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A la mosquée Al-Azhar au Caire, Guterres appelle à la solidarité et à contrer les discours de haine

Le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, s'exprimant à l'intérieur de la mosquée historique Al-Azhar au Caire, Égypte. 2 avril 2019.
Photo : ONU
Le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, s'exprimant à l'intérieur de la mosquée historique Al-Azhar au Caire, Égypte. 2 avril 2019.

A la mosquée Al-Azhar au Caire, Guterres appelle à la solidarité et à contrer les discours de haine

Droits de l'homme

Le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, s'est rendu à la mosquée Al-Azhar, au Caire, en Egypte, pour exprimer son respect pour l'islam et sa solidarité avec les musulmans en ces temps troublés.

« Ici, on ne peut que ressentir le poids impressionnant de plus de 1.000 ans d'histoire, de culture, d'érudition et de culte », a constaté le Secrétaire général en prenant la parole.

António Guterres a ensuite évoqué l’attaque terroriste contre deux mosquées à Christchurch, en Nouvelle-Zélande, le mois dernier, où plus de 50 personnes de tous âges ont été tuées.

Nous avons des religions, des cultures et des histoires différentes, mais nous sommes tous liés par notre humanité commune.

Il a cité de nombreuses histoires émouvantes sur des victimes qui ont  perdu la vie en sauvant d’autres personnes, ou qui ont prononcé des paroles de pardon après avoir perdu un être cher, « parce que c’est ce que l’islam m’a appris ».

Il a ainsi invoqué une sourate du Coran : « la bonne action et la mauvaise ne sont pas pareilles. Repousse (le mal) par ce qui est meilleur ; et voilà que celui avec qui tu avais une animosité devient tel un ami chaleureux ».

Le chef de l’ONU a souligné « les extraordinaires manifestations de leadership, d'amour et de solidarité de la part du peuple néo-zélandais et d'ailleurs ». Il a évoqué l’exemple d’un homme anglais, blanc et non musulman, qui s’est installé à l’extérieur d’une mosquée tenant une pancarte qui disait : « Vous êtes mes amis, je veillerai pendant que vous priez ». 

Le Secrétaire général a également souligné la solidarité manifestée l’an dernier à Pittsburgh, notamment par la communauté musulmane, lors de la pire attaque terroriste antisémite de l‘histoire des États-Unis. « Le directeur exécutif du Centre islamique de Pittsburgh a à cette époque déclaré  : ‘Nous voulons juste savoir ce dont vous avez besoin. Si ce sont des personnes extérieures à votre prochain service qui vous protègent, faites-le nous savoir. Nous y serons ’ », a rappelé M. Guterres.

« C'est l'esprit qui, je le sais, est profondément ancré dans l'Islam - une foi d'amour, de compassion, de pardon, de miséricorde et de grâce », s’est-il félicité.

Un exemple remarquable de tolérance et d’ouverture

L’ancien Haut-commissaire pour les réfugiés a reconnu la « générosité des pays musulmans ouvrant leurs frontières aux personnes en détresse dans un monde où, malheureusement, tant de frontières sont fermées ».

J'ai vu la générosité des pays musulmans ouvrir leurs frontières aux personnes en détresse dans un monde où, malheureusement, tant de frontières sont fermées.

Cette générosité illustre, selon lui, la « plus belle prescription de protection des réfugiés de l'histoire du monde », qui date de 14 siècles avant la Convention des réfugiés de 1951, la sourate Al-Tawbah, verset 6 :  « Et si quelqu'un cherche votre protection, protégez-le afin qu'il puisse entendre les paroles d'Allah. Puis escortez-le là où il peut être en sécurité ».

Le chef de l’ONU a appelé à « se serrer les coudes et à se protéger mutuellement » dans un monde ou « la haine, l'antisémitisme, le racisme et la xénophobie envers les musulmans ne cessent de croître ». « La propagande haineuse entre dans le courant dominant et se propage comme une traînée de poudre par le biais des médias sociaux et de la radio… dans les démocraties libérales aussi bien que dans les États autoritaires ».

« Lorsque des personnes sont attaquées, physiquement, verbalement ou sur les médias sociaux, en raison de leur race, de leur religion ou de leur appartenance ethnique, toute la société est affaiblie », a affirmé António Guterres. Il a regretté que « ces forces obscures » menacent les valeurs démocratiques, la stabilité sociale et la paix, stigmatisant les femmes, les minorités, les migrants et les réfugiés.

« Nous avons tous un rôle à jouer pour réparer les fissures et mettre fin à la polarisation qui sont si répandues dans nombre de nos sociétés aujourd'hui », a-t-il soutenu, appelant à « contrer et rejeter les personnalités religieuses et politiques qui exploitent les différences ».

Alliance des religions

Le chef de l’ONU s’est dit encouragé par le geste de fraternité interconfessionnelle du grand imam d'Al-Azhar, Cheikh Ahmed al-Tayeb, et du pape François qui se sont donné la main à Abou Dhabi en février.

 Rien ne justifie le terrorisme, et il devient particulièrement hideux lorsque la religion est invoquée.

António Guterres a affirmé que l’ONU allait faire de son mieux pour que le texte signé par les deux grands leaders religieux sur « la fraternité humaine pour la paix mondiale et le vivre ensemble », qui appelle les dirigeants religieux et politiques à mettre fin aux guerres, aux conflits et à la dégradation de l'environnement, « aille partout et soit vu par tous ».

Ce document appelle également les chrétiens et les musulmans à se reconnaître et à se respecter mutuellement et à travailler ensemble pour le bien de l'humanité.

Le Secrétaire général a salué l'appel lancé par le grand Imam aux musulmans du Moyen-Orient pour qu'ils protègent les communautés chrétiennes et les initiatives prises par Al-Azhar pour promouvoir « le vrai visage de l'islam et lutter contre les philosophies extrémistes violentes et la propagande terroriste ». « Rien ne justifie le terrorisme, et il devient particulièrement hideux lorsque la religion est invoquée », a martelé M. Guterres.

Les ODD, clef d’une société inclusive

Le Secrétaire général a invité l’audience à se demander « pourquoi tant de gens se sentent exclus » et « pourquoi ils sont tentés par des messages extrêmes d'intolérance les uns contre les autres ».

« En fin de compte, nous devons tous travailler ensemble dans notre intérêt collectif », a-t-il estimé. « C'est le raisonnement qui sous-tend le Programme des Nations Unies pour 2030 et ses objectifs de développement durable (ODD) - le plan d'action mondial pour une mondialisation équitable et une société inclusive et prospère ». 

« Oui, nous avons des religions, des cultures et des histoires différentes, mais nous sommes tous liés par notre humanité commune. Au lieu de nous attarder sur nos différences, concentrons-nous sur ce qui nous unit et travaillons ensemble pour un avenir meilleur pour tous, partout », a conclu António Guterres.

 

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