusion et la discrimination subies par les femmes et les filles, rappelle l’ONU. Elles ne disposent pas d’une protection sociale suffisante en raison de leur forte concentration dans des emplois informels. Leur statut est fragile et leur rémunération faible. Par ailleurs les femmes ont plus de responsabilités étant plus souvent en charge des soins pour les enfants et les personnes âgées et elles continuent d’être exclues continue des prises de décisions.

La violence sexiste omniprésente a également augmenté au cours des derniers mois, avec un nombre accru d'utilisateurs de lignes d'assistance 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 pour la violence domestique. « Cette situation risque de faire reculer les acquis durement gagnés pour la santé des femmes, la participation économique et l’égalité des  droits », a alerté la Haut-Commissaire.

Les personnes âgées subissent le plus grand nombre de morts et les pires préjudices médicaux. « Les taux choquants de contagion et de décès dans les foyers de soins suggèrent de graves lacunes dans l'approche adoptée par certaines autorités nationales quant à l'impact de la pandémie sur le secteur des foyers de soins », estime Mme Bachelet.

« La discrimination tue »

La Haute-Commissaire s’est dite consternée par les informations indiquant que dans de nombreux pays, les membres des communautés minoritaires et les migrants sont confrontés à une stigmatisation croissante - y compris, dans certains cas, de la part des responsables politiques. Au Sri Lanka et en Inde, des membres de la minorité musulmane sont la cible de stigmatisation et de discours de haine les associant à la Covid-19. En Bulgarie, les Roms ont été stigmatisés en tant que menace pour la santé publique, certaines autorités locales ayant mis en place des postes de contrôle autour de leurs campements pour imposer un confinement. La stigmatisation et les menaces contre les personnes présumées infectées par le virus ont également été signalées en Haïti, en Iraq et dans de nombreux autres pays. Au Pakistan, les discours de haine contre les minorités religieuses restent virulents.

« La discrimination tue. Priver les gens de leurs droits sociaux et économiques tue. Et ces morts et ces méfaits nuisent à toute la société », a alerté Mme Bachelet.

Dans le monde entier, la Covid-19 est également instrumentalisé pour limiter le droit des gens à parler, à exprimer leurs opinions et à participer à la prise de décisions qui affectent leur vie. « En Russie, en Chine, au Kosovo, au Nicaragua et dans de nombreux autres pays, je note des informations faisant état de menaces et d'intimidations à l'encontre de journalistes, blogueurs et militants civiques, en particulier au niveau local, dans le but apparent de décourager les critiques des réponses des autorités à la Covid-19 », a dit Mme Bachelet.

La Haut-Commissaire a également alerté sur la situation en Égypte, où les libertés d'expression, d'association et de réunion pacifique ont été restreintes- y compris les discussions en ligne sur la propagation de la Covid-19. Elle a également alerté sur la répression de la société civile, avec le gel des avoirs, des intimidations et arrestations visant les défenseurs des droits de l'homme, les journalistes, les militants politiques et les membres de leurs familles.

« La censure et la criminalisation de la parole sont susceptibles de supprimer les informations cruciales nécessaires pour lutter contre la pandémie. Et seul le respect de leurs droits - y compris le droit de participer à une prise de décision transparente et responsable - incitera les gens à faire confiance aux politiques adoptées par leur gouvernement », a rappelé la cheffe des droits humains de l’ONU.