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La première réunion du Comité constitutionnel syrien est un franc succès de la médiation (Guterres)

Des membres du Comité constitutionnel syrien réuni à Genève.
Photo UNIFEED
Des membres du Comité constitutionnel syrien réuni à Genève.

La première réunion du Comité constitutionnel syrien est un franc succès de la médiation (Guterres)

Paix et sécurité

A la 6e Conférence d’Istanbul sur la médiation, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a demandé à la communauté internationale de « faire tout ce qui est en (son) pouvoir pour mettre fin au cycle insensé de destruction et de reconstruction dans le monde », citant la tragédie en Syrie qui dure depuis huit ans et où les civils paient le prix fort.

« Il n’y a pas d’illustration plus claire de l’importance des solutions politiques au conflit », a déclaré le chef de l’ONU ce jeudi dans la capitale turque en référence à la Syrie.

Face à un tel drame, la première réunion du Comité constitutionnel syrien qui a entamé mercredi ses travaux à Genève, est perçue comme « un jalon, une base pour le progrès et, en soi, un franc succès de la médiation », a-t-il ajouté. M. Guterres espère que ce sera le premier pas vers une solution politique qui mettra fin à ce chapitre tragique de la vie du peuple syrien.

Autres lueurs d’espoir sur le front de la résolution des conflits, c’est sur le continent africain que la médiation et le dialogue donnent « des résultats positifs ». C’est le cas au Soudan, au Soudan du Sud, en Éthiopie et en Érythrée, à Madagascar et en République centrafricaine où « une réduction des conflits et des souffrances humaines est due en partie aux efforts des médiateurs ».

Résurgence du populisme et marginalisation des minorités

Toutefois ces signaux positifs sont parfois remis en cause par « un contexte géopolitique complexe et changeant des conflits », qui a de graves implications pour la médiation.  Une façon pour le patron de l’ONU de se préoccuper une nouvelle fois « des divisions au sein de la communauté internationale » qui contribuent à l’imprévisibilité et à l’insécurité.

Or selon lui, les médiateurs ont toujours compté sur la volonté politique des gouvernements ainsi que des groupes armés et parties au conflit. « Mais maintenant, ils doivent aussi œuvrer pour l’alignement des puissances extérieures, car les conflits d’aujourd’hui sont susceptibles d’avoir une implication régionale et internationale », a regretté M. Guterres.

En outre dans de nombreux pays et régions, les nationalistes et les extrémistes exploitent les divisions entre les peuples, ce qui accroît le risque de confrontation violente. « Même dans certaines sociétés pacifiques, les dirigeants alimentent les tensions sans se soucier des conséquences », s’est inquiété le chef de l’ONU. Il a dénoncé « la résurgence du populisme et la marginalisation des minorités », contribuant ainsi à l’isolement et à la radicalisation. Ce qui rend « les gens vulnérables au recrutement par des extrémistes et des terroristes ».

Le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, à la 6ème Conférence d'Istanbul sur la médiation.
Photo ONU/Emrah Gruel
Le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, à la 6ème Conférence d'Istanbul sur la médiation.

Le défi des nouvelles technologies

L’autre défi pour la médiation concerne la façon avec laquelle les nouvelles technologies affectent la nature des conflits et les efforts de médiation. Si les plates-formes de médias sociaux peuvent améliorer l’inclusion des femmes ou des jeunes, le discours haineux en ligne est devenu « un problème omniprésent ».

« Le contenu numérique peut être manipulé pour créer des récits empoisonnés. Des campagnes de désinformation et d’intelligence artificielle peuvent être déployées contre les efforts d’inclusion en ligne », a souligné le Secrétaire général, non sans rappeler que les cyber-armes sont déjà utilisées pour amplifier les opérations militaires conventionnelles. A cet égard, le chef de l’ONU a mis en avant le kit d’outils numériques des Nations Unies pour les médiateurs qui a été conçu pour soutenir l’utilisation sûre des nouvelles technologies dans les efforts de médiation, avec des recommandations concrètes et des études de cas.

Plus largement, l’ONU entend continuer à se mobiliser face aux défis au Yémen, en Libye, au Sahel, dans la Corne de l’Afrique et ailleurs. Pour les Nations Unies, la médiation ne peut pas attendre une impasse militaire ou une demande d’aide. C’est cette stratégie qui a permis de nouer des contacts alors que le conflit faisait déjà rage au Cambodge ou dans certains pays d’Amérique centrale.

Actuellement, l’ONU appuie le dialogue entre le gouvernement national de Papouasie-Nouvelle-Guinée et le gouvernement autonome de Bougainville sur l’avenir politique de Bougainville - en utilisant la médiation comme outil de prévention.

Dans le même temps, les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales de l’ONU mènent des activités essentielles de prévention et de règlement des conflits. Les bons offices du Secrétaire général et ceux de ses envoyés s’emploient à aider les parties à régler pacifiquement leurs différends, comme ces pourparlers allant de l’Afghanistan au Soudan du Sud et de la Papouasie-Nouvelle-Guinée à la Syrie.

Le développement durable, un outil efficace pour prévenir les conflits

« Sauver le monde du fléau de la guerre est notre première priorité » -  António Guterres 

Mais toutes ces initiatives ne seraient durables qu’en s’attaquant « à la fois aux causes profondes et aux conséquences des conflits, en particulier au niveau local ». Une façon aussi de souligner que le développement durable est une fin en soi, mais c’est aussi l’un des outils les plus efficaces dont dispose la communauté internationale « pour prévenir et réduire les conflits, et pour construire un avenir meilleur avec de nouvelles opportunités ».

Des efforts qui doivent être conjugués en coordination avec les organisations régionales, de groupes de la société civile et d’autres acteurs impliqués dans la médiation. Dans le cadre de ces partenariats stratégiques, l’ONU a mis en avant l’exemplarité de sa coopération avec l’Union africaine qui a permis d’appuyer des approches communes, quand les missions de maintien de la paix s’efforcent de rapprocher les parties aux niveaux national et local.

Dans cette approche qu’entend mettre en avant l’ONU, c’est la place de la société civile dans ses efforts de médiation, notamment pour remédier aux lenteurs notées dans la participation des femmes aux processus de paix formels. De plus, le Secrétaire général estime que près de 600 millions de jeunes dans les États touchés par des conflits peuvent apporter une contribution essentielle à la médiation et à la consolidation de la paix.

D’autant que l’une des nombreuses tragédies de la guerre est qu’elle empêche pendant des générations les individus, les communautés et les sociétés d’aller au bout de leurs possibilités. Et si les Nations Unies ont été créées il y a près de 75 ans « pour sauver le monde du fléau de la guerre », la Conférence d’Istanbul est aussi l’occasion de promouvoir cet objectif de paix qualifié « de première priorité et de travail le plus important ».