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Mali : l’ONU alerte sur la détérioration de la situation humanitaire

La population d'Ogossagou, village de la région de Mopti au Mali. L'attaque de ce village le 23 mars a fait plus de 160 morts et 70 blessés. Des centaines de personnes sont déplacées et de nombreuses habitations et greniers incendiés.
UNICEF/Maiga
La population d'Ogossagou, village de la région de Mopti au Mali. L'attaque de ce village le 23 mars a fait plus de 160 morts et 70 blessés. Des centaines de personnes sont déplacées et de nombreuses habitations et greniers incendiés.

Mali : l’ONU alerte sur la détérioration de la situation humanitaire

Aide humanitaire

Face aux violences intercommunautaires croissantes au Mali, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) appelle à davantage d’appui en matière de financement de l'aide et de médiation.

 

« Je crois que nous avons traversé une ligne rouge ». Deux semaines après le massacre d’Ogossagou au centre du Mali, la cheffe d’OCHA au Mali, Ute Kollies, évoque des « conséquences terribles » pour ce village Peul ensanglanté.

« On avait déjà vu des massacres et des fosses communes, mais là, il y a 160 personnes qui ont été tuées, tous des civils, et un village complètement détruit », a déclaré Mme. Kollies dans un entretien accordé à ONU Info.

Des femmes fusillées, des enfants jetés dans des puits, des hommes tués au couteau. Ce sont quelques uns des terribles témoignages rapportés après ce massacre. Dans son bulletin en date du 27 mars 2019, OCHA rappelait que les assaillants ont également brûlé plus de 400 maisons et 80 greniers. Les attaques ont par ailleurs entrainé la perte de 940 têtes de bétail.

OCHA estime le nombre de survivants à Ogossagou à 850 personnes sous le choc du traumatisme de l’attaque et qui ont besoin d’aide. « Ce sont aussi des déplacements de civils d’Ogossagou jusqu’à Mopti, notamment des femmes enceintes, des enfants à bas âge », a précisé Mme Kollies, tout en insistant sur les besoins de ces populations vulnérables. « Des populations à héberger, à nourrir, à traiter selon leurs souffrances », a-t-elle ajouté.

La situation dans la région de Mopti reste un cruel rappel de la situation humanitaire au Mali qui « continue de se détériorer et de devenir plus complexe avec des besoins qui augmentent chaque jour en raison du conflit et des déplacements qu’il entraîne ».
En raison de l’escalade de la violence, le nombre de personnes déplacées dans toute la région de Mopti est passé de 2.100 en janvier 2018 à presque 66.000 maintenant. « Ça veut dire que c’est une détérioration énorme », a fait valoir la responsable humanitaire onusienne au Mali.

Le Bulletin d’OCHA note qu’à la suite de l’attaque de Welingara le 23 mars, 500 personnes ont été déplacées vers Guiwagou. Elles sont hébergées dans des familles. Environ 1.500 personnes du village voisin de Bare Dar Salam ont été déplacées de façon préventive à Diamnaty.

Plus de 120.000 déplacés internes et plus de 136.000 réfugiés

Les déplacements de population sont une tendance observée dans tout le Mali. De 35.000 déplacés en janvier 2018, ce nombre est désormais passé à 123.000.

Pour Mme Kollies, ces mouvements de population ne sont pas seulement dus aux conflits communautaires. « Parfois ce sont des déplacements préventifs » surtout « quand on voit dans certains villages, des hommes se préparer ». Comme pour dire que ces déplacements sont inévitables quand la « population ne sent pas en sécurité ». Plus de 136.000 Maliens se sont également réfugiés dans les pays voisins.

De façon générale, les chocs climatiques récurrents et l’insécurité ont des effets dévastateurs sur l’insécurité alimentaire au Mali. Bien que la situation sécuritaire se détériore au Mali, les opérations restent sous-financées. Sur les plus de 296 millions de dollars demandés au titre de l’aide humanitaire pour le pays d’Afrique de l’Ouest pour cette année, l’ONU et ses partenaires n’ont reçu qu’un peu plus de 26 millions, soit moins de 10% du montant nécessaire.

Dans le même temps, les besoins humanitaires augmentent. « Lors du lancement de l’appel, nous étions à 3,2 millions de Maliens dans le besoin et maintenant, nous sommes à 3,8 millions, avec la période de soudure dont plus 500.000 personnes qui seront en situation de crise ou d’urgence », a mis en garde Mme Kollies.

Si un Malien sur cinq risque de souffrir d’insécurité alimentaire, ce sont plus de 600.000 enfants qui sont à risque de malnutrition aiguë. « Nous avons besoin de financement pour pouvoir aider les Maliens mais nous avons aussi besoin de médiation pour mettre fin à cette spirale de violence », a souligné la Cheffe d’OCHA au Mali.