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Le Burkina Faso est l'épicentre d’une crise humanitaire dramatique qui secoue le Sahel central

Une mère et son bébé dans la camp de déplacées de Pissila, au Burkina Faso.
PMA/Marwa Awad
Une mère et son bébé dans la camp de déplacées de Pissila, au Burkina Faso.

Le Burkina Faso est l'épicentre d’une crise humanitaire dramatique qui secoue le Sahel central

Aide humanitaire

Le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies s’est alarmé ce mardi de l’aggravation de la crise humanitaire dans la région du Sahel central - qui englobe le Burkina Faso, le Mali et le Niger - et qui est alimentée par de violents affrontements entre groupes armés, les déplacements de population, la faim et la pauvreté généralisée.

Dans cette région, le Burkina Faso est considéré comme l’épicentre de cette dramatique crise où la violence et les effets à long terme du changement climatique provoquent une crise humanitaire qui frappe aussi bien ce pays que ses Etats voisins dans la région du Sahel central en Afrique de l’Ouest.

« Une crise humaine dramatique se déroule au Burkina Faso. Elle bouleverse la vie de millions de personnes. Près d’un demi-million ont été forcées de quitter leur foyer et un tiers du pays est secoué par l’insécurité », a déclaré le Directeur exécutif du PAM, David Beasley, cité dans un communiqué rendu public ce mardi à Genève.

Cette détérioration de la situation humanitaire n’est pas étrangère à la forte augmentation de la violence au Burkina Faso où le nombre d’attaques dans la première moitié de 2019 a dépassé le total de 2018, avec quatre fois plus de victimes civiles que le total enregistré en 2018.

« L’aggravation de l’insécurité a entraîné la fermeture d’écoles et l’abandon des champs par les agriculteurs à la recherche de sécurité, et ce dans un pays où 4 personnes sur 5 dépendent de l’agriculture pour leur subsistance », a souligné de son côté, Hervé Verhoosel, porte-parole du PAM à Genève. 

Selon l’agence onusienne, le conflit au Sahel dévaste l’agriculture et les économies rurales, et près d’un enfant sur trois n’est pas scolarisé dans de nombreuses zones touchées par le conflit.
 

Une jeune fille devant une marmite dans un camp pour personnes déplacées à Barsalogho, dans la région du Centre-Nord, du Burkina Faso
OCHA/Otto Bakano
Une jeune fille devant une marmite dans un camp pour personnes déplacées à Barsalogho, dans la région du Centre-Nord, du Burkina Faso

20 millions de personnes vivent dans des zones touchées par le conflit au Sahel

L’impact sur les 20 millions de personnes qui vivent actuellement dans des zones de conflit à travers la région est dramatique.

Rien qu’au Burkina Faso, au moins 486.000 personnes ont été contraintes de fuir leur foyer, ce qui porte à 860.000 le nombre total de personnes déplacées dans les trois pays sahéliens.

Cette année, 2,4 millions de personnes ont besoin d’une aide alimentaire dans le Sahel central - un chiffre qui pourrait augmenter

Plus de 270.000 vivent comme réfugiés dans les trois pays – 26.100 au Burkina Faso, 187.140 au Mali et 187.360 au Niger.

Et cette année, 2,4 millions de personnes ont besoin d’une aide alimentaire dans le Sahel central - un chiffre qui pourrait augmenter en raison des déplacements. Les équipes du PAM au Burkina Faso voient sur le terrain des « niveaux de malnutrition dépasser largement les seuils d’urgence ».

« Les jeunes enfants et les nouvelles mères sont dans une situation extrêmement critique. Si la communauté internationale veut vraiment sauver des vies, c’est maintenant qu’il faut agir », a ajouté M. Beasley.

Même sans l’impact exacerbé de l’insécurité, le Sahel est en première ligne du changement climatique et de nombreuses communautés doivent déjà s’adapter à un climat imprévisible.

Les conséquences du changement climatique interférent ainsi sur les régimes climatiques régionaux et bouleversent l’équilibre délicat entre les agriculteurs et les éleveurs qui doivent se partager des ressources vitales comme l’eau ou les pâturages.

« La concurrence féroce pour ces ressources vitales alimente les conflits et renforce les efforts de radicalisation des groupes militants qui se sont installés dans la région », a précisé Hervé Verhoosel.

Des ouvriers déchargent des sacs de farine à l'entrepôt du PAM à Kaya (Burkina Faso).
PAM/Marwa Awad
Des ouvriers déchargent des sacs de farine à l'entrepôt du PAM à Kaya (Burkina Faso).

Aide alimentaire à plus de 2,6 millions de personnes dans les trois pays du Sahel

De son côté, le chef du Bureau du PAM au Burkina Faso a ajouté que cette situation climatique a aggravé le niveau de vulnérabilité des populations locales surtout dans cette partie du Sahel où il y a une seule saison des pluies qui va de mai à septembre.

Dans les zones où sévit l’insécurité, les agriculteurs n’ont pas été en mesure de s’occuper de leurs champs agricoles. De nombreux paysans ont dû abandonner leurs champs. 

« Avec les effets du changement climatique, la durée de cette saison des pluies est devenue plus courte. Fort heureusement, la dernière saison des pluies a été assez bonne et la récolte globale a été aussi bonne. Mais dans les zones où sévit l’insécurité, les agriculteurs n’ont pas été en mesure de s’occuper de leurs champs agricoles. De nombreux paysans ont dû abandonner leurs champs », a indiqué David Bulman, Directeur du PAM au Burkina Faso, lors d’une conférence de presse téléphonique.

Face à cette urgence au Sahel central, le PAM plaide pour une intensification rapide de l’action humanitaire pour protéger et sauver des vies au Burkina Faso et dans l’ensemble de la région.

En attendant, l’agence onusienne a intensifié son action en fournissant cette année une aide alimentaire et nutritionnelle à plus de 2,6 millions de personnes dans les trois pays du Sahel central, concentrant ses efforts sur les zones où les besoins humanitaires sont les plus importants et où des déplacements massifs de population ont eu lieu.

Mais le PAM est confronté à l’immense défi de répondre simultanément aux besoins humanitaires immédiats, tout en protégeant les investissements réalisés dans la résilience et l’autosuffisance des communautés, afin que tous les progrès réalisés ces dernières années ne soient pas perdus.

Le PAM a un besoin urgent de 150 millions de dollars pour des opérations dans les pays du Sahel central (Mali, Niger et Burkina Faso), dans le cadre des programmes existants qui comprennent à la fois des activités d’urgence et des programmes de renforcement de la résilience.