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Myanmar : la libération des journalistes de Reuters ne doit pas occulter les problèmes des droits de l’homme (experts de l’ONU)

David Kaye, rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression (à gauche) et Yanghee Lee, rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar.
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David Kaye, rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression (à gauche) et Yanghee Lee, rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar.

Myanmar : la libération des journalistes de Reuters ne doit pas occulter les problèmes des droits de l’homme (experts de l’ONU)

Droits de l'homme

Au lendemain de la libération des deux journalistes de Reuters au Myanmar, deux experts des droits de l'homme des Nations Unies se sont dit « extrêmement préoccupés » par l’état de la liberté de la presse et de la démocratie dans ce pays d’Asie du Sud-Est.

Yanghee Lee, Rapporteure spéciale sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, et David Kaye, Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, ont salué la libération de Wa Lone et de Kyaw Soe Oo. Les deux experts ont toutefois exprimé de sérieuses préoccupations au sujet du processus judiciaire au Myanmar et sur le fait que les verdicts de culpabilité des deux journalistes soient toujours valables.

Les deux journalistes, lauréats cette année du prix Pulitzer pour leur enquête sur le massacre en 2017 d'hommes et de garçons rohingyas dans le village d'Inn Din, dans l'État de Rakhine, ont bénéficié d'une grâce présidentielle le 7 mai. Ils purgeaient une peine de sept ans d'emprisonnement à la suite de ce reportage, étant accusés d'avoir enfreint la loi de 1923 sur les secrets officiels.

« Bien que Wa Lone et Kyaw Soe Oo aient retrouvé leurs familles et ne soient pas obligés de purger leur peine, leurs condamnations en vertu de la loi sur les secrets officiels n'ont pas été retirées et ils n'auraient jamais dû être poursuivis en premier lieu », ont déclaré Mme Lee et M. Kaye.

Les deux experts restent « extrêmement préoccupés » par l'état de la liberté des médias et de l'espace démocratique au Myanmar. « Les autorités ont beaucoup à faire en matière de législation, de politique et de renforcement des institutions pour garantir un minimum d'espace démocratique, ce qui est particulièrement important dans la perspective des élections nationales de l'année prochaine », ont souligné Mme Lee et M. Kaye.

Au Myanmar, les procès contre d'autres journalistes et défenseurs des droits de l'homme se poursuivent. Des informations font état d'accusations récemment portées par l'armée contre les rédacteurs en chef du site d’informations Irrawaddy, de Radio Free Asia et du groupe de presse DMG, en raison de leurs reportages indépendants sur le conflit en cours dans l'État de Rakhine avec l'armée d'Arakan.

Ces affaires et les restrictions imposées à l'accès des médias à l'État de Rakhine empêchent tout reportage sur le conflit ainsi que sur les violations des droits de l'homme qui continuent d'être régulièrement perpétrées à l'encontre de la population civile, y compris des Rohingyas qui sont restés dans la région.

« Nous avions auparavant exprimé des préoccupations concernant l'indépendance du pouvoir judiciaire et l'engagement du gouvernement à mettre en place une démocratie respectueuse des droits de l'homme », ont déclaré les experts. « Nous exhortons donc une nouvelle fois le gouvernement à entreprendre les réformes nécessaires pour instaurer une démocratie véritable et inverser sa tendance à la répression ».

Des milliers de prisonniers ont été libérés dans tout le Myanmar dans le cadre de grâces présidentielles accordées chaque année lors des célébrations du nouvel an. Nombre d’entre elles ont été condamnés en vertu de lois nécessitant une réforme urgente. Plusieurs personnes condamnées pour des raisons politiques ont été libérées, mais au moins 20 prisonniers politiques sont toujours en prison au Myanmar.