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Mozambique : « Combien d'entre vous ont vu leur maison détruite ? », presque tous lèvent la main

Après les cyclones Idai et Kenneth au Mozambique, certains enfants déplacés de la ville de Beira doivent étudier sans toit au-dessus de leur tête.
Photo : ONU/Eskinder Debebe
Après les cyclones Idai et Kenneth au Mozambique, certains enfants déplacés de la ville de Beira doivent étudier sans toit au-dessus de leur tête.

Mozambique : « Combien d'entre vous ont vu leur maison détruite ? », presque tous lèvent la main

Climat et environnement

Au deuxième jour de sa visite au Mozambique, le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a rencontré vendredi les survivants du cyclone Idai qui a dévasté le pays au mois de mars, avant d’être frappé, six semaines plus tard, par le cyclone Kenneth.

António Guterres est arrivé vendredi à Beira. Dans la deuxième ville du Mozambique, le chef de l’ONU s’est rendu à « l'Ecole du 25 juin ». Dans cet établissement scolaire, il a entendu les témoignages des élèves sur l'impact de la cyclone Idai qui s’est abattu sur Beira il y a quatre mois.

Frederico Francisco, directeur de l’école, a montré au chef de l’ONU, les dégâts du cyclone qui ont dévasté la plupart des salles de classe. Idai est considéré comme le cyclone le plus violent ayant traversé l'Afrique australe depuis des décennies.

Sur place, le Secrétaire général a parcouru plusieurs salles de classe, demandant aux enfants à quoi ressemblait le cyclone et ce qu'il avait fait dans son école.

« Combien d’entre vous ont vu leur maison détruite ? », a demandé M. Guterres. Dans les salles de classes, presque tous les élèves ont levé la main.

Notre obligation est de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour aider, en particulier les personnes les plus vulnérables, qui ont le plus souffert de cette tragédie - António Guterre, Secrétaire général de l’ONU

António Guterres a promis aux enfants que leur école sera reconstruite et les encouragé à poursuivre leurs études. Il leur a également expliqué ce qu'était l'Organisation des Nations Unies. « C'est un endroit où tous les pays se réunissent pour essayer de résoudre les problèmes du monde. Parfois oui, parfois non ».

A l'école du 25 juin, António Guterres a également rencontré un groupe de personnes handicapées qui ont survécu au cyclone. Il a notamment entendu les témoignages d'une personne atteinte d'albinisme, amputée, paraplégique, malentendante et la mère d'un enfant vivant avec une maladie mentale.

« Notre obligation est de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour aider, en particulier les personnes les plus vulnérables, qui ont le plus souffert de cette tragédie », a déclaré le chef de l’ONU.

Le Secrétaire général s'est ensuite rendu au camp de Mutua, qui accueille des centaines de milliers de familles déplacées par la catastrophe.

S'adressant aux journalistes pendant le vol qui l’amenait de Maputo a Beira, António Guterres a déclaré que même si le Mozambique n’est plus, aujourd’hui, « au pic de la crise » causée par les deux cyclones, la situation actuelle souligne toujours « la gravité du problème et la nécessité de l'aide internationale ».

Selon le chef de l'ONU, les deux cyclones qui ont frappé le Mozambique en l'espace de six semaines sont « une démonstration claire de ce que produit le changement climatique ».

António Guterres a souligné la double nécessité à la fois d’« accroître la solidarité pour la reconstruction et d’alerter le monde que l'évolution du changement climatique est beaucoup plus dangereuse qu'on ne l'avait cru ».

Une nouvelle vie

Au Mozambique, le Secrétaire général António António Guterres a entendu des témoignages de familles dans le camp de Mandruzi, à 40 km de Beira, où vivent plus de 375 personnes.
Photo : ONU/Eskinder Debebe
Au Mozambique, le Secrétaire général António António Guterres a entendu des témoignages de familles dans le camp de Mandruzi, à 40 km de Beira, où vivent plus de 375 personnes.

A trente minutes en voiture de Beira, M. Guterres a visité le camp de Mandruzi, où 480 familles sont temporairement réinstallées.  Le gouvernement leur a donné des parcelles de terrain, mais ils vivent toujours sous des tentes fournies par l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, le HCR, l'Organisation internationale pour les migrations, l'OIM et d'autres partenaires humanitaires.

