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La Covid-19 déclenche un net déclin du commerce mondial, selon la CNUCED

Activités commerciales portuaires au Cambodge : des produits du Vietnam arrivent au port autonome de Phnom Penh dans la province de Kandal (archives).
Photo: Banque mondiale/Chhor Sokunthea
Activités commerciales portuaires au Cambodge : des produits du Vietnam arrivent au port autonome de Phnom Penh dans la province de Kandal (archives).

La Covid-19 déclenche un net déclin du commerce mondial, selon la CNUCED

Développement économique

L’épidémie de coronavirus a fait chuter le commerce international au premier trimestre de cette année. La pandémie a réduit la valeur du commerce mondial de 3% au cours du premier trimestre de cette année, selon les dernières données de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED) publiées dans un rapport conjoint de 36 organisations internationales.

Selon le rapport du Comité de coordination des activités statistiques (CCSA), le ralentissement devrait s’accélérer au deuxième trimestre, avec un commerce mondial devant enregistrer une baisse de 27% en glissement trimestriel.

Cet effondrement du commerce mondial s’accompagne aussi d’une baisse marquée des prix des matières premières, qui ont chuté précipitamment depuis décembre 2019.

L’indice des prix des produits de base sur le marché libre de la CNUCED (FMCPI), qui mesure les mouvements de prix des produits de base exportés par les économies en développement, a perdu 1,2% de sa valeur en janvier, 8,5% en février avant de s’écrouler autour de 20,4% en mars.

La chute des prix des carburants a été le principal facteur de cette forte baisse, avec un recul de 33,2% en mars, tandis que les prix des minéraux, minerais, métaux, denrées alimentaires et matières premières agricoles ont chuté de moins de 4%.

La CNUCED explique la baisse de 20% des prix des matières premières (un record) par la forte baisse des prix du pétrole. En comparaison, pendant la crise financière mondiale de 2008, la baisse maximale en glissement mensuel a été de 18,6%. À l’époque, la baisse a duré six mois.

« Il est inquiétant de constater que la durée et la force globale de la tendance actuelle à la baisse des prix des matières premières et du commerce mondial restent incertaines », souligne l’agence onusienne, tout en relevant « les signes modestes de reprise notés depuis la fin de 2019 sur la valeur des échanges mondiaux de marchandises.

Le coronavirus bouscule les chaînes de production mondiale

Ce rapport est le fruit d’une coopération entre la communauté statistique internationale et les bureaux et systèmes statistiques nationaux du monde entier, coordonnée par la CNUCED.

« Partout, les gouvernements sont pressés de prendre des décisions de redressement post-Covid-19 avec des conséquences à long terme », a déclaré le Secrétaire général de la CNUCED, Mukhisa Kituyi.

Mais selon le chef de cette agence onusienne, ces décisions devraient être fondées sur les meilleures informations et données disponibles. La CNUCED a donc joué un rôle central en réunissant presque une quarantaine d’organisations internationales pour compiler des faits et des chiffres précieux afin de soutenir la réponse à la pandémie du nouveau coronavirus.

Le rapport fera ainsi ressortir des données de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qui montrent une nouvelle baisse de la production manufacturière mondiale. La croissance manufacturière mondiale, qui était déjà en train de ralentir en 2019 en raison des tensions commerciales entre « les économies dominantes » (Etats-Unis/Chine), devrait encore diminuer en raison des « perturbations économiques déclenchées par la Covid-19 ». 

Au cours des deux premiers mois de 2020, la Chine a enregistré une forte réduction de sa production, qui peut s’expliquer par les célébrations du Nouvel An chinois à la fin du mois de janvier 2020 ainsi que par le début du confinement de Wuhan et d’autres régions pour contenir le virus au même moment. « Il reste à voir à quelle vitesse la Chine rattrapera les pertes subies au cours du premier trimestre de 2020 », s’interroge cette institution internationale basée à Genève.

Déchargement de thon dans le port principal d'Abidjan, en Côte d'Ivoire.
Photo: FAO/Sia Kambou
Déchargement de thon dans le port principal d'Abidjan, en Côte d'Ivoire.

Plus de pauvres en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud

La pandémie de Covid-19 n’est pas seulement une crise sanitaire, mais c’est aussi une crise humanitaire et de développement qui menace de laisser « de profondes cicatrices socio-économiques et politiques » pour les années à venir, en particulier dans les pays déjà accablés par la fragilité, la pauvreté et les conflits.

Sur le plan social, le rapport constate « une perte brute d’emplois », avec une baisse de près de 10,5% du nombre total d’heures de travail, soit l’équivalent de 305 millions de travailleurs à temps plein. Dans le monde, quelque 1,6 milliard d’élèves ont été touchés par les fermetures d’écoles et la crise va plonger 40 à 60 millions de personnes supplémentaires dans l’extrême pauvreté.

Pour l’Organisation internationale du travail (OIT), il s’agit de la pire crise mondiale depuis la seconde guerre mondiale. En effet, la baisse du nombre d’heures travaillées dépasse déjà celle de la crise financière de 2008-2009.

« Il est inquiétant de constater que la Covid-19 touche désormais également le monde en développement, où les capacités et les ressources sont fortement limitées », met en garde l’agence onusienne. La baisse de l’emploi implique que de nombreux travailleurs dans le monde entier sont ou seront confrontés à une perte de revenus, ce qui les conduit souvent, eux et leurs familles, à une pauvreté (plus) profonde.

Du côté de la Banque mondiale, le rapport note que l’Afrique subsaharienne pourrait être la région la plus touchée. Bien que l’Afrique subsaharienne ait jusqu’à présent été relativement moins touchée par le virus du point de vue sanitaire, les projections de l’Institution de Bretton Woods suggèrent qu’elle sera la région la plus touchée en termes d’augmentation de l’extrême pauvreté.

Selon la Banque mondiale, les 23 millions de personnes poussées dans la pauvreté se trouveraient en Afrique subsaharienne et 16 millions en Asie du Sud.