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Italie : exiger une taille minimale pour les pompiers est discriminatoire à l’égard des femmes, selon des experts de l’ONU

Une femme pompier en Turquie
ONU Femmes/ Erbu Demirel
Une femme pompier en Turquie

Italie : exiger une taille minimale pour les pompiers est discriminatoire à l’égard des femmes, selon des experts de l’ONU

Droits de l'homme

L’Italie a violé le droit d’une femme à devenir pompier en imposant une exigence « de taille inutile et déraisonnable », a estimé, vendredi à Genève, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies. 

Les conclusions du Comité, qui est composé de 18 experts indépendants, ont été rendues après l’examen d’une plainte déposée par la femme, E.G., qui mesure 161 cm.

Bien que la loi ait été rédigée en termes apparemment neutres pour les deux sexes, l’imposition d’une exigence de taille indifférenciée pour les candidats masculins et féminins a entraîné une discrimination de facto à l’égard des femmes, ont constaté les experts indépendants onusiens. 

« L’Italie devrait s’assurer que toutes les exigences pour l’emploi dans la fonction publique soient nécessaires et proportionnées », a déclaré Yuval Shany, membre du Comité. « Ces exigences qui semblent neutres n’affectent pas en fait négativement et de manière disproportionnée les candidatures féminines dans la pratique », a ajouté M. Shany.

Dans sa décision, le Comité des droits de l’homme a donc demandé à Rome d’indemniser E.G. et d’évaluer la possibilité de l’admettre en tant que pompier si elle le souhaite. 

A noter qu’en 1999, E.G. a commencé à servir comme pompier volontaire dans le Latium (Lazio), en Italie. En 2007, elle avait postulé un poste permanent au sein du corps national des pompiers, mais sa candidature a été refusée parce qu’elle ne satisfaisait pas à l’exigence de hauteur minimale de 165 cm pour les pompiers permanents, qui s’applique tant aux hommes qu’aux femmes. 

Modifier la législation nationale régissant les conditions d’accès au Corps des pompiers

Par la suite, E.G. a contesté la décision de disqualification devant le tribunal administratif régional du Latium, en faisant valoir que le fait d’exiger la même taille pour les hommes et les femmes constituait une discrimination indirecte à l’égard des femmes, puisque la taille moyenne des femmes en Italie est de 161 cm et celle des hommes italiens de 175 cm.  Elle a également fait valoir que rien ne justifiait les exigences de taille différentes pour les pompiers permanents et volontaires, bien qu’ils exercent les mêmes fonctions. 

Après avoir perdu son procès au niveau régional, E.G. a fait appel au Conseil d’État italien et après que tous ses appels ont été rejetés, elle a porté sa plainte devant le Comité des droits de l’homme en 2016. À cette époque, elle était pompier volontaire depuis 17 ans.

Selon les informations dont dispose le Comité, il existe un écart important entre la taille moyenne des femmes et des hommes italiens. Et en fixant une taille minimale de 165 cm, bien supérieure à la moyenne féminine, l’État partie a effectivement exclu de nombreuses candidates à des postes de pompiers. « Une telle situation soulève des préoccupations de discrimination indirecte, que l’État aurait dû réfuter », a fait valoir M. Shany. 

Pour garantir l’accès [au service public] dans des conditions générales d’égalité, le Comité soutient que « les critères et les procédures de nomination, de promotion, de suspension et de licenciement doivent être objectifs et raisonnables ». Rome est également tenu de prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter que des violations similaires ne se produisent à l’avenir, notamment en modifiant la législation nationale régissant les conditions d’accès au Corps national des pompiers.

L’État partie est prié de faire rapport dans un délai de 180 jours en détaillant les mesures prises pour remédier à la situation.