Au camp de Mandruzi, le chef de l'ONU a été chaleureusement accueilli dans une école soutenue par l'UNICEF, avec des chants de « Titio Guterres ».  Le Secrétaire général s'est bien amusé avec une classe de première année lorsqu'il les a testés mathématiquement sur leur nombre - jusqu'à 4.

Le Secrétaire général a ensuite fait une visite rapide du camp, rencontrant plusieurs familles. Il a eu des échanges avec plusieurs résidents, dont deux dames et un jeune garçon, sur la vie dans le camp. Il leur a demandé s'ils aimaient leur nouvel endroit et tous ont répondu par l’affirmative, invoquant la plus grande sécurité offerte par le site.

Plus tard dans la journée, António Guterres - lors d'un événement médiatique - a parlé des défis de la réinstallation au Mozambique. Toutes les dispositions relatives aux abris temporaires ont pris fin dans le pays, et les 46 000 personnes qui vivent encore dans des camps ne retournent pas dans leurs anciens quartiers et villages.

« Je suis sûr que les investissements se feront progressivement, et nous soutiendrons cet investissement dans l'éducation et la santé et dans d'autres domaines nécessaires au bien-être de ces populations », a-t-il déclaré aux journalistes. Il a salué la résilience et la détermination de la population. 

« J'étais déjà impressionné par ce que j'ai vu. Ce que j'ai vu, c'est le grand courage et la détermination de ces gens. J'ai vu des gens semer et planter. Ils n'ont toujours pas de maison, mais ils sèment déjà, ils plantent déjà. Ils veulent déjà construire leur avenir ».

Besoins

Le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, visite le site de réinstallation de Mandruzi au Mozambique.
Photo : ONU/Eskinder Debebe
Le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, visite le site de réinstallation de Mandruzi au Mozambique.

Avant de quitter le camp, le Secrétaire général a entendu certaines préoccupations de la part des femmes, au sujet de la distance qui sépare l'école des enfants plus âgés, du manque de matériel pour commencer à construire des maisons et de la difficulté qu'il y a à élever les enfants en tant que mère seule. Mais il a surtout entendu dire que les personnes déplacées ne veulent pas dépendre de l'aide.

« Nous avons juste besoin des outils nécessaires pour retourner gagner notre vie », a dit une femme, ajoutant que certaines d'entre elles étaient couturières ou paysannes, et que d'autres aimeraient apprendre à lire et à écrire, ou à fabriquer des paniers et des poteries qu'elles pourraient vendre.  « Nous voulons avoir l'impression de gagner notre vie de nos propres mains. »

Après avoir visité le camp, António Guterres a rencontré l'équipe de hauts responsables humanitaires au Mozambique et a reçu une mise à jour sur la situation d'urgence. Il a également visité l'entrepôt du Programme alimentaire mondial (PAM) pour rencontrer plus de cent travailleurs humanitaires impliqués dans la réponse. Le chef de l'ONU a fait une mention spéciale aux travailleurs mozambicains, disant qu'il savait que certains d'entre eux « avaient été victimes, mais continuaient à travailler pour aider les autres ».

Le Secrétaire général a également visité un réseau de canaux, de barrages et de bassins de rétention qui ont été construits avec l'appui d'un groupe de partenaires, dont la Banque mondiale. L'investissement a permis d'éviter des dégâts plus importants pendant le cyclone, et il est en cours d'extension. Puis, au bureau du maire de la ville, il est monté sur le toit pour avoir une vue à 360° des dégâts.

Il a vu une tour dans le coin de l'immeuble et a décidé de l'escalader. Après avoir gravi une vieille échelle de fer, puis une autre, il s’est retrouvé au sommet du bâtiment, sur une petite plate-forme ronde, regardant vers le nord, où le cyclone Kenneth a frappé six semaines après Idai, touchant 400 000 personnes, et regardant vers l'ouest, vers les provinces de Buzio et Dundo, où ont péri la plupart des 648 victimes pendant la catastrophe.

Le Secrétaire général de l'ONU quitte le Mozambique marqué par la résilience, la détermination et l'indépendance dont a fait preuve la population.