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Afrique de l’Ouest : le Sahel et le bassin du lac Tchad toujours minés par l’insécurité (ONU)

Des réfugiés nigérians dans le camp de Sayam Forage au Niger, après avoir fui Boko Haram (archive - mai 2016).
© UNHCR/Hélène Caux
Des réfugiés nigérians dans le camp de Sayam Forage au Niger, après avoir fui Boko Haram (archive - mai 2016).

Afrique de l’Ouest : le Sahel et le bassin du lac Tchad toujours minés par l’insécurité (ONU)

Paix et sécurité

L’envoyé de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel a alerté mercredi le Conseil de sécurité sur l’augmentation « encore plus visible et significative » des attaques violentes directement liées à l’extrémisme violent dans la région.

« La situation sécuritaire reste instable dans tout le Sahel, où l'escalade de la violence et l'insécurité ont déclenché une crise humanitaire sans précédent laissant 5,1 millions de Burkinabés, Nigériens et Maliens dans le besoin », a déploré Mohamed Ibn Chambas, le Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU pour la région.

La situation sécuritaire s’est rapidement détériorée ces six derniers mois au Burkina Faso qui a enregistré 226 incidents de sécurité. Le nombre de personnes déplacées par les violences au pays des hommes intègres a été multiplié par cinq en six mois (47.000 en décembre 2018 contre 220.000 en juin 2019) et Ouagadougou compte aujourd’hui 25.000 réfugiés sur son territoire.

Le nord et l’est du Burkina Faso restent les régions plus touchées par les attaques récurrentes de groupes terroristes et armés et par une augmentation de la violence intercommunautaire avec la participation vraisemblablement incontrôlée de groupes d'autodéfense. Les groupes terroristes prennent directement pour cible les établissements scolaires et médicaux. « Aujourd’hui, un total de 2.024 écoles et 37 centres de santé restent fermés au Burkina Faso sous l’effet direct de cette crise », a dit M. Chambas.

Face à cette escalade rapide, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a demandé une intensification significative de la réponse des Nations Unies au Burkina Faso et a mis en place un groupe de travail d'urgence pour remedier à la crise dans ce pays. Ce groupe de travail s'appuie notamment sur les conclusions d'une mission inter-agences menée par M. Chambas en février au Burkina Faso et qui a défini une stratégie multisectorielle pour répondre aux besoins immédiats ainsi qu’aux causes structurelles de l’insécurité. « Un plan d'intervention humanitaire budgétisé à 100 millions de dollars a également été lancé et est actuellement révisé à la hausse pour répondre aux besoins croissants », a précisé le Représentant spécial.

Boko Haram menace toujours le bassin du lac Tchad

Dans le bassin du lac Tchad, les attaques de groupes dissidents de Boko Haram continuent de menacer la paix et la stabilité de la région, a ajouté M. Chambas.

30 attaques suicides y ont été enregistrés durant la première moitié de l’année 2019 grâce aux efforts de la Force multinationale, soit une réduction de 70% par rapport à l’année dernière. Mais l’armée tchadienne a toutefois a subi l’attaque la plus meurtrière qu’elle ait connu à ce jour. N’Djamena a perdu 23 soldats dans une attaque menée à Dangdala par des combattants de Boko Haram.

Le groupe terroriste a également tenté de lancer un assaut à la roquette sur l'aéroport de Diffa, au Niger, et a mené des attaques terroristes apparemment plus sophistiquées dans d'autres parties du pays. En juin, au moins 147 civils avaient été enlevés dans la région de Diffa, le nombre le plus élevé jamais enregistrée depuis 2015.

Compte tenu de l'escalade rapide de la violence et des liens croissants dans la région entre terrorisme, crime organisé et affrontements intercommunautaires, les chefs d’État de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont décidé lors de leur sommet du 29 juin, d’organiser un sommet extraordinaire sur le terrorisme à Ouagadougou, prévu le 14 septembre.

La réunion au Burkina Faso vise à discuter d’une approche de sécurité concertée pour les pays d’Afrique de l’Ouest et du Sahel et « représente une fenêtre d’opportunité unique pour harmoniser les dispositifs de sécurité fragmentés »,  a dit M. Chambas.

Traiter les problèmes de gouvernance, d’extrême pauvreté et de développement

S’il a salué le « soutien louable » à la mise en œuvre des plans d’intervention humanitaire en Afrique de l’Ouest et au Sahel, M. Chambas a toutefois exhorté les gouvernements et leurs partenaires à redoubler efforts pour définir une approche concertée afin d'empêcher une nouvelle expansion de la menace terroriste et de favoriser l’appui à des mesures indispensables de stabilisation à moyen et long terme alignées sur la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.

L’envoyé onusien a indiqué que la deuxième réunion des gouverneurs du bassin du lac Tchad, qui s’est tenu les 17 et 18 juillet à Niamey, a souligné une fois de plus l’importance d’approches globales pour lutter efficacement contre l’instabilité en Afrique de l’Ouest et au Sahel. La réunion organisée dans la capitale du Niger a également permis de lancer un Fonds de stabilisation pour le lac Tchad.

« À travers des approches inclusives basées sur l’appropriation nationale et conformément à la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, nous devons continuer à travailler plus dur pour traiter les déficits de gouvernance, l’extrême pauvreté et le manque de développement qui alimentent et font perdurer la violence armée et l'extrémisme », a dit M. Chambas.

Stimuler le développement de la région et explorer son plein potentiel requiert un soutien accru à la mise en œuvre de la stratégie régionale de stabilisation du bassin du lac Tchad, au programme d’investissement prioritaire du G5 Sahel et aux efforts concertés pour soutenir les plans nationaux de développement. Le Représentant spécial s’est dit convaincu que les activités des extrémistes violents peuvent être mieux contrées par des mesures préventives.