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La FAO veut encourager la culture d’arbres près des productions agricoles

Des agriculteurs agro-forestiers durant la récolte à Kigoma, en Tanzanie. Les forêts font partie intégrante de la politique agricole nationale visant à protéger les terres arables de l'érosion et à augmenter la production agricole.
Photo : FAO / Simon Maina
Des agriculteurs agro-forestiers durant la récolte à Kigoma, en Tanzanie. Les forêts font partie intégrante de la politique agricole nationale visant à protéger les terres arables de l'érosion et à augmenter la production agricole.

La FAO veut encourager la culture d’arbres près des productions agricoles

Développement économique

A l’ouverture du 4ème Congrès mondial sur l’agroforesterie, la FAO insiste sur la nécessité de soutenir les politiques en vue de tirer profit des avantages liés à la culture d’arbres près des productions agricoles, en publiant un nouveau guide soulignant l’importance des droits fonciers

« L'agroforesterie n'est pas une zone de non-droit située à mi-chemin entre la foresterie et l'agriculture. Ce secteur devrait bénéficier d'un soutien aux politiques particulier », a déclaré lundi Maria Helena Semedo, Directrice générale adjointe et chargée des ressources naturelles à l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).

« L'agroforesterie peut contribuer à diversifier et à soutenir la production agricole et apporte des avantages sociaux, économiques et environnementaux indispensables aux utilisateurs des terres, et ce, à tous les niveaux », a-t-elle indiqué alors qu'elle s'exprimait lors du 4ème Congrès mondial sur l'agroforesterie, qui se tient à Montpellier, en France du 20 au 22 mai.

L'agroforesterie est un terme utilisé pour les technologies et systèmes d'utilisation des terres où les plantes ligneuses - les arbres, les arbustes, les palmiers, les bambous et autres - sont délibérément utilisées sur les mêmes parcelles que les cultures agricoles ou que le bétail afin de bâtir et de canaliser les synergies écologiques. Cette méthode attire de plus en plus l'attention en raison de sa capacité à piéger le carbone et à atténuer les effets du changement climatique, tout en contribuant au développement rural durable au niveau social, économique et environnemental.

« La FAO fait la promotion des multiples rôles que peut jouer l'agroforesterie », a précisé Mme Semedo, prenant l'exemple de plusieurs projets mis en œuvre sur des terres ayant connu l'exode comme au Népal ou encore au Guatemala et au Honduras où l'agroforesterie a permis d'améliorer la santé et la conservation de l'eau dans les régions en proie à la sécheresse et au Kirghizstan où il était question d'introduire des arbres fruitiers dans les plantations d'arbres.

L'agroforesterie n'est pas une zone de non-droit située à mi-chemin entre la foresterie et l'agriculture - Maria Helena Semedo, Directrice générale adjointe de la FAO

Le recours délibéré aux arbres pour les systèmes terrestres agricoles à usage mixte peut également contribuer aux efforts visant à conserver la biodiversité.

« Les systèmes traditionnels agroforestiers abritent entre 50 et 80% des espèces végétales que l'on peut trouver dans les forêts naturelles », a déclaré Mme Semedo alors qu'elle s'adressait aux participants du Congrès auquel assistent plus de 1.200 chercheurs, étudiants, chefs d'entreprises et dirigeants municipaux.

« Démocratiser l'adoption de meilleures pratiques agroforestières est l'objectif de certaines initiatives telles que la Décennie de l'ONU pour l'agriculture familiale, ainsi que les efforts visant à encourager les transitions agro-écologiques », a-t-elle souligné. Alors qu'on célèbre ce lundi la Journée mondiale des abeilles, elle a noté que les insectes pollinisateurs pouvaient également tirer profit des arbres et contribuer à faire augmenter la productivité agricole de près de 24%.

« La FAO se tient prête à soutenir les efforts déployés par les Etats membres visant à intégrer l'agroforesterie au sein de leurs politiques agricoles, et ce, dans le but d'atteindre les Objectifs de développement durable », a-t-elle ajouté.

Arbres et droits de propriété

Si la question de la sécurité des régimes fonciers tient une place importante dans l'ensemble des secteurs agricoles à travers le monde, elle revêt une importance primordiale lorsqu'il s'agit des initiatives agroforestières car les arbres prennent plusieurs années avant d'arriver à maturation.

« La reconnaissance des droits fonciers est essentielle », a déclaré Mme Semedo, faisant référence à une publication de la FAO lancée officiellement lors du Congrès et dont l'objectif est de conseiller les décideurs politiques, les gestionnaires de programmes et les agriculteurs désireux de promouvoir l'agroforesterie.

Selon le guide, il n'existe que très peu d'histoires de réussites agroforestières dans un contexte de régimes fonciers incertains.

Produite en collaboration avec le Centre World Agroforestry (ICRAF), l'ouvrage passe en revue plusieurs études de cas et se penche plus particulièrement sur la manière dont les programmes sont conçus, comme par exemple l'un d'entre eux en Ouganda où les agriculteurs étaient récompensés financièrement lorsqu'ils refusaient d'abattre davantage d'arbres. La démarche a entraîné une baisse du taux de déforestation dans la zone concernée.

La reconnaissance des droits fonciers est essentielle - Maria Helena Semedo, Directrice générale adjointe de la FAO

Souvent pourtant, des ambigüités concernant les régimes fonciers freinent les progrès. Par exemple, dans certains systèmes coutumiers en Afrique subsaharienne, planter des arbres peut servir à revendiquer des terres - une situation qui peut mener à des abus de pouvoirs ou à l'opposé, inciter d'autres à éviter de planter des arbres pour éviter de potentiels conflits. Parfois, les droits relatifs à une production d'arbres sont différenciés. Les écorces, les fruits et le bois sont par exemple attribués à des parties différentes, ce qui a pour effet de freiner les investissements de la part des petits exploitants agricoles qui ne pourront pas tirer profit de leur travail ou de les pousser à planter des espèces d'arbres inappropriées.

Dans de nombreux pays en développement, jusqu'à 70% des terres ne sont pas couvertes par un régime d'administration foncière et sont souvent gérées selon un système coutumier complexe. De telles règles vont souvent à l'encontre des femmes, qui sont confrontées à de nombreux tabous culturels allant de la culture de certains types d'arbres à l'interdiction d'en planter, compromettant ainsi leur droit à la propriété.

La FAO propose des recommandations valables sur les droits fonciers de manière générale à travers les Directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale, ainsi que par le biais d'une poignée d'autres publications sur le sujet